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Université d’Oregon : un programme de financement de la recherche au Gabon

Alors que les spéculations et autres accusations vont bon train au Gabon, Gabonreview a interrogé l’ambassadeur des États-Unis sur le contrat qui lie le Gabon à l’université d’Oregon et sur le détail des fonds versés par le Gabon afin ce comprendre un peu mieux de quoi il s’agit.

Le campus de l’université d’Oregon © UO

«La première fois qu’on a discuté de cette convention, c’était durant la visite du président Ali Bongo Ondimba à la Maison Blanche en 2011. C’est lors de cette visite que fut signé un premier document provisoire» explique Eric D. Benjaminson, ambassadeur des États-Unis au Gabon. «L’idée de ce projet a été soumise par l’université elle-même. Je venais d’être nommé comme ambassadeur au Gabon et l’université m’a contacté en tant que membre de l’association des anciens élèves. Elle m’a contacté pour me soumettre une proposition fondée sur un programme d’investissement qui a très bien fonctionné à une époque avec le Sénégal.»

Monsieur Benjaminson explique ensuite que ce programme a été élaboré par un enseignant de l’université d’Oregon qui a habité et enseigné 15 ans durant au Sénégal, un anthropologue réputé en Afrique de l’Ouest. «Il y a eu des problèmes politiques au Sénégal et l’université a dû suspendre ce programme de recherche. Elle cherchait donc un autre pays francophone susceptible d’accueillir ce projet de recherche. (…) Alors que ma nomination était déjà officielle mais que j’étais encore aux États-Unis à préparer mon arrivée, l’université m’a contacté pour me demander si le Gabon serait intéressé. Je suis arrivé au Gabon et comme le cabinet de la présidence venait de changer, c’est avec le ministère de l’Enseignement supérieur que j’ai pris langue pour soumettre ce projet qui les a intéressé. Ensuite, les négociations se sont déroulées directement entre le ministère de l’Enseignement supérieur et l’université d’Oregon. Ne s’agissant pas d’un contrat entre le gouvernement des États-Unis et celui du Gabon mais entre une université privée et un ministère, je n’avais plus à intervenir. Je n’ai joué qu’un rôle de facilitateur.»

Un projet de partenariat pour la recherche au Gabon

Le contrat signé entre le Gabon et l’université d’Oregon est un projet de recherche scientifique destiné à développer les compétences des doctorants gabonais dans les secteurs de l’environnement, de la protection de la flore et de la faune, des émissions de carbone, du secteur forestier et du secteur minier. Pour toutes ces activités, il est prévu un partenariat entre un professeur américain et un professeur gabonais à Libreville et non pas à l’université d’Oregon. Les enseignants américains iront chercher dans l’université américaine des candidats pour un doctorat qui viendront effectuer des recherches avec des partenaires gabonais, des élèves de l’enseignement supérieur ou des candidats gabonais pour un doctorat qui travailleront en équipe. Les élèves gabonais vont effectuer leurs recherches au Gabon puis iront à l’université d’Oregon finir leurs études, plus particulièrement les doctorats qui n’existent pas à l’université Omar-Bongo de Libreville. Tous les frais des enseignants américains (frais de transport et salaires) seront payés par l’université d’Oregonn. L’établissement du centre, son fonctionnement, les frais scolaires des élèves gabonais et la construction d’un petit bâtiment à Libreville seront financés par les bénéfices de l’investissement gabonais qui fait tant parler de lui, les fameux 15 millions de dollars.

Cet argent n’est pas un don. Il constitue le capital d’un Fonds d’investissement pour soutenir le partenariat Oregon-Gabon. Il se limite aux fonctions liées au centre, ce qui veut dire qu’il ne peut pas soutenir les autres efforts de l’université dans d’autres pays ou bien les activités gabonaises qui ne sont pas liées au centre à Libreville. Selon les experts de l’université d’Oregon, ce bénéfice qui dépend des marchés financiers devrait se situer entre 3,5 et 6 % du capital investi par an. Sur un investissement de 15 millions de dollars on peut espérer entre 4 et 4,5 millions de dollars (2 à 2,5 milliards de francs CFA) de rentrées par an. C’est cet argent qui doit payer les frais de création et de fonctionnement du centre de Libreville, le coût des élèves et le coût des professeurs quand ils viennent au Gabon. L’investissement gabonais, le capital, reste la propriété du Gabon. Ce n’est pas un don à l’université.

«Il faut souligner que les opérations et le financement pour l’université d’Oregon ne changent pas. Sauf qu’il y aura des élèves gabonais qui assisteront aux cours. Il n’y aura pas de financements pour les bâtiments ou quoi que ce soit en Oregon. Tous les financements et le capital appartiennent au Gabon. Il y aura des échanges entre les chercheurs et les élèves mais la concentration des efforts se situera au Gabon, avec, en plus, la participation des Gabonais dans la recherche à l’université d’Oregon pour former le capital humain gabonais. Ce n’est pas comme si on construisait un nouveau bâtiment du département d’histoire à l’université d’Oregon avec l’investissement du Gabon. Toutes les recettes de l’investissement du Gabon seront dépensées au Gabon ou avec les professeurs qui viennent au Gabon» précise Eric D. Benjaminson.

