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Gabon : Grand déballage et contradictions au procès Ntumpa Lebani

Le procès Ntumpa Lebani, général de la Garde républicaine accusé d’avoir projeté un coup d’Etat, en est à plus d’une semaine d’audience. Comme on pouvait s’y attendre, les auditions en vue de l’instruction de cette affaire qui font défiler à la barre des personnalités importantes, occasionnent autant de révélations que de surprises.
Le général Jean-Philippe Ntumpa Lebani, ex-dirigeant du Conseil national de sécurité du Gabon, accusé de complot a affirmé son innocence devant la Cour de Sûreté de l’État qui a ouvert son procès le 21 février dernier. Incarcéré depuis septembre 2009, Ntumpa Lebani, initialement accusé de «tentative d’atteinte à la sûreté de l’État» avec cinq co-prévenus, est jugé pour «complot» pendant la transition qui a suivi la mort du président Omar Bongo Ondimba en juin 2009.

Ce «complot», élaboré à l’insu de son bénéficiaire pressenti, aurait visé à placer Ali Bongo Ondimba au pouvoir. Les différentes auditions durant le procès sont le lieu de nombreuses révélations. On apprend notamment qu’Omar Bongo avait été empoisonné, transporté à l’Hôpital d’Instruction des Armées avant d’être évacué en Espagne ; que les sondages étaient en défaveurs d’Ali Bongo au moment de sa candidature ; que le pouvoir équato-guinéen a alimenté les caisses de nombreux leaders politiques gabonais durant la transition ayant suivi le décès d’Omar Bongo ; que des sommes d’argent étaient versés, hors solde, aux militaires en vue d’assurer «la fidélité» et «renforcer la cohésion» de l’armée durant les périodes électorales ou les moments de tension ; que Ntumpa Lebani a versé en liquide un total de 1,4 million de francs CFA aux lieutenants Akandas et Boukoumbi ainsi qu’au capitaine Oura Amegue ; que chaque soldat de l’armée avait reçu des primes d’environ 6 500 francs CFA à la mort d’Omar Bongo mais que ceux de la Garde républicaine (GR) avaient reçu 75 000 francs.

Aux dires du général Jean-Philippe Ntumpa Lebani, le président Omar Bongo avait choisi d’être remplacé à la tête de l’Etat par son fils Ali Bongo. Voyant que Rose Francine Rogombé, présidente de la République par intérim, pouvait fausser cette volonté et que les sondages commandés par le pouvoir n’étaient pas en faveur d’Ali Bongo, le général avait envisagé un scénario «à la togolaise» mais, ayant tout le mal du monde à rencontrer Ali Bongo, il en serait resté au stade de l’idée.

Ce procès pourrait n’être alors qu’un règlement de comptes du fait que par le passé, Ntumpa Lebani avait eu une aventure avec une maîtresse du commandant de la GR Thomas Andimi Oprah. Celui-ci avait brûlé tous les vêtements de sa maîtresse lorsqu’il avait découvert cette liaison et il se serait juré d’avoir un jour la peau de Ntumpa Lebani. La rumeur d’un coup d’Etat en préparation aurait donc été une occasion en or.

Le passage à la barre des témoins est parfois l’occasion de quelques esbroufes. A l’instar du commandant de la GR, Paul Richard Mvou, qui est arrivé avec une importante batterie d’avocats alors qu’il n’est qu’un «simple témoin dans cette affaire». Se réfugiant derrière son devoir de réserve militaire en assénant à chaque fois «je suis assermenté», il assuré n’avoir jamais entendu parler de coup d’Etat mais que le commandant Oligui Nguéma l’avait informé de ce qu’il figurait, lui, dans une liste d’officiers de la GR à abattre.

Pas du tout cocasse mais plutôt déplorable pour un militaire de haut rang, Brice Clotaire Oligui Nguéma, ancien aide camp d’Omar Bongo, qui a également affirmé n’avoir «aucun élément, aucune preuve d’un complot fomenté par le général Ntumpa Lebani», est tombé dans les pommes au moment où l’avocat de la défense, Me Bongo Mavoungou, lui a lu un passage de sa déposition suivi de quelques questions confondantes.

On ne manquera pas de signaler que le témoin principal de ce procès, le capitaine Pacôme Bongo Ondimba, au demeurant frère cadet du président Ali Bongo, a demandé à la présidente de l’audience de retirer l’expression «coup de force» qu’il juge maintenant inapproprié. Pacôme Bongo est pourtant à l’origine de ce procès pour avoir, en septembre 2009, rapporté au président de la République nouvellement élu les « révélations » du lieutenant Doguino. A la barre, il s’est plutôt montré compatissant avec les accusés et a soutenu ne pas croire que Ntumpa Lebani aurait voulu faire un coup d’Etat.

Un autre témoignage non moins important a été celui du sergent-chef Rodrigue Okounougou qui a été radié de la GR du fait d’être le frère de Ntumpa Lebani. Son témoignage a porté sur le caractère grotesque de son arrestation et de l’instruction militaire du dossier. Le jeune homme avait déjà fait un témoignage similaire au journal « Le Peuple » dans lequel il dénonçait des abus, notamment, la torture morale, les conditions de détention exécrables, les abus d’autorité des supérieurs de la GR. On a retenu qu’il avait été mis dans un cachot étroit, privé de lumière, ne pouvant ni se baigner ni se brosser la bouche. Il dormait à même le sol, devait se soulager et faire ses besoins dans un petit seau qui pouvait rester dans la cellule avec la matière fécale 3 à 4 jours sans être vidé.

Le général Grégoire Kouna, commandant en chef de la GR, dont le témoignage est très attendu, n’a pas fait le déplacement du palais de Justice. Son audition est la plus importante qui reste avec celle de Frédéric Bongo, le patron des services secrets gabonais.

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