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Les Etats africains cinquantenaires priés de réaffirmer leur engagement à la liberté de presse

Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) , basé à New-York (Etats-Unis), dans une adresse aux chefs d’Etat d’Afrique francophones attendus à Paris pour les festivités du 14 juillet, qui cette année rendent honneur aux 50 ans d’indépendance de leurs pays, prie lesdits dirigeants de « réaffirmer leur engagement à la liberté de presse », selon un texte parvenu , ce vendredi, à la rédaction de GABONEWS, et que nous publions dans son intégralité.

TEXTE INTEGRAL

« Les chefs d’État des pays d’Afrique francophone

Vos Excellences:

Á l’occasion de votre réunion à Paris pour les festivités du 14 juillet, qui cette année rendent honneur aux 50 ans d’indépendance de vos pays, nous, soussignés défenseurs de la liberté de la presse en Afrique, vous demandons de vous inspirer de ce tournant historique pour déclarer votre engagement en faveur d’une presse libre, dynamique et autonome comme pierre angulaire du développement de l’Afrique francophone dans les cinq prochaines décennies.

Après les indépendances, les régimes monopartites en Afrique francophone ont souvent cherché à restreindre la presse au rôle de messager du gouvernement. Malgré les contraintes, des journalistes se sont distingués par leur dévouement à l’information au service du public et on pos à les jalons pour une presse plus libre.

Avec l’avènement de la démocratisation dans les années 1990, la libéralisation des médias a permis l’expression d’un plus grand nombre de voix représentant la diversité naturelle des opinions de vos citoyens. Dans les pays où la presse libre a pu s’épanouir dans son rôle de contre-pouvoir, on note plus de stabilité politique et de transparence dans les affaires publiques.

Cependant, de nombreux gouvernements réagissent encore à l’examen de leur gestion par la presse avec l’emprisonnement et l’intimidation des journalistes, la pénalisation de tout traitement indépendant des sujets sensibles à travers des lois répressives, ainsi que la censure politique.

Certains gouvernements ont cherché à tort à justifier la répression en invoquant l’exemple de Radio Milles Collines. Pourtant, cette station rwandaise tristement célèbre pour son rôle dans le génocide de 1994, n’était pas un média indépendant mais plutôt un organe de presse contrôlé par le gouvernement rwandais de l’époque.

D’autres gouvernements ont également cité le manque de professionnalisme des médias d’information pour justifier leurs mesures restrictives. S’il est vrai que les médias privés font face au défi d’inculquer le professionnalisme à leur personnel avec de maigres ressources à leur disposition, la plupart des organes de presse ont démontré un degré de responsabilité qui dépasse celle de beaucoup d’autres institutions.

Nous, soussignés, sollicitent ainsi votre leadership pour:

– Dépénaliser la diffamation. Les tribunaux civils se sont révélés être suffisamment aptes à tenir la presse responsable de ses actes tout en préservant la liberté de presse et la liberté d’expression.

– Combattre l’impunité pour toutes les personnes, y compris les responsables de gouvernement, la police et les forces de sécurité, impliquées dans des crimes et des abus contre les journalistes. Cette impunité porte atteinte à la règle de droit et à la confiance du public à l’égard de vos gouvernements.— Rompre avec la mainmise des États sur les agences de régulation des médias, qui ont été utilisées à maintes reprises pour bâillonner des voix diverses et indépendantes.

– Veiller à ce que l’attribution de licences aux médias audiovisuels se fasse de manière équitable, concurrentiel et apolitique.

– Reconnaitre et appliquer la Déclaration de principes sur la liberté d’expression en Afrique qui a été adoptée par la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples en 2002.

– Adopter et appliquer les lois garantissant l’accès a l’information en vertu des principes de la Déclaration, qui stipule que « les organes publics gardent l’information non pas pour eux, mais en tant que gardiens du bien public ».

En tant que dirigeants de pays qui sont signataires de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, nous vous demandons donc de vous inspirer de ce tournant historique comme une opportunité pour renouveler votre adhésion aux droits fondamentaux consacrés par ces conventions internationales et vos constitutions nationales et de renforcer vos efforts pour concrétiser vos obligations en vertu de ces traités.

Vous devez vous rendre à Paris pour une réunion extraordinaire des dirigeants des pays francophone d’Afrique. Cette réunion est une opportunité pour tenir des discussions multilatérales sur le bilan postcolonial et les défis auxquels vos pays sont confrontés.

Votre engagement renouvelé en faveur d’une presse libre et indépendante doit être une priorité dans vos discussions. C’est un objectif essentiel et réalisable ainsi qu’un préalable pour faire face aux nombreux autres problèmes auxquels le continent est confronté.

Une presse indépendante, qui se manifeste parfois par sa relation contradictoire avec les gouvernements, est un partenaire essentiel qui veille sur l’atteinte de votre objectif de bâtir une Afrique démocratique, prospère et libre.

Veuillez agréer, Excellences, l’expression de nos sentiments distingués ».

Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), à l’origine de cet appel aux chefs d’Etats d’Afrique francophone, est une organisation indépendante, à but non lucratif basée à New York et dévouée à défendre la liberté de la presse dans le monde depuis 1981.

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