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Les pharmacies par terre : un problème de santé publique

Carrefour Nzeng-Ayong, marché de Nkembo, Carrefour IAI… Les lieux de grandes concentrations humaines de la capitale regorgent d’innombrables pharmacies, agréées mais aussi illégales, dites «pharmacies par terre». Coup d’œil sur un phénomène qui est devenu un problème de santé publique.

6 heures 13 minutes. Carrefour Nzeng-Ayong. Un homme s’active. Tôt ce matin, il étale sa marchandise, constituée essentiellement de produits pharmaceutiques divers, est disposée dans une caisse en bois soutenue par un grand tabouret. Superposées les unes sur les autres, les boîtes de médicaments sont de nature diverses : plusieurs cachets de comprimés, des ampoules buvables, des sirops…

Des commerçants comme cet homme, Ahmed, investissent les rues et les grands carrefours de la capitale gabonaise et de l’intérieur du pays. Bien qu’illégal ce commerce est une activité économique dont les principaux acteurs semblent ne plus craindre les autorités municipales et apparaît comme un véritable «casse-tête» à résoudre.

Et au regard de ce laisser-aller et des dangers encourus, on est en droit de s’interroger sur la provenance de ces produits pharmaceutiques, finalement écoulés sans contrôle ni répression et sur la légitimité de leur commercialisation. Comme pour apporter une lueur dans le flou qui subsiste, un jeune pharmacien ambulant gabonais, implanté au petit marché de Nkembo, le regard lointain et avec air dédaigneux derrière sa caisse lance : «Ah ! Mon frère, si on fait le commerce-là, c’est que nous avons le droit».

À l’écouter, le commerce de produits pharmaceutiques illégal semble être une question résolue pour les vendeurs et pour les dirigeants de la municipalité et même du ministère de la Santé.

Le mur du silence

Des produits les plus communs d’utilisation courante (Vermox, Doliprane, Efferalgan) aux produits nécessitant une prescription médicale (Rhinofebral, Bedeli ou Calcium Sandoz) en passant par une gamme de préservatifs masculins, le commerce pharmaceutique ambulant à Libreville, est une activité économique impénétrable par les profanes car parfaitement structurée et respectant ses règles.

Si Ahmed de Nzeng-Ayong reste silencieux, c’est qu’il est contraint à une omerta, une loi du silence qui lui impose de se taire quand on lui demande qui lui fournit sa marchandise. Un autre vendeur du même carrefour réputé, hésitant, laisse entendre que la provenance des produits vendus n’est pas lointaine. «C’est à côté», dit-il.

Il laisse sous-entendre qu’un puissant réseau se serait établi entre les vendeurs, pour le moins illégaux, et certaines structures pharmaceutiques de la capitale. Qu’en est-il réellement ? Ce «à côté» serait-il une invitation à imaginer une entente entre ces «pharmacies par terre» et certaines pharmacies officielles autour desquelles certains vendeurs de médicaments écoulent sans crainte leurs marchandises ?

Une bien curieuse cohabitation

Mal à l’aise, les vendeurs de médicaments présents sur la périphérie de certaines pharmacies officielles de la capitale le sont surtout lorsqu’on leur demande s’ils n’ont pas peur d’écouler leur marchandise illégale dans les environs immédiats des «vraies pharmacies». En effet, si certains ambulants écoulent mieux leurs produits sous le couvert de la nuit et donc loin du risque de se faire arrêter par les agents de la police municipale, d’autres, plus téméraires, «autorisés» disent-ils à voix basse, s’installent en plein jour aux alentours des pharmacies officielles.

C’est notamment le cas de John, un ressortissant nigérian qui, depuis trois ans et contre toute attente, tient commerce précisément au portail de la Pharmacie de Nkembo, et celui d’un autre qui tient son activité en face de la Pharmacie La Sagesse du carrefour Nzeng-Ayong.

Supercherie ou arrangement?

A IAI, Nzeng-Ayong, Nkembo, les alentours des pharmacies officielles sont infestés de commerçants offrant des produits de nature diverse. Si les vendeuses de poisson, de produits cosmétiques à la provenance douteuse ou autres vendeurs de raticides à la criée côtoient aisément les chargeurs de taxis et le va-et-vient des piétons, le flegme des pharmaciens ambulants est d’autant plus étonnant qu’ils semblent ne s’inquiéter de rien, si ce n’est de la rentabilité de leur commerce. En effet, de quoi auraient-ils peur s’ils sont habilité à exercer leur activité tel qu’ils le prétendent, au vu et su des autorités ? Même si de nombreuses personnes ont été victimes de la mauvaise qualité des produits.

Certains de ces vendeurs à la sauvette payent quotidiennement les taxes municipales, ainsi que l’attestent la plupart d’entre eux. Des taxes qui, paraît-il, varient quotidiennement selon l’humeur des agents municipaux. De même, nous assure l’un d’eux, qu’ils ont le temps de décamper lorsque ces mêmes agents leur annoncent une éventuelle saisie par la police de l’Hôtel de ville. A se demander ce que valent les belles résolutions, prisent immanquablement chaque année, appelant à libérer les trottoirs des vendeurs et vendeuses ambulants sous prétexte d’hygiène, quand ce sont des médicaments, impossibles à retracer et dont la qualité est plus que douteuse, qui sont ainsi commercialisés au grand jour.

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