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Gabon : Les premiers écueils du consensus national

Salué par la communauté internationale et les observateurs locaux, le calme plat de la transition politique gabonaise connaît ses premières vagues à l’approche de l’échéance cruciale du 30 août prochain. A Libreville, les populations interrogées le 27 juillet dernier laissaient paraître les premiers doutes sur la fiabilité du processus électoral. Ils remettent en question le «consensus national» érigé en boussole par le chef de l’Etat pour conduire cette transition historique de la vie politique du pays.

Pourtant bien lancée depuis le 10 juin dernier, la transition politique semble avoir été entâchée de quelques manquements qui risquent de porter atteinte à la crédibilité du processus électoral.

Alors qu’un réel engouement populaire était né pour relever le défi d’une transition démocratique «irréprochable», les premiers tangages de la barque de Rose Rogombé et son équipage pourraient bien sabrer la ferveur populaire pour cette élection cruciale de l’histoire politique du pays.

Les premiers écueils sur laquelle s’est abîmée la «barque démocratique» de Rose Rogombé semblent avoir été d’une part la constitution du fichier électoral, et d’autre part le maintien au gouvernement de deux ministres candidats à l’élection, notamment au poste sensible de la Défense nationale.

A Libreville, on s’accorde à marquer ces deux situations comme les premiers «couacs» de la transition politique jusque-là relativement consensuelle.

«Par rapport au fichier électoral, je dirais que les délais d’inscription ont été très courts et que la liste électorale aurait dû être révisée régulièrement au lieu d’attendre une élection», estime Serge, fonctionnaire au ministère des Affaires sociales.

«La transition politique au Gabon a bien suivi son cours vu qu’après le décès du président, la Constitution a été appliquée, et à ce niveau je me sens satisfait. Cette élection est décisive, elle entre dans le cadre d’une nouvelle ère. (…) Les Gabonais veulent quelque chose de nouveau, d’où leur engouement massif vers les différents centres d’inscription», confie Gilles, étudiant en 3e année de Droit à l’Université Omar Bongo (UOB) de Libreville.

C’est «une élection très importante pour leur histoire, il fallait quand même que le ministre de l’Intérieur proroge la date des révisions de deux semaines pour donner à tous les Gabonais la possibilité d’aller se faire inscrire», ajoute Serge.

«Le délai est très court et ça ne sert à rien de se voiler la face. Mais comme tout repose sur la Constitution, on ne peut rien y faire», déplore Michelle, agent de recouvrement dans une entreprise de la place.

«Jusque-là le processus électoral s’est bien déroulé, il a respecté strictement les normes internationales. (…) Mais ce qui est contestable ici c’est la configuration gouvernementale», estime pour sa part Loïc, étudiant en première année de Sciences économiques à l’UOB.

«Il y a des candidats aux présidentielles qui sont toujours au gouvernement. Il serait souhaitable pour que les règles constitutionnelles soient plus crédibles que lesdits ministres démissionnent», estime-t-il à cet effet.

«Constitutionnellement cela n’est pas interdit. Toutefois la dénonciation se fera du point de vue de l’éthique politique et de la pratique constitutionnelle. Il est inconcevable du point de vue de conscience individuelle que des personnes qui déclinent déjà des ambitions à briguer la magistrature suprême puissent encore être là en tant que ministres alors qu’elles sont déjà dans la course pour l’élection, ça sonne mal», explique Gilles, l’étudiant en droit.

Le tryptique «Consensus, Constitution, Concertation» annoncé par le chef de l’Etat pour conduire la transition semble avoir pris un coup au premier volet. Dans les rues de Libreville, le consensus n’est plus tout à fait au rendez-vous et on regrette que certains leaders n’aient pas suivi la voie de la transparence.

«Le geste du Premier ministre est à féliciter contrairement à ceux qui s’accrochent au pouvoir», remarque Serge, le fonctionnaire des Affaires sociales.

«Tout jusque-là allait très bien et puis surviennent à mon avis trois problèmes. Le premier est ce gouvernement pléthorique pour deux semaines qui risque de perdre en efficacité. Le deuxième, ce sont ces deux ministres qui ne veulent pas sortir du gouvernement et qui montrent donc qu’ils ne veulent pas être à égalité de chance avec les autres. Et le troisième, plus inquiétant et plus fondamental, c’est cette histoire de listes électorales qu’on arrive pas à mettre à jour», synthétise le banquier Samson Ngomo.

Rose Rogombé et son équipage parviendront-ils à mener la barque de la transition politique à bon port ?

Pour cette élection cruciale de l’histoire politique du pays, le taux de participation au scrutin du 30 août prochain devrait être le premier baromètre de la crédibilité du processus. D’ici l’ouverture de la campagne, il reste un peu plus de 15 jours au capitaine du navire pour redresser la barre et tenir ferme le cap d’une transition démocratique et consensuelle.

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