spot_imgspot_img

Les vicissitudes de «Pluriel» expliquées par Chamberland Moukouama

De gauche à droite, Gabin Atiga, Chamberland Moukouama et Dieu Donné Koumba de l'émission "Pluriel"
Animée par Chamberland Moukouama, Dieu Donné Koumba et Gabin Atiga, la très controversée émission de télévision «Pluriel» n’a pas été diffusée le week-end dernier. Cet espace de satire sociale et politique a, de plus, été pris à partie par les tabloïds satiriques locaux. Entre intrigues politiques et conflit de personnalités à la RTG1, Chamberland Moukouama, figure de proue du trio-vedette, s’explique. L’impertinence au singulier.

Quelle explication pouvez-vous donner sur le fait que votre mission, Pluriel, n’a pas été diffusée, comme de tradition, durant le dernier week-end ?

Il n’y a aucune explication. Pour la simple raison que la décision de ne pas diffuser l’émission a été instrumentalisée par ceux que j’appellerais «la pléiade de l’isolement». Cette pléiade qui voudrait isoler le prince, vous comprenez ce que je veux dire… Samedi dernier nous devions recevoir MM. Etienne Massard Kabinda et Jean François Tardin, principaux responsables de l’Agence nationale des bourses et stages du Gabon pour dialoguer en direct avec les étudiants gabonais d’ici, invités sur le plateau, et ceux de l’étranger. Mais, Pluriel a plutôt été sanctionné à cause de l’émission du 27 mai dernier.

Que s’y est-il passé ? Nous avons, entre autres sujets, analysé, critiqué le discours du président de la République à l’adresse de l’administration gabonaise au début du mois de mai. Nous avons, comme à notre habitude, fait nos analyses à ce sujet. Et, il y a eu, comme toujours, les réactions des téléspectateurs. Nos détracteurs soutiennent qu’il y a eu des injures. Ils parlent d’atteinte à la personne du président et aux membres du gouvernement. Je soutien qu’il n’y a rien eu de cela. Si c’est le cas, j’aurais voulu que les journaux La Griffe, Le scribouillard et Le Gri-Gri qui ont demandé nos têtes, retranscrivent au moins les passages de l’émission à travers lesquels un ou des téléspectateur(s) ont porté atteinte au président de la République ou au gouvernement. Or, ils ont versé dans des affirmations gratuites en soutenant que Gabin Atiga, Chamberland Moukouama, Dieu Donné Koumba sabotent l’action du président Ali Bongo Ondimba.

Vos tribulations, depuis votre passage de la RTG2 à la RTG1, ne datent pourtant pas de cette émission du 27 mai…

Il faut dire, d’autre part, que le directeur général de la RTG chaine 1 ne partage pas l’idée selon laquelle l’émission interactive Pluriel est un programme qui passe bien auprès du public. Sinon, il mettrait toutes les commodités pour la réussite de la réalisation de cette émission. Je vous donne un scoop : le téléphone utilisé sur le plateau est la propriété privée de l’un des animateurs de l’émission. Il ramène cet outil chaque week-end de son domicile. Ce n’est pas un téléphone programmé filtrer tel ou tel téléspectateur ou pour faire des mises en scène avec les appels que nous recevons.

On en conviendra, le direct a ses effets pervers : on ne peut pas prévenir les propos d’un téléspectateur. Le communiqué de l’instance de régulation met en demeure Gabon Télévision pour ce que nous avons été légers dans le traitement du contenu de l’émission. Le DG de la RTG1 est là placé devant ses responsabilités. Normalement, si M. David Ella Mintsa n’était dans la posture de celui qui nous cherche des poux sur la tête, il nous aurait convoqués, même s’il affirme qu’il nous a mis en garde plusieurs fois, je suis d’accord. Mais, il s’est toujours agi de nous convoquer pour nous tancer et nous faire l’apologie de ce qu’il est un journaliste formé. Nous ne sommes pourtant jamais targués d’être des journalistes et pour ce qui est du cas Moukouama, je ne le serais jamais ; j’ai choisi de faire de l’animation en m’inspirant de Richard Moubouyi qui m’a fortement influencé. Je ne suis pas dans la confusion des genres pouvant me pousser à dire que je suis journaliste. Donc si le DG de la RTG1 était honnête avec lui-même, il aurait pu nous proposer, par exemple, de suspendre le téléphone durant l’émission ou nous proposer les thèmes pouvant être abordés à l’antenne avec les téléspectateurs pour une diffusion en différé après filtrage. Mais, il joue avec la sémantique, parle de suspension et de placer à l’endroit de Pluriel dans la grille des programmes, une autre émission, «La matinale du week-end» qui sera vraisemblablement Pluriel Bis. Là quand même, et je voudrais que vous l’écriviez, c’est le degré zéro de l’intelligence. Ce que je ne confonds pas avec l’instruction ou la détention de diplômes. Je fais une différence entre être intelligent et être diplômé.

