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Gabon : Les tribulations de l’Union nationale après l’exil onusien

Trois professeurs ont été exclus de l’Université Omar Bongo pour avoir figuré dans le gouvernement parallèle de Mba Obame. Le processus de décrispation du climat politique gabonais amorcé par les émissaires de Ban Ki Moon, secrétaire général de l’ONU, va-t-il tourner en eau de boudin ? Certains le craignent, car la machine répressive n’a pas ralenti son fonctionnement envers les animateurs de l’Union nationale.

La vie ne sera certainement pas un long fleuve tranquille pour les membres du parti politique de Zacharie Myboto après que son secrétaire exécutif, André Mba Obame, se fut autoproclamé président élu du Gabon. Sortis de leur exil dans les locaux du PNUD-Gabon, les ministres du gouvernement formé par Mba Obame sont tour à tour convoqués par les forces de l’ordre pour être entendus.

Interrogatoire pour les anciens exilés du PNUD

Les 19 ministres du gouvernement parallèle et les autres membres de l’union nationale (UN, actuellement dissout) ayant séjourné au PNUD sont interpellés par groupe de six. Une demi-douzaine devra donc se rendre à la Direction générale de la recherche (DGR), le même nombre au B2 (2è Bureau, service de renseignement de l’armée gabonaise) et six autres à la Police Judiciaire (PJ). Tous devraient incessamment recevoir des convocations en ce sens. Dans la soirée du 3 mars, certains d’entre eux avaient formellement été convoqués : le Dr Radegonde Djeno, Marie Agnès Koumba, Raphaël Bandega Lendoye, Thierry Nang, Aymar Moapa Djiabouéni, Chantal Myboto Gondjout et son époux Paul-Marie Ndjambiempolo Gondjout. Selon les sources proches du dossier, Bruno Ben Moumbaba qui réside actuellement en France devrait être convoqué au B2.

Se justifiant par écrit, le Dr Radegonde Djeno a fait reporter sa convocation au 7 mars. De son côté, le Pr John Nambo s’est présenté le 3 mars à la DGR où il été interrogé de 10 h à 18 h 30. Joint au téléphone, il a laissé entendre que son interrogatoire a porté sur les récents événements politiques, notamment sa participation au gouvernement parallèle d’André Mba Obame.

Exclusion des enseignants de l’UOB

Par ailleurs, sur instruction du ministre de l’Enseignement supérieur, Séraphin Moundounga, trois enseignants qui étaient membres du gouvernement parallèle ont été suspendus de l’Université Omar Bongo. Il s’agit de Raphaël Bandega Lendoye, Premier ministre du gouvernement d’André Mba Obame, Roland Rodrigue Moutoumbi Ziengui, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Porte parole du même gouvernement et le Pr John Nambo, ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation. Ils ont reçu ce vendredi 4 mars une lettre du recteur sur laquelle on peut lire : «Suite à la décision prise à votre encontre par le gouvernement de la République, dans un communiqué en date du 25 janvier, je viens par la présente vous informer que vous êtes suspendus de toute activité pédagogique et recherche au sein de l’Université Omar Bongo jusqu’à nouvel ordre.»

Les concernés assurent qu’il s’agit là d’un acte en totale violation des lois en vigueur et de la franchise universitaire. « Avez-vous déjà vu quelqu’un être suspendu de ses fonctions sur la base d’un communiqué ?», s’est interrogé l’un d’entre eux.

Procès en appel pour les sympathisants émeutiers

Du côté des masses populaires proches de la formation politique dissoute, quinze personnes parmi les vingt-trois qui avaient été arrêtées au terme des différentes émeutes intervenues après la prestation de serment d’André Mba Obame, ont été présentées au Procureur de la République le 3 mars. Ces prévenus qui avaient obtenu la liberté provisoire le 2 février dernier et dont le procès a été reporté à plusieurs reprises, devront revenir à la barre à une date ultérieure. La défense a interjeté appel du fait des exceptions soulevées par la défense portant sur l’incompétence territoriale, pour l’un des dossiers, et l’irrecevabilité de constitution des parties civiles de l’Etat pour un autre dossier.

Joint au téléphone, Me Lubin Ntoutoume qui assure la défense des prévenus de l’UN, explique : «L’irrecevabilité de constitution des parties civiles de l’Etat peut s’expliquer par le fait que le général Léon Mistoul, directeur de cabinet du commandant en chef de la Police nationale, avait déposé la plaine pour destruction des biens de l’Etat, du fait qu’un véhicule de la police avait été cassé, et pour coups et blessures volontaires du fait qu’un policier avait été blessé. J’ai quand même demandé que cette constitution soit rejetée parce qu’il n’avait pas de mandat du patron de la police, pas de mandat pour déposer plainte au nom de l’Etat et pas de mandat de son collègue qui se plaignait de coups et blessures volontaires. L’incompétence territoriale porte sur la capacité du tribunal de Libreville à juger M. Paul Obiang Ndong, ancien directeur général des Mines, qui avait été arrêté à Mitzic dans le Woleu-Ntem, au moment où se sont produits les faits qui lui sont reprochés, puis transporté à Libreville. […] Ce sont des questions qui relèvent de l’ordre public judiciaire et on ne peut pas les contourner. Le tribunal a voulu juger l’affaire au fond. En y joignant toutes les exceptions nous avons fait appel.»

Vide juridique pour les élus

La Cour constitutionnelle a rendu publique la réponse à une requête introduite, le 28 janvier, par le Premier ministre concernant le sort des élus nationaux et locaux de l’UN. Il en ressort que les députés, sénateurs et autres élus de l’UN vont continuer à siéger à l’Assemblée nationale, au Sénat et dans les conseils municipaux et départementaux. La saisine du Premier ministre était fondée sur l’existence d’un vide juridique au sujet du mandat des élus dont le parti est dissout. La loi sur les partis politiques est en effet muette à ce sujet et toute la législation en vigueur aujourd’hui ne donne aucune précision sur les conséquences directes de la dissolution d’un parti politique ainsi que sur le mandat de ses différents élus. La haute juridiction emmenée par Marie Madeleine Mborantsuo a tranché pour le maintien des mandats, en attendant que des règles précises sur la question soient édictées.

« Rumeurs » diplomatiques

Certains diplomates au fait du «Dossier Union nationale» se montrent étonnés de la suite réservée par les autorités gabonaises à la négociation menée par les émissaires de Ban Ki Moon. Un fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères ayant requis l’anonymat a soutenu, il y a moins d’une semaine, que le président Ali Bongo avait promis, lors d’un huis clos sur le sujet avec Ban Ki Moon à New-York, la levée des sanctions qui pèsent sur l’UN (dissolution, privation des salaires et projet de levée de l’immunité parlementaire). Une source interne au PNUD-Gabon a également affirmé que la sortie d’exil du gouvernement Mba Obame n’est qu’une première étape du processus de décrispation du climat politique gabonais. Toutes choses qui expliqueraient l’annulation de la déclaration envisagée par les exilés le jour de leur sortie du PNUD. Des consignes fermes donées par les émissaires de Ban Ki Moon auraient provisoirement interdit toute déclaration aux membres de l’UN. Le processus de détente enclenché par les émissaires de Ban Ki Moon et les garanties données aux exilés n’étaient-ils qu’un leurre visant la libération des locaux du PNUD-Gabon ? Certains craignent une telle éventualité qui décrédibiliserait la médiation onusienne et crisperait un peu plus le climat politique déjà tendu.

Publié le 04-03-2011 Source : Gaboneco Auteur : Gaboneco

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