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Gabon : Yvette Ngwèvilo Rékangalt : ˝150 000 francs de SMIG, est-ce vraiment suffisant ?˝

Diplômée de Droit pétrolier, ex-cadre à Elf Gabon, membre émérite de la société civile gabonaise et candidate à l’élection présidentielle du 30 août, Yvette Ngwèvilo Rékangalt se prononce sur la pauvreté endémique du Gabon, le SMIG à 150 000 francs promis par Ali Bongo et les contrats pétroliers. Sans complaisance, elle ouvre son cœur de brave femme ainsi qu’elle l’a toujours fait.

On dit depuis longtemps que vous avez le potentiel nécessaire pour ce poste, pourquoi ne vous êtes-vous jamais portée candidate à la présidentielle alors que le président Bongo vivait et quelles sont vos motivations pour cette fois-ci ?

Je ne me suis jamais portée candidate parce que je n’étais pas préparée à ces élections et je voulais vraiment vérifier ce que les Gabonais, comme vous l’avez dit, disent : que j’ai vraiment du potentiel. Maintenant qu’ils me l’ont dit sous toutes les coutures, j’ai fini moi-même aussi par me convaincre que j’ai du potentiel. J’ai peaufiné un certain regard que je devais porter sur les questions de politique et les questions de développement économique.

Le volet que je connaissais le mieux, c’est le quotidien des Gabonais : les difficultés que connaissent les femmes, les hommes, les jeunes. J’avais besoin d’avoir une expérience avérée en matière de politique, d’avoir un regard sur l’international et sur les questions économiques. Maintenant, c’est chose faite. Je me sens tout à fait prête. Et, comme on dit dans mon village, ˝tous régimes de palme ne mûrissent pas au même moment˝. Donc, c’était le moment des personnes qui se sont présentées en ce temps-là. Je crois que les Gabonais avaient besoin qu’on ne joue pas à l’amalgame. Il y a une période où ils ont besoin de femmes nouvelles, d’intelligences nouvelles, de capacités nouvelles. Je crois que je viens à point nommé pour leur offrir ma personnalité.

Comment comptez-vous concrètement remédier à la pauvreté qui frappe de plein fouet les Gabonais et qui est, à ce jour, le premier problème du pays ?

D’abord en remettant tous les Gabonais sur un même pied d’égalité. C’est ce que nous avons conçu, pour les Gabonais, dans le projet de société que je vais leur présenter. Il faut d’abord accepter que tous les Gabonais sont sur un même pied d’égalité. Il faudra donc réduire les écarts qu’il y a, notamment dans le traitement salarial, mais aussi au niveau d’un certain nombre de choses qui vont avec le salaire. Des pressions énormes qui pèsent sur les personnes qui sont sans moyens, alors que d’autres vivent dans des conditions beaucoup, beaucoup plus aisées qui n’ont parfois rien avoir le niveau de vie du pays. Il faut donc revoir cela.

Je prendrai comme exemple les allocations familiales. Vous savez que les femmes qui travaillent ont droit aux allocations familiales et celles qui sont démunies, celles qui sont à la maison, qui n’ont pas d’emploi, n’y ont pas droit. Il faut regarder le problème de la prise en charge des indigents, le problème des personnes âgées. Il y a des personnes âgées qui vivent dans des rebuts, sans loisir, sans possibilité de contact avec l’extérieur, parce que laissées à la merci d’une famille qui, parfois, se retrouve sans ressources.

Il y a des foyers de dix personnes avec, pour seul revenu, le salaire tout à fait étriqué d’une seule personne. Pour remédier à cela, il faudra ouvrir de grands chantiers. Il y a des pôles de richesse, notamment la forêt ou l’agriculture. Il y a le problème de la souveraineté alimentaire. Comment, avec la richesse du sol que la providence nous a donné et avec une population d’un million d’habitants, peut-on comprendre que l’on ne puisse atteindre notre autosuffisance alimentaire? Comment, avec cela, en être encore dans des conditions de précarité quand à l’approvisionnement en aliments. Ce sont des choses qu’il faudra corriger et très, très vite. Certains pays voisins n’importent plus de poulets congelés. On se retrouve encore à consommer du poulet congelé parce qu’on est pas parvenu à développer l’élevage dans notre pays, à avoir des œufs. Il y a des foyers entiers qui ne mangent pas un seul œuf par jour… il faudra corriger.

Vous êtes dans le domaine du constat, qu’allez-vous faire plus concrètement pour remédier à la pauvreté ?

