spot_imgspot_img

Ouvrage : L’économie gabonaise souffre du syndrome hollandais, dit-on ! par Dr. Okoué Edou

Dr Jacques Janvier Rop's Okoué Edou, Secrétaire Exécutif Adjoint du BDP-Modwoam chargé des Affaires Économiques,  du Développement et de la Mondialisation
Dr Jacques Janvier Rop’s Okoué Edou, Secrétaire Exécutif Adjoint du BDP-Modwoam chargé des Affaires Économiques, du Développement et de la Mondialisation

L’expression de « syndrome hollandais », « mal néerlandais » ou encore « dutch disease » est apparue vers 1975, au moment où eurent lieu les débats relatifs aux problèmes que le pétrole de la mer du Nord risquait de poser à la Grande-Bretagne. Elle fait référence aux difficultés rencontrées par l’économie néerlandaise à la suite de la mise en exploitation, dans les années 1970, des réserves de gaz naturel du gisement Slochteren. Cette référence à une certaine morbidité associée à l’exploitation d’une ressource naturelle peut surprendre et paraître paradoxale au sens où les expériences de la plupart des pays pétroliers et miniers révèlent que la possession des richesses naturelles n’a pas toujours l’effet favorable escompté sur l’évolution économique.

De la sorte, l’exploitation d’une ressource naturelle déclenche un processus d’ajustement aboutissant au déclin des branches exposées à la concurrence internationale et à l’expansion de celles qui en sont abritées. Autrement dit, un boom (pétrolier ou minier) tend spontanément à compromettre tout projet d’industrialisation ou de diversification des exportations d’un pays, aggravant ainsi sa vulnérabilité.

Relativement au Gabon, c’est précisément un choc de ce type qu’il subit depuis la décennie 1970 à la suite de la flambée des cours internationaux du brut. Après la brusque montée des prix des produits pétroliers du début des années 1970, ce pays a connu les effets bénéfiques du transfert de revenus en provenance des pays acheteurs.

Cependant, cet effet d’enrichissement global du Gabon suite à la hausse du cours de l’or noir s’est très vite paradoxalement accompagné d’effets sectoriels pervers se traduisant par un déclin des branches exposées à la concurrence internationale (bois, mines, agriculture…) autres que celle pétrolière en boom. Face au dépérissement de la filière agricole, la demande intérieure stimulée par l’augmentation du revenu réel s’est donc tournée vers les produits étrangers similaires et plus compétitifs, provoquant au passage une explosion des imports et une dégradation du solde extérieur en biens alimentaires.

L’ensemble de ces effets préjudiciables créés au sein de l’économie gabonaise par le boom pétrolier pousse à dire que le Gabon connaît un « syndrome hollandais ». L’application de cette théorie du « mal néerlandais » au Gabon fournit d’assez bons résultats tant du point de vue des tendances macroéconomiques et sectorielles que de celui économétrique.

Toutefois, il importe de souligner que c’est la malveillante gouvernance de la rente pétrolière et du Gabon par le régime en place qui a été le principal facteur du « syndrome hollandais » dans ce pays. Malgré le dualisme de son économie, le pont, dans cette dernière, entre le secteur pétrolier et le reste de l’économie est le budget de l’État.  C’est donc plus la malveillante gestion étatique de la rente pétrolière par le parti quinquagénaire au pouvoir (le PDG) qui est à l’origine de l’apparition et de la consolidation du «mal néerlandais» au travers de ses effets pernicieux de «déplacement ou réallocation des ressources productives» et de «dépense».

En effet, la rente pétrolière gabonaise a permis une croissance soutenue des recettes budgétaires. Disposant de revenus importants, l’État-PDG-Bongo, au pouvoir depuis 50 ans, s’est lancé dans le détournement éhonté des deniers publics et autres financements d’éléphants blancs.

À la différence du Cameroun qui a pu neutraliser sa rente pétrolière et maintenir le pouvoir d’achat de ses paysans-producteurs agricoles dans le but de contrecarrer toute forme de « dutch disease », l’État-PDG-Bongo a, quant à lui, procédé à la création massive d’emplois sans réelle contrepartie productive (administration pléthorique et inefficace), aux dépenses improductives et inutiles (sommet de l’UOA en 1977, Octra, Africavision…), aux versements de faramineux salaires aux agents inféodés au pouvoir nonobstant leur faible capital scolaire, qualification ou productivité.

Cette logique de redistribution calamiteuse de la rente pétrolière a été privilégiée à celle de l’accumulation du capital, de la diversification véritable de l’appareil productif, de soutien des revenus agricoles et industriels. Dès lors, il a résulté une appréciation du taux de change réel et un déclin du secteur exposé hors-pétrole, manifestation du « dutch-disease ».

À cet égard, il importe de combattre les effets pernicieux de ce « syndrome hollandais » en cherchant, par des mesures appropriées, à limiter le déclin des autres secteurs exposés au commerce international. Ces mesures partent de la mise en valeur des branches d’activité exposées (agriculture, gaz naturel, mines, bois...) autres que le pétrole à la politique macroéconomique de libéralisation du commerce extérieur en passant par la promotion véritable d’un secteur privé pourvoyeur de biens à plus haute valeur ajoutée. De la sorte, la dynamisation et la diversification de l’économie gabonaise ne s’en trouveraient que renforcées, et le « mal néerlandais » drastiquement réduit à une peau de chagrin.

Dr Jacques Janvier Rops Okoué Edou,
Secrétaire Exécutif Adjoint du BDP-Modwoam chargé des
Affaires Économiques,  du Développement et de la Mondialisation,
Doctorant en Sciences Politiques,
MAP – Évaluation des Programmes Publics,
MBA – Gestion des Entreprises,
DESS – Finance d’Entreprise,
Pr d’économie à l’UQAR et au cégep Limoilou
Consultant international (Groupe BTO Consultants).

Exprimez-vous!

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

spot_imgspot_img

Articles apparentés

spot_imgspot_img

Suivez-nous!

1,877FansJ'aime
133SuiveursSuivre
558AbonnésS'abonner

RÉCENTS ARTICLES