La presse locale vous a également taillé en pièce en vous attribuant notamment une conjuration avec Mme Gondjout. De quoi retourne-t-il ?

On a associé à Pluriel le nom du secrétaire général de la présidence de la République. Mais qu’est-ce Mme Gondjout a à voir dans l’émission Pluriel ? Celle-ci a été créée à la RTG chaine 2 alors que M. René Ndemezo’o Obiang était ministre de la Communication. Il y a eu ensuite M. Assélé puis Mme Gondjout. Voulant que Pluriel ait une meilleure ouverture et qu’elle soit suivie à travers tout le pays, Mme Gondjout a décidé de délocaliser Pluriel sur la RTG1, les trois présentateurs de l’émission étant somme toute des fonctionnaires. La RTG1 étant visible à partir des bouquets satellitaires, le pays avait tout à gagner en montrant sur l’international, qu’il y a au Gabon, sur une chaine publique, une émission qui peut titiller ou critiquer le gouvernement. Ce qui est quand même révélateur du progrès démocratique du Gabon. Mais notre arrivée à la chaine 1 a été mal perçue. Je ne sais pas si c’était du fait de notre talent, de notre malformation ou de notre ignorance, mais notre arrivée dérangeait. Et nous avons enregistré, avec le même directeur général, deux ou trois tentatives de débusquage de notre émission de la grille des programmes.

Le scribouillard, Le Nganga et La Griffe, trois titres à la charge d’une personne très proche du président de la République, se sont lancés dans cette cabale contre nous. Il faut quand même dire que la personne qui finance ces journaux ne fait pas l’unanimité et d’ailleurs, dans l’histoire du Gabon moderne, on n’a jamais enregistré une telle controverse autour d’un si proche collaborateur, au niveau décisionnel, du chef de l’Etat. Je comprends sans doute pourquoi Le scribouillard nous traite d’opposants, écrit que nous favorisons le débat ethnique au Gabon et va jusqu’à livrer à la vindicte populaire, salir et saper l’image de Mme la secrétaire générale de la présidence de la République.

N’avez-vous pas reçu l’appel, en direct sur l’antenne, du bloggeur et opposant Petit-Lambert Ovono ?

Petit-Lambert Ovono peut intervenir comme des milliers d’autres Gabonais qui le font sur l’émission. Ce dont je me souviens, c’est que ce monsieur n’est pas intervenu le 27 mai, mais bien avant. Il a dit ce qu’il a l’habitude de dire sur les réseaux sociaux de l’Internet. A mon avis, c’est le Gabon qui ne pouvait qu’en sortir grandi en termes de perception de la liberté d’expression et de la démocratie. Je sais que le président a, à côté de lui, des personnes qui comprennent bien qu’il faut montrer que la démocratie est réelle au Gabon. De plus, ce n’était pas à nous de le rejeter, en direct, pour prouver qu’au Gabon les opposants n’ont pas droit à la parole sur une télévision de service public. Et je n’avais d’ailleurs pas manqué de rappeler à M. Ovono que contrairement à ses affirmations, il devait constater, avec son intervention, que le Gabon n’est pas un pays fermé, que lui, opposant, s’exprimait librement sur une chaine publique sans qu’il ne soit censuré. Ce qui contredisait tout ce qu’il écrit sur Internet au sujet de la liberté d’expression au Gabon. Qui donc gagne en termes d’image de démocrate, Petit-Lambert Ovono ou le pays et ses gouvernants ?