J’ai consacré cette période de pré-campagne à soutenir que j’ai des potentialités. La période de campagne ouvrira la distribution, la mise en place et l’explicitation de mon projet de société. Ce sera donc le deuxième volet de mon calendrier. J’ai cru comprendre qu’il y a d’autres candidats qui apprécient déjà mon projet de société dont la quintessence se trouve dans le discours de présentation de ma candidature. J’y ai expliqué quel est le rêve que je fais de ce pays.

Vous venez de dire que certains candidats apprécient votre projet de société. Justement, l’un des candidats a proposé un SMIG à 150 000 F.CFA. Il promet également de consacrer 45% du budget de l’État à la jeunesse. Qu’en pensez-vous ? Irez-vous plus loin ou en deçà ?

Je ne saurai traiter du SMIG maintenant. Ce qui est certain c’est qu’au regard du coût de la vie, que représentent vraiment 150 000 francs ? Combien faut-il, pour se loger, à une famille qui a trois enfants ? Combien leur restera-t-il lorsqu’ils auront payé un loyer de 80 à 100 000F ? De quoi vont-ils vivre ? Ils ont besoin d’un sac de taro, d’un sac de riz et j’espère qu’ils ne seront plus au poulet congelé … Croyez-vous donc que 150 000F sont suffisants ? Je ne le pense pas, très honnêtement. Par ailleurs, il faut se méfier aussi des discours de campagne. Selon un adage bien connu, les discours des hommes politiques n’engagent que ceux qui les écoutent.

Moi, je ne suis pas un homme politique. Je suis un candidat issu de la société civile et je veux être réaliste. Je voudrais, surtout, ne déclarer que ce que je pense être vrai, ce que mes équipes trouveront réalisable, à l’issue d’une étude sérieuse. Dire qu’on va consacrer 45% du budget à la jeunesse, c’est vrai et faux. C’est vrai dans la mesure où, effectivement, tous les actes de développement que nous allons poser, bénéficieront surtout à la jeunesse. Ce n’est pas réellement pour ceux qui sont partis ou ceux qui vont partir incessamment. Ce sera pour que les jeunes puissent circuler, pour que jeunes puissent avoir du travail, pour que demain le Gabon soit meilleur pour la jeunesse. C’est vrai et c’est faux et en même temps. C’est un discours de campagne, un discours politique.

Vous avez longtemps travaillé dans le secteur pétrolier. Comment comptez-vous revoir ce que les Gabonais perçoivent comme des contrats léonins qui emprisonnent le Gabon dans un sous-développement lamentable ?

Il faut que nous mettions un accent particulier sur la communication du gouvernement. Je n’ai jamais cessé, chaque fois que j’ai rencontré un Premier ministre du Gabon et ce, avec les trois derniers Premiers ministres, de répéter que le gouvernement communique mal. Et je ne serais pas à la tête d’un exécutif qui communique mal avec les Gabonais. Voyez-vous, les contrats pétroliers ne sont pas réellement connus des Gabonais. Vous entendez parler des marchés pétroliers à tous les niveaux de la société, mais presque personne ne sait vraiment ce que c’est qu’un contrat pétrolier. Il faut donc que le gouvernement communique un peu mieux sur toutes ces questions. Il faut vulgariser…

Voyez-vous, nous avons une université au Gabon et il n’y a aucun spécialiste qui enseigne le droit pétrolier. Il faut que ces matières soient enseignées. Il ne faut pas les maintenir dans une opacité telle que tout le monde puisse parler de tout et de rien.

Il peut y avoir des contrats discutables. Mais un contrat ne se révise pas n’importe comment. Dans la rédaction même d’un contrat, il y a des périodicités qui permettent la révision du contrat. Mais qui révise ? Qui veut réviser ? Ceux qui révisent sont des Hommes. Il faut donc également amener une moralisation de la haute administration. Il faudra sortir de tout cet encadrement dans lequel on est nommé sur des bases géopolitiques. Il faut donc gagner en expertise, acquérir des bases solides pour savoir analyser un contrat, il faudra travailler avec sérieux. Il ne faudra plus, lorsqu’on enverra un gabonais en mission à l’étranger pour la négociation d’un contrat, que l’on assiste à ce à quoi nous avons eut droit. Dieu merci, nous avons des personnes tout à fait capables de faire ce travail. Il faudra donner la possibilité à ceux-là qui peuvent le faire, de travailler, de regarder ce qui peut être fait. Surtout sur le nouveau domaine pétrolier qui s’ouvre, il faut être rigoureux dans l’analyse que nous faisons et dans le traitement des dossiers.

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