Pourquoi un Fond d’investissement ?

L’ambassadeur Eric D. Benjaminson explique : «Nous subissons une grave crise budgétaire aux États-Unis, et les dépenses mondiales de fonds pour la collaboration avec les pays les plus pauvres sont très limitées. Vous savez qu’il y a des universités qui ne sont pas contrôlés par le gouvernement central. Les universités aux États-Unis, les universités publiques sont contrôlées par leurs États. Je suis diplomate pour le pays entier, je n’ai aucun contrôle sur les dépenses des États qui sont acteurs indépendants de notre politique. Pour attirer divers investisseurs des États-Unis, il faut participer, les motiver. C’est vrai qu’on pourrait chercher les financements ailleurs, mais en même temps, je vous souligne que de notre point de vue, le Gabon est un pays assez riche si on compte les recettes du pétrole et des activités minières. C’était une décision de votre gouvernement de faire mettre ne place un investissement ouvert pour attirer une grande université américaine qui avait déjà une expérience en Afrique francophone sur la question du développement durable. Il ne s’agit pas pour moi de critiquer ou soutenir la décision de votre gouvernement. Pour moi c’est une bonne chose dans le sens que ça lui permet d’attirer les acteurs qui sont bien placés pour aider le Gabon dans la quête de financement.»

«J’aimerais ajouter en plus qu’une de mes tâches, c’est justement d’attirer les contributions financières de grandes sociétés américaines ou étrangères qui sont bien implantées au Gabon. J’ai parlé avec Bechtel, pas avec l’ANGT (Ndlr : Agence nationale des grands travaux) qui est un organisme gouvernemental, avec un pétrolier américain au Gabon ainsi que d’autres grandes sociétés qui sont en train de négocier leur arrivée ici. Elles sont toutes intéressées pour soutenir financièrement ce partenariat Gabon-Oregon parce que cela les aidera à trouver des Gabonais qui ont le talent et l’expérience dans le cadre de leurs activités. Il y aura donc des investissements financiers supplémentaires du secteur privé américain»

Pour le gouvernement américain, que représente l’ambassadeur des États-Unis, le Gabon ne fait pas parti des pays pouvant prétendre à une assistance financière du fait de son revenu par habitant très supérieur aux critères établis par la Banque mondiale. C’est donc en passant par des investissements privé qu’il doit financer ses projets.

Quel a été le rôle joué par Eric D. Benjaminson dans l’établissement de ce partenariat ?

«Dans les blogs, j’ai noté un soupçon d’un complot entre moi et l’université d’Oregon, parce que j’y ai été élève. Ça m’amuse, j’y ai été élève il y a 35 ans. Je n’ai jamais travaillé pour cette université. J’y ait bien été enseignant sans paiement. Je faisais mon Master à cette époque et pour le financer, j’avais la possibilité de réduire mes frais d’inscription en donnant un cours à l’université à mi-temps. J’ai donc enseigné pour un seul cours d’histoire mondiale en 1980 et j’ai terminé en 1981. J’avais 20 ans à cette époque. Je n’étais pas un expert. Je n’étais qu’un élève de première classe de l’éducation supérieure, un élève normal, qui payait ses frais scolaires pour être élève. Ensuite, je suis resté en contact avec le département d’études africaines parce que je suis spécialiste de l’Afrique. C’était des relations d’amitié, et maintenant, je suis diplomate dans le corps diplomatique américain. Je suis diplomate en permanence, je n’ai aucun financement, je ne reçois pas d’honoraires. Ce n’est pas permis par nos lois. Je ne veux pas mettre en danger ma carrière pour recevoir quelques centaines de dollars. Ce qui est central, c’est que je connais l’université, je connais les capacités de ses enseignants. L’université m’a approché à cause de nos relations dans le passé. C’est plutôt un bon deal pour le Gabon je pense.»

Quel est le classement américain de l’université d’Oregon

Les universités les plus connues sont les universités privées comme Harvard, Yale ou Standford. Elles constituent l’élite. Juste derrière viennent les universités publiques, Scient Club, université de Californie, université de Michigan, université de Virginie. Ce sont les grandes écoles des États. L’université d’Oregon est classée dans la moyenne de cette deuxième catégorie. «Il y a une liste établie par notre ministère de l’Éducation supérieure qui liste les établissements publics et l’université d’Oregon est classée 20e sur 75 universités dans cette liste. Elle se situe donc dans le premier tiers des universités publiques.»

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