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Dans le fief touareg de Kidal les élections maliennes font débat

People seeking refuge from Tuareg separatist rebel group MNLA display a Malian flag in a military camp in the northern town of Kidal,La capitale des rebelles du MNLA prépare le premier tour de la présidentielle prévu dimanche dans un climat de tension.

«Nous sommes en train de former les présidents des bureaux de vote et d’acheminer le matériel électoral, par la route et par avion. Je n’ai aucune crainte pour la tenue du scrutin.» Le gouverneur de Kidal, Adama Kamissoko, se veut enthousiaste et confiant. Depuis deux semaines environ qu’il a pu s’installer, de manière très précaire, à Kidal, il ne ménage pas ses efforts pour organiser le scrutin présidentiel qui doit avoir lieu ce dimanche. Les accords d’Ouagadougou, signés il y a tout juste un mois par Bamako et par les rebelles touaregs du MNLA (Mouvement national de libération de l’Azawad) ont permis le retour de l’armée et de l’administration malienne dans la ville, qui était demeurée jusque-là sous le contrôle du MNLA. Depuis, l’organisation du scrutin est devenue un défi technique et sécuritaire, ainsi qu’un enjeu politique et symbolique de taille pour les autorités maliennes. «Tout se passe très bien», répète encore le gouverneur avec conviction.

Pourtant, les conditions sont loin d’être réjouissantes. Le fichier électoral, révisé à Kidal en seulement quelques heures afin de permettre de lancer le processus électoral, dénombre 35.000 électeurs dans la région, 10.000 dans la ville même. Mais à quelques jours du scrutin, seules 9000 personnes ont récupéré leur carte de vote. «On espère atteindre les 12.000 d’ici à dimanche», précise le gouverneur Kamissoko. Six communes, au maximum, devraient être équipées de bureau de vote sur l’ensemble de la région. Problèmes logistiques, problèmes surtout de sécurité: «On ne peut pas avoir accès partout, se désole le gouverneur, il y a des zones minées. Mais tout le monde veut voter, veut-il croire. On a fait de la sensibilisation sur les radios locales pour dire aux gens de se déplacer.»

Intimidations

«Je ne sais pas encore si je vais voter, tranche Abdul Hamid, un habitant de Kidal joint au téléphone. J’ai retiré ma carte, mais il y a beaucoup de problèmes.» Comme la plupart des habitants de Kidal, Hamid craint surtout pour sa sécurité. La force française Serval, les troupes onusiennes de la Minusma (Mission des Nations unies au Mali) et l’armée malienne ont mis en place un dispositif censé protéger les populations. Mais le risque demeure important, dans les faits et dans les têtes. «Il y a des groupes armés qui se préparent, croit savoir Abdul Hamid, faisant allusion aux islamistes d’Aqmi (al-Qaida au Maghreb islamique) ou du Mujao (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest) qui ont occupé le nord du pays pendant près d’un an, jusqu’à l’intervention militaire de janvier dernier. Et surtout il y a de l’intimidation de la part des groupes pro-MNLA. Ils menacent de s’en prendre à ceux qui vont aller voter.»

Depuis plusieurs semaines, les tensions sont extrêmement fortes dans la ville. Les combattants du MNLA ont accepté d’être cantonnés avec leurs armes, et placés sous la surveillance des militaires français et onusiens, mais des affrontements entre populations civiles favorables à l’État malien et partisans des rebelles touaregs ont eu lieu à plusieurs reprises. «Nous ne souhaitons pas nuire à la tenue du scrutin, explique pourtant Moussa Ag Acharatoumane, un cadre du MNLA. Nous avons donné des consignes à nos populations pour que le processus se déroule normalement, nous espérons qu’elles seront suivies.» Les accords d’Ouagadougou passés avec Bamako prévoient l’ouverture de négociations sur le statut territorial du territoire nord-malien soixante jours après l’installation du gouvernement issu de l’élection. Le groupe rebelle souhaite donc aujourd’hui que le scrutin se tienne afin d’engager les discussions au plus vite. «Mais je ne garantis pas que tout va bien se passer, prévient pourtant Moussa Ag Acharatoumane. Il y a beaucoup de tensions, et les élections ne sont pas la priorité des populations.»

«Tous les pro-Mali vont voter», affirme avec une exagération assumée Malko, un autre habitant de Kidal. Touareg et favorable à l’État malien, il est réfugié dans un camp militaire de Kidal, car il craint pour sa sécurité. «Il y en a qui ont peur, admet-il, mais il faut que chacun assume ses responsabilités pour son pays. Qu’il y ait des agressions ou pas, je suis décidé à aller voter le 28.» Le week-end dernier, une équipe en charge de la distribution des cartes de vote a été enlevée puis relâchée à Tessalit, dans le nord de la région de Kidal. Depuis quelques jours, la situation s’est apaisée, notamment dans la ville de Kidal elle-même. Ce qui n’aide pas Abdul Hamid à se décider. «Qu’ils soient pro-Mali ou pro-MNLA, beaucoup ne voteront pas parce qu’ils estiment que ça ne va rien leur apporter. Moi-même, j’hésite aussi pour ça: le président malien élu, qu’est-ce qu’il va faire pour Kidal? Ils parlent, ils ont des projets, mais au final il n’y a rien pour les gens d’ici. C’est toujours comme ça.»

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