Pour le critique social, l’observateur de la vie du Gabon que vous êtes, ce brouillamini médiatique ne traduit-il pas une guerre larvée au palais entre le directeur de cabinet du président de la République et le secrétaire général de la présidence ?

Ce que je peux dire, et sans passion aucune, c’est qu’il y a une stratégie d’isolement du prince. C’est la lecture que j’en fais au premier degré. Mais j’aimerais rappeler qu’en Afrique on dit, si vous êtes nu dans une baignade en rivière et qu’un fou vient à s’enfuir après avoir volé vos vêtements laissés sur la rive, il ne faut pas partir à sa poursuite. Faute de quoi, on vous prendra tous les deux pour des fous. Ceci pour dire que si des journaux en viennent à critiquer tel ou tel proche collaborateur du chef de l’Etat, ce collaborateur gagnerait à ne pas répliquer, à ne pas s’embarquer dans un ping-pong médiatique en manipulant la presse. C’est l’un des enseignements qu’il faut retenir du défunt président Omar Bongo. Il y a des gens qui vendent du vent au président Ali Bongo. Ils créent ou financent des journaux pour entretenir ce que j’appelle la stratégie du conflit permanent. J’ai proposé amicalement à messieurs Moulakou du Scribouillard et Ntoutoume Nkoghé de La Griffe qu’on puisse s’expliquer autour d’un café-presse. Ce que pourrait d’ailleurs créer M. Ella Mintsa, à l’image de ce qui se fait ailleurs. Mais, je ne comprends pas ce que veulent ces messieurs.

En définitive, votre émission est provisoirement suspendue ou définitivement arrêtée ?

On nous a dit «suspension provisoire» mais pendant ce temps, on met en place ce qu’ils appellent «La matinale du week-end», qui sera plus sérieuse, avec des analyses, disent-ils, et des commentaires qui respecteraient l’esprit du débat. Cela veut dire ce que ca veut dire : M. Ella Mintsa ne veut plus des têtes de Pluriel. Ça, on l’avait compris depuis. Mais en fait, il ne nous fait pas de mal. Vous ne pouvez pas arrêter ou contenir un flux d’eau avec la main. De même, on ne peut pas contenir la lumière de quelqu’un. M. Ella Mintsa ne pourra pas m’empêcher d’être l’animateur de télévision que je me veux, encore moins m’empêcher de créer ou de réfléchir.

Alors, quel avenir pour le trio ?

Nous sommes là et nous n’en sommes même pas à un tiers de ce qu’on aimerait faire. La télévision gabonaise a un avenir. Gabon Télévision va se mettre en place tel que pensé par les autorités qui gèrent la politique du Gabon en matière de communication. Mais, l’enseignement qu’il faudrait tirer ici, c’est qu’on a besoin, à la tête de nos structures audiovisuelles publiques, de vrais managers, de vrais faiseurs de rêves. Pour le moment ce n’est pas possible. Et ce n’est pas le DG de la RTG1 qui va tuer Pluriel, même s’ils font «Pluriel Bis», ce ne sera jamais comme Pluriel. Et puis, j’aimerais revenir à mes premières amours : les livres. Mais, j’insiste auprès des confrères : À quand un café-presse au Gabon ? On en a un peu marre d’entendre «je suis un super journaliste, je sors d’une école». Dans un café-presse, on pourrait, par exemple, inviter La Griffe, Le scribouillard, Dialogue, Le Nganga, Gabon Matin ou L’union pour débattre des faits d’actualité nationale ou internationale. Ce serait une sacrée mise à nue de l’incompétence et cela rabattrait le caquet à bien de supers journalistes.

Exprimez-vous!

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

spot_imgspot_img

Articles apparentés

spot_imgspot_img

Suivez-nous!

1,877FansJ'aime
133SuiveursSuivre
558AbonnésS'abonner

RÉCENTS ARTICLES