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CEMAC : Les starting blocks grippés de l’intégration régionale

Reporté déjà à deux reprises à la fin de l’année 2009, le sommet des chefs d’Etats de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (CEMAC) qui doit ce tenir au milieu de ce mois à Bangui, en République centrafricaine, concentre une fois de plus tous les espoirs pour dénouer les amarres du processus d’intégration régionale. Le marché régional reste encore en 2009 le ventre mou du continent malgré l’énorme potentiel des pays membres, qui s’enlisent dans une guerre de leadership sans fin.

Dans son dernier rapport sur «les économies de l’Afrique centrale», le bureau sous-régional de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique a indiqué que les échanges intra-communautaires représentaient en 2006 entre 0,5 et 1% du commerce total des Etats membres.

Un score qui place l’Afrique centrale directement en bas du tableau des marchés régionaux africains, alors que le Marché commun de l’Afrique orientale et australe (COMESA) affiche 5%, la Communauté économique de l’Afrique australe (SADC) et la Communauté économique et douanière des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) 10% et l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) parvient à réaliser 15% de ses échanges commerciaux en interne.

La solution qui permettrait de pallier ce retard est pourtant connue depuis belle lurette : intégration régionale. Le projet est à la une des ordres du jour de toutes les concertations sous régionales. Il est tantôt érigé en défi, tantôt en priorité, avec à chaque fois un plan d’action «concret» avec un «calendrier cohérent». Pourtant à chaque échéance le constat est le même : le processus est enchevêtré de sempiternelles guerres de leadership.

Pour le professeur Joseph Vincent Ntuda Ebodé, chef du Centre de recherches et d’études politiques et stratégiques de l’Université de Yaoundé II, «la première action à mener consiste à éviter que les leaders de la sous-région retombent dans la suspicion».

Un des exemples flagrants de cette guerre de leadership reste l’existence de deux places boursières pour un marché financier si restreint. Un paradoxe qui atteint aujourd’hui son paroxysme puisque les dernières réunions de la Commission de surveillance des marchés financiers d’Afrique centrale (COSUMAF) planchent sur la fusion des bourses de Douala (Douala Stock Exchange, DSX) et de Libreville (Bourse des valeurs mobilières d’Afrique centrale, BVMAC).

«Les décisions sont prises pour mettre un terme à cette situation», avait même affirmé le directeur du marché commun de la CEMAC, André Guy- Sinclair Tekpa.

L’autre amarre du processus d’intégration régionale concerne les réserves de certains pays membres à la libre circulation des biens et des personnes. Avec la Guinée équatoriale, le Gabon est connu pour sa grande réserve sur la libre circulation des biens et des personnes dans l’ espace communautaire.

Depuis la décision d’instituer un passeport communautaire en 2001 à Bangui, les gouvernements gabonais et équato-guinéen étaient encore jusque récemment les seuls à ne pas avoir avaliser l’accord. Le Gabon y a finalement souscrit, après avoir obtenu l’ intégration des données biométriques dans ce passeport et la Guinée équatoriale a dû suivre, bon gré mal gré.

Le Gabon, El Dorado pétrolier de moins d’1,5 millions d’habitants, et la Guinée équatoriale, érigé récemment à la 3e place des producteurs africains de l’or noir, ne cachent pas leurs craintes de se voir envahir par leurs voisins de la CEMAC. En 2009, Malabo n’a d’ailleurs pas pris la peine de justifier officiellement la fermeture de ses frontières avec le Cameroun et les refoulements arbitraires des camerounais installés sur son sol.

Annoncée pour le 1er janvier 2010, la mise en circulation du passeport biométrique CEMAC doit finalement encore recevoir le dernier aval des chefs d’Etats lors du sommet de Bangui prévu pour la mi janvier, après les rendez-vous manqués de fin novembre et début décembre.

Et sur ce point comme sur le premier, la Guinée équatoriale pose une situation conflictuelle. «La Guinée équatoriale est entrée dans l’UDEAC, ancêtre de la CEMAC, à la suite d’un certain nombre d’accords, dont essentiellement l’accord du Cameroun et du Gabon. A ce moment-là, elle ne présentait pas la posture qu’elle a aujourd’hui», explique encore le politologue camerounais.

«La Guinée équatoriale a respecté cet acquis jusqu’au moment où sa posture de production du pétrole a changé les rapports de force entre les Etats de la sous-région. Donc, elle demande à être prise en compte et sur la base de ses récriminations, l’on a engagé des réformes», poursuit-il.

Aujourd’hui troisième producteur de pétrole en Afrique après le Nigeria et l’ Angola, la Guinée équatoriale réclame par exemple un droit de regard dans la gestion et la désignation des responsables de Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC) où elle détiendrait à présent près de la moitié des avoirs (environ 48%).

Le récent scandale de la BEAC mettant en cause le gouverneur gabonais, Philibert Andzembé, avait d’ailleurs remis au goût du jour le débat, largement alimenté par Malabo, sur la révision des accords de Fort-Lamy accordant le gouvernorat de la banque sous régionale au Gabon.

Le sommet de Bangui doit, une fois encore, dégripper les starting blocks de l’intégration régionale ? Les 30 millions de citoyens de la communauté qui veulent circuler et entreprendre librement dans l’espace CEMAC espèrent que cette fois, la montagne accouchera d’autre chose que d’une souris.
Publié le 06-01-2010 Source : africatime Auteur : gaboneco

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