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Politique / La biométrie en question au Gabon

Alors que se profile le meeting, suivi d’une marche d’un panel de partis et regroupements partis de l’opposition gabonaise réclamant notamment l’introduction de la biométrie dans le processus électoral, samedi prochain au carrefour Rio à Libreville, les débats, tant au sein du landerneau politique que dans l’opinion, ne cessent de faire rage, quand à la plus-value réelle de cette technique de reconnaissance.

« OPTIMISER LE CONTROLE DU FICHIER ELECTORAL » ?

Tel que l’indiquent les experts, la biométrie est une technique de reconnaissance globale, visant à établir l’identité d’une personne en mesurant mathématiquement une de ses caractéristiques physiques.

S’il est admis, dans la communauté scientifique mondiale que certaines particularités physiques sont «plus fiables que d’autres », il n’en reste pas moins que, dans le contexte de cette méthode, toutes caractéristiques doivent être « infalsifiables et uniques » pour pouvoir être représentatives d’un individu, et d’un seul.

Or, autre obstacle rencontré par les chercheurs, les caractéristiques physiques sont loin d’être « si parfaites et si précises que voulue ». Toute chose qui met en exergue, selon un pan des recherches en la matière, certaines limites.

Sur le plan électoral, il est à constater, tant en Afrique que dans le reste du monde, que des Etats – le dernier en date étant la Côte d’Ivoire – ont opté pour la dite méthode de reconnaissance, avec plus ou moins de succès. Ici, pour faire simple, elle consiste à « optimiser le contrôle du fichier électoral par la vérification de l’identité d’une personne », via la reconnaissance de certains caractères physiques voire comportementaux, enregistrés au préalable (voix, visage, et pour les plus usités, les empreintes digitales et les caractéristiques de l’iris).

Pour rappel, au Gabon, dans un environnement marqué par l’expansion de la biométrie au niveau des pays membres de l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (OACI), qui exige désormais des documents y relatifs (passeport) pour fouler leurs terres, l’ambassade des Etats-Unis à Libreville avait lancé, au premier début des années 2000, l’usage de cette technique pour la délivrance de ses visas.

« VOLTE FACE »

L’histoire retient qu’en 2007, sous le gouvernement Jean Eyéghé Ndong, et la « pression » de l’opposition, le ministre de l’Intérieur, André Mba Obame (tous deux désormais dans les rangs de l’opposition) après moult supputations, lenteurs et pesanteurs, avait envisagé, en vain, d’avoir recours à ce système pour les élections locales, alors annoncées pour le mois de décembre.

A l’époque en effet, du côté du ministère de l’Intérieur, l’on estimait que la mise en place de cette méthode ne serait possible qu’avec la possession de moyens financiers et d’autres dispositions.

Pourtant, trois ans plus tard, force est de constater que les propos de l’ancien hiérarque du Parti Démocratique Gabonais (PDG, au pouvoir), candidat indépendant et malheureux à la présidentielle de 2009, devenu entre-temps l’un des secrétaires généraux de l’Union Nationale (UN, opposition), ont quelque peu changé. De nouveaux éléments d’analyse seraient-ils apparus en l’espace de 36 mois, qui auront été marqués par une modification patente du paysage politique gabonais ?

Dans la foulée de l’ordonnance du 21 août 2007 abrogeant les anciens articles (16, 37, 48 57,124 et 127) de la loi portant dispositions communes à toutes les élections politiques du 12 mars 1996, l’ancien ministre de l’Intérieur était passé à la tribune de la Représentation nationale.

L’Assemblée nationale a adopté le texte du gouvernement mais y en a « retiré les dispositions relatives à la biométrie », expliquait M. Mba Obame, qui estimait que la majorité et l’opposition avaient convenu d’introduire la biométrie « à condition d’adopter auparavant une loi sur l’informatique et les libertés, et de respecter les délais légaux pour l’organisation des élections ». Or « Comme la loi informatique et libertés n’a pas été adoptée, nous ne pouvons pas introduire la biométrie pour l’instant », avait-il estimé.

Trois ans plus tard, eu égard aux récurrentes « gesticulations » d’un pan de l’opposition gabonaise, réclamant à tue-tête un changement de donne dans le processus électoral, que seul permettrait l’introduction de la biométrie, une question se pose. Les moyens de sa mise en place, sont-ils plus consistants actuellement qu’ils ne l’étaient il y a quelques années ?

« FIABILISER LE FICHIER D’ETAT CIVIL »

Ainsi, du côté des spécialistes, l’on se veut prudent. « Avec le système biométrique, une fois que l’on a pris les empreintes, qui permettent d’indexer, on ne pourra pas s’authentifier ou se faire enregistrer deux fois. (…) En période électorale, cela peut limiter la fraude », concède un expert gabonais.

Toutefois, poursuit-il, « la biométrie s’arrête à l’établissement des cartes. Dans les bureaux de vote, on ne contrôle pas. Tout ce qu’on regarde ce sont les éléments biométriques », commente-t-il.

Les infrastructures informatiques, notamment à l’intérieur du pays, où du reste la desserte en énergie est souvent moindre que dans la capitale constitue, toujours selon les experts, autant de difficultés à l’opérationnalité de cette méthode, sur le territoire national.

Du côté du gouvernement, le ministre de l’Intérieur Jean-François, ne s’est pourtant pas opposé à sa mise en place. Le 11 novembre dernier, à la faveur d’une interview dans le quotidien l’Union, M. Ndongou s’exprimait en ces termes: « Pour le moment, songeons d’abord à fiabiliser notre fichier d’état civil en faisant en sorte que tous les points de délivrance des actes de naissance soient sécurisés. Pour que nous ayons à la fois un fichier physique et un fichier numérique propre dont les données recueillies seront stockés soit dans un ordinateur, soit dans un logiciel », déclarait-il avant de réaffirmer que « les agents du ministère sont à pied d’œuvre pour savoir ce qu’il faut pour une liste sur la base des données biométriques ».

En juillet dernier, le secrétaire exécutif du PDG, Faustin Boukoubi, interrogé par Radio France Internationale (RFI) indiquait à son tour : « Pour nous, il y a que nous devons réviser les listes électorales et pour cela, le Parlement vient d’adopter la loi sur la biométrie ».

Néanmoins, ce vendredi, alors qu’un panel de partis et regroupements de l’opposition gabonaise se préparent à investir le carrefour Rio pour un meeting suivi d’une marche, pour réclamer entre autre l’effectivité de la biométrie dans le processus électoral, l’Union du Peuple Gabonais (UPG, opposition) dont le leader Pierre Mamboundou est le pionnier en la matière, a pourtant annoncé sa non-participation à la manifestation.

Une décision qui devrait faire s’interroger ceux qui possèdent « l’exclusivité de l’amour de la transparence à travers la biométrie», pour paraphraser M. Boukoubi.

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