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La justice française va enquêter sur le patrimoine de trois chefs d’Etats africains (Ali Bongo, Sassou Nguesso, Obiang Nguema)

La cour de cassation a autorisé ce mardi après-midi la reprise de poursuites judiciaires sur le patrimoine immobilier significatif dont disposent en France les présidents du Gabon, du Congo-Brazzaville et de la Guinée Équatoriale.
Voilà une décision dont l’Elysée se serait bien passé. La Cour de cassation a autorisé mardi après-midi la reprise de poursuites judiciaires concernant l’important patrimoine immobilier accumulé en France par trois chefs d’Etats africains. Les personnalités visées sont le président gabonais Ali Bongo, le président congolais Denis Sassou Nguesso et le président de la Guinée Equatoriale Téodoro Obiang Nguema ainsi que leurs familles.
Sherpa (www.asso-sherpa.org/) et Transparency International (www.transparence-france.org/) les deux associations à l’origine de la plainte, ont salué cette décision. « La décision de la Cour de cassation va ainsi permettre la désignation d’un juge d’instruction et l’ouverture d’une information judiciaire. Il appartiendra à ce dernier de déterminer dans quelles conditions le patrimoine visé a été acquis et celles dans lesquelles les très nombreux comptes bancaires identifiés par les services de police ont été alimentés ».
« Cette information devrait aussi permettre de faire toute la lumière sur le rôle joué par les divers intermédiaires qui auraient pu faciliter la réalisation des opérations litigieuses. On pense notamment aux établissements bancaires identifiés dans l’enquête préliminaire et dont on peut questionner le respect de leurs obligations au titre des dispositions anti-blanchiment », poursuivent Sherpa et Transparency International.
La plus haute juridiction française a annulé un arrêt de la cour d’appel de Paris de 2009 qui déclarait irrecevable la plainte de l’organisation Transparency International. La Cour ordonne le renvoi du dossier à un juge d’instruction pour que soit instruite la plainte de l’ONG pour « recel de détournement de fonds publics ». Une enquête préliminaire suite au dépôt d’une première plainte avait mis à jour le patrimoine spectaculaire des familles Bongo et Sassou en France.
L’enquête avait notamment recensé 39 propriétés, dont un hôtel particulier rue de la Baume (16éme arrondissement) acquis quelques semaines après le dépôt de la plainte pour plus de 18 millions d’euros, appartenant à la famille Bongo. L’enquête avait également mis à jour l’existence de 70 comptes bancaires détenus par la famille Bongo et ses proches.
S’agissant la famille du président congolais Denis Sassou Nguesso, l’enquête avait révélé l’existence de 24 propriétés et 112 comptes bancaires. Elle avait enfin mis à jour le goût immodéré pour les voitures de luxe du fils du président de la Guinée Equatoriale. Il a acquis pas moins de trois Bugatti Veyron. Ce modèle, le plus rapide du monde, coûte 1 million d’euros. Le salaire officiel de Téodoro Obiang Nguema, le fils du président de la Guinée Equatoriale est de 50.000 dollars par an (environ 35 900 euros).
Malgré l’étendue du patrimoine immobilier mis à jour par l’enquête préliminaire, le parquet avait préféré classer l’affaire sans suite pour « infraction insuffisamment caractérisée ». L’enquête avait provoqué une grave crise diplomatique entre Paris et son ancien pré-carré africain. Libreville et Brazzaville avaient vu d’un très mauvais œil l’étalage au grand jour de ce patrimoine immobilier.
Les organisations non gouvernementales à l’origine de la première plainte avaient déposé une nouvelle plainte avec constitution de partie civile. Elle avait été jugée recevable par la doyenne des juges d’instruction. Mais le parquet – autrement dit le ministère de la justice – avait fait appel de la décision. Le ministère des affaires étrangères avait indiqué qu’il irait jusqu’en cassation s’il le faut.
« Cette décision constitue une avancée juridique considérable qui va au-delà de l’affaire des Biens Mal Acquis, soulignent Sherpa et Transparency International. Pour la première fois en France, l’action en justice d’une association de lutte contre la corruption au nom des intérêts qu’elle s’est donné pour objet de défendre, est jugée recevable. Cette décision, conforme à toute l’évolution du droit positif quant à l’action collective des associations, devrait ainsi permettre à l’avenir de surmonter l’inertie du parquet dans certaines affaires politicofinancières sensibles ».
L’affaire pourrait également avoir des conséquences pour les entreprises françaises. L’entourage du président congolais a déjà menacé de remettre en cause certains contrats attribués à des entreprises françaises si Paris ne mettait pas un terme à l’enquête.

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