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Présidentielle, filiation d’Ali Bongo: la présidente de la Cour constitutionnelle du Gabon répond à RFI

Au Gabon, c’est avant ce mardi soir, 12 juillet minuit que les candidats à la présidentielle du 27 août doivent déposer leurs dossiers à la Commission électorale. Depuis quelques mois, plusieurs candidats de l’opposition contestent au président sortant Ali Bongo le droit de se représenter. Ils espèrent que la Commission électorale ou, en dernier ressort, la Cour constitutionnelle refusera de valider la candidature d’Ali Bongo. Marie-Madeleine Mborantsuo est la présidente de la Cour constitutionnelle du Gabon. En ligne de Libreville, elle répond aux questions de Christophe Boisbouvier.

RFI : Quel est le rôle de la Cour constitutionnelle dans la validation ou non des dossiers des candidats à l’élection présidentielle ?

Marie-Madeleine Mborantsuo : Presque pas. Vous savez qu’au Gabon c’est la Commission électorale nationale autonome et permanente qui reçoit tous les dossiers de candidature, les examine et valide les candidatures qui sont complètes. En fait, l’accord n’intervient que s’il y a un recours qui est porté contre la décision de la Commission électorale nationale autonome et permanente.

Depuis deux ans, il y a polémique sur les origines d’Ali Bongo. Est-il né Gabonais ou a-t-il acquis la nationalité gabonaise après sa naissance ? Qu’est-ce que vous en pensez ?

Le juge constitutionnel que je suis ne peut, vous pouvez vous en douter, donner une quelconque position sur la question d’autant plus que c’est une question qui peut être soumise à l’examen de la Cour constitutionnelle. