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Omar Bongo, un des derniers «dinosaures politiques» d’Afrique

Au pouvoir depuis quarante et un ans, le chef de l’Etat est hospitalisé à Barcelone pour un cancer. Officiellement, il est en Espagne pour «faire un bilan de santé»

La joute aux pronostics sur la santé du président gabonais, Omar Bongo, hospitalisé dans une clinique privée de Barcelone depuis le 21 mai, bat son plein. Selon les communiqués officiels, il s’est rendu en Espagne pour «faire un bilan de santé et y suivre des soins appropriés afin d’être au mieux de sa forme pour regagner le Gabon».

Les déclarations du ministre espagnol des Affaires étrangères, sont néanmoins plus alarmantes. Confirmant la présence d’Omar Bongo, Miguel Angel Moratinos expliquait jeudi 21 mai au quotidien espagnol La Vanguardia qu’«il va très mal». Depuis, diverses sources médicales et proches du président parlent de «grave tumeur» ou «cancer des intestins avec métastases». Déclarations qualifiées par les autorités gabonaises d’«acharnement média­tique […] entretenu pour semer le trouble dans l’esprit du peuple gabonais à des fins déstabilisatrices». Son prédécesseur, Léon Mba, quittait Libreville pour Paris quarante et un ans plus tôt, malade, pour ne plus jamais revenir. Funeste présage?
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Partenaire de la France

A 73 ans, Omar Bongo est l’un des derniers «dinosaures politiques» d’Afrique et gardien des secrets de la Françafrique. S’étant distingué lors du putsch en 1964 par son assurance et son sens de l’autorité, il est nommé vice-président en 1966, fonction créée sur mesure en vue de sa future intronisation. Son accession au pouvoir, une année plus tard, se fait sous les bons auspices du général de Gaulle, souligne Patrick Pesnot, auteur du livre Les dessous de la Françafrique. La richesse du sol en pétrole, bois et uranium a longtemps fait du Gabon un partenaire prioritaire pour la France. Et Omar Bongo était le plus fidèle défenseur de ses intérêts.

L’accession de Nicolas Sarkozy au pouvoir a modifié le rapport de la France à ses anciennes colonies. Selon Antoine Glaser, rédacteur en chef de la Lettre du continent, le bateau Françafrique navigue désormais entre deux eaux: de la «communauté de destin», il met le cap vers des relations plus «affairistes». Nicolas Sarkozy n’a pas la mémoire des liens étroits, voire incestueux, qui unissaient certains dirigeants africains à l’Hexagone. Désormais, les intérêts de la France sont redéfinis sur l’ensemble du continent en fonction d’objectifs essentiellement économiques. Ce qui n’est pas sans créer des tensions nouvelles.Plainte jugée recevable

La scène de ménage entre Paris et Libreville est aggravée par l’affaire des «biens mal acquis». Omar Bongo est suspecté d’avoir détourné des fonds publics pour acquérir un important patrimoine d’immeubles et de voitures en France. La juge d’instruction parisienne Françoise Desset a jugé recevable la plainte déposée le 5 mai pour «recel de détournement de fonds publics». Par ailleurs, neuf de ses comptes, totalisant 4,3 millions d’euros, ont été saisis en février dans un contentieux commercial. Le président dénonce l’acharnement des autorités françaises et les médias gabonais qualifient ces accusations de «campagne médiatique d’une bassesse abjecte».

Au pouvoir depuis quarante et un ans, le dirigeant «gère son petit pays comme un chef de village», explique Antoine Glaser. Profitant de la manne pétrolière, il a les moyens d’acheter le silence ou l’amitié. Maniant le bâton et le portefeuille, il lamine les chefs d’opposition ou les intègre au pouvoir. Récemment encore, Pierre Mamboundou, «l’homme qui disait non» au régime de Bongo, s’est vu proposer 21,5 millions de dollars pour développer sa circonscription de Ndende. L’autorité et le charisme du «vieux» lui assurent par ailleurs un respect au-delà des frontières nationales. Il est fréquemment consulté par les autres dirigeants africains et joue le médiateur dans les crises affectant le continent. Antoine Glaser ajoute qu’il est un «gestionnaire d’hommes» et un fin stratège.
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«Il n’y a pas de dauphin! Je serais candidat en 2012 si Dieu m’en donne encore la force», claironne le dirigeant au lendemain de sa réélection en 2005. Mais qu’arrivera-t-il si le coup de pouce divin venait à manquer? Depuis «la suspension momentanée de ses activités», le 7 mai dernier, le pays tourne au ralenti. Le Gabon est figé, explique Antoine Glaser, car tout le monde sait qu’«une fois que papa ne sera plus là pour arbitrer, les choses vont être très compliquées». Le successeur le plus probable est le fils du président, Ali Ben Bongo. Ministre de la Défense, il a posé les jalons de sa succession en plaçant ses hommes dans les unités stratégiques de l’armée. Par ailleurs son principal allié et ami, le ministre de l’Intérieur, André Mba Obame, représente l’ethnie majoritaire des Fang. Atout majeur, dans un pays où la population estime que le pouvoir doit lui revenir après quatre décennies d’autorité des Téké.

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