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Affaire DSK : Au Sofitel, la clé de l’énigme

DSK a rendez-vous lundi 6 avec le procureur. Dans sa résidence surveillée, il a une semaine pour décider s’il plaide coupable ou non. Notre envoyée spéciale loge au Sofitel, où le travail a repris… Comme avant. Enfin presque.

Vendredi matin. Boris supervise le petit déjeuner du Sofitel de Times Square. Le jeune Français, 24 ans, est arrivé à New York en septembre dernier après de longs mois passés dans un palace du nord de la Chine. La salle du Gaby, le restaurant dont la décoration évoque une brasserie parisienne, est encore déserte. Il raconte avec gourmandise et fraîcheur ses expériences, son goût pour son métier, sa colocation dans Brooklyn, la folie new-yorkaise… Puis soudain, il se ferme. Le sourire franc et juvénile tombe. Non, il ne parlera pas de l’affaire Strauss-Kahn, il n’a rien à dire! Ce jeune stagiaire du groupe est pourtant un acteur clé, bien involontaire, de la saga Strauss-Kahn. Depuis quinze jours, il est harcelé par les médias. Il a dû fermer son compte Facebook. Comme l’a révélé Le Point, c’est lui qui est à l’origine de l’information « twittée » en France quelques minutes seulement après l’arrestation de Dominique Strauss-Kahn. Certes, il a grandi à Neuilly, mais il n’a rien de l’agent sarkozyste infiltré dans l’hôtel pour faire tomber DSK décrit sur Internet. Ce stage à New York lui aura avant tout appris la… discrétion.

Le jeune homme vient de reprendre le travail après quelques jours de repos forcé. Mais il a eu peur de perdre son job. Depuis, la direction du groupe Accor, propriétaire de la chaîne hôtelière, a demandé à l’ensemble du personnel le silence total sur l’affaire. Un sujet très sensible pour le groupe. Cet établissement new-yorkais est l’un des plus importants de l’enseigne. À une centaine de mètres de la 5e Avenue, il est à quelques blocs seulement de Central Station et de Central Park. Ce n’est pas un palace, mais un hôtel cosy et chic, très prisé par la clientèle d’affaires française. Le prix des chambres classiques peut atteindre jusqu’à 1.200 dollars en période de forte influence, comme c’est le cas actuellement.

Un directeur dont le récit pèsera lourd

JorgeTito, le nouveau directeur de l’hôtel, veut faire oublier les images des allers-retours des agents la police scientifique américaine dans le hall de son hôtel. Ce Portugais, qui a dirigé un cinq étoiles en Algarve, a intégré le groupe Accor il y a six ans pour prendre les rennes du Sofitel de Buenos Aires, en Argentine. Il est un des personnages clés de l’affaire Strauss-Kahn. Droit comme un « i », le cheveu court, la posture un rien martiale, il passe ses journées à quelques mètres de la réception. « Je suis là depuis huit mois, raconte-t-il, je dois apprendre à connaître tous les clients ». C’est lui qui a décidé de surclasser le directeur du Fonds monétaire international (FMI), dans la suite présidentielle, pendant son court séjour à New York. Dans l’établissement, aucune décision ne se prend « sans que j’en sois informé », confirme-t-il avec un petit sourire.

Jorge Tito est avare de confidences. Mais on comprend vite que le samedi 14 mai, il a été confronté à l’un des choix les plus délicats de sa carrière. À devoir arbitrer entre le témoignage d’une jeune Guinéenne de 32 ans, occupant l’une des fonctions les moins qualifiées de l’entreprise, et un candidat à la présidence française. Aujourd’hui, la machine judiciaire est lancée. Sans transaction entre l’accusatrice et la défense, il devra témoigner dans l’affaire qui oppose Dominique Strauss-Kahn à une des femmes de chambre de l’hôtel. Si le procès a lieu, son récit pèsera lourd. Pour l’instant, le directeur de l’hôtel se contente de préciser qu’il connaît personnellement les 280 salariés de l’établissement. « Je connais même leur emploi du temps par cœur », se targue-t-il. « Notre employée travaille au Sofitel depuis trois ans et a toujours donné entière satisfaction tant par son travail que par son comportement », poursuit Jorge Tito, qui répète quasiment mot pour mot la phrase du communiqué de presse publié par la direction de la communication du groupe.

Pour le grand public, l’accusatrice de Dominique Strauss-Kahn reste une inconnue. Elle ne l’est pas pour le personnel de l’hôtel. Comme la plupart des salariés de l’hôtellerie new-yorkaise, elle est même syndiquée à l’union de sa corporation. Un statut qui, selon un avocat local, donne à son action un poids particulier. « Les syndicats sont très mobilisés sur ces affaires d’agression sexuelle, explique-t-il. Ici, on peut virer son salarié à n’importe quel moment sans explication ou presque sauf lorsqu’il y a une affaire de harcèlement sexuel ».

La suite 2806 est de nouveau libre
Aux étages, les femmes de chambre, toujours en robe malgré les rumeurs circulant sur le Net les décrivant en pantalon, sont d’une prudence à toute épreuve. Elles frappent à plusieurs reprises avent de pénétrer dans une chambre et referment brutalement en découvrant un occupant. Ce sont des Asiatiques pour la plupart ou des Latinos-Américaines qui ne savent dire que bonjour en français et dont l’anglais est très limité. « Ce sont nos règles habituelles, explique le directeur, elles ont juste été rappelées ». La désormais célèbre suite 2806 est de nouveau libre à la location. « Nous avons dû la remettre en service très rapidement car une délégation de Taipei l’avait réservée depuis longtemps, raconte un cadre du Sofitel, mais il y avait pas mal de travaux à faire, notamment changer la moquette. La police a en effet de nombreux relevés d’empreintes et de traces ADN dans le salon, la chambre et la salle de bains ».

Les informations parues dans la presse, selon lesquelles une autre jeune femme, une réceptionniste, aurait reçu une « proposition inappropriée » de la part de Dominique Strauss-Kahn ne sont pas commentées dans l’établissement. Pas plus que celles de la mystérieuse prostituée qui aurait visité la suite de DSK dans la nuit précédent le viol présumé. « Nous avons été poursuivis par des journalistes jusque chez nous, raconte un des salariés du Gaby, ils nous ont offert de l’argent contre un récit des faits. Personnellement je ne connaissais pas cette femme de chambre, je l’avais déjà vue mais c’est tout. On se connaît surtout quand on fait le même métier. Je sais juste que plusieurs salariés ont été entendus par la police. Pas tout le monde ». Au bar, un Américain de la côte ouest, regarde avec attention le match de base-ball. Pendant la publicité, il écoute le commentaire du serveur et s’exclame dans un français très approximatif. « Ah, ces Français! » Une discussion de bar d’hôtel. Comme un autre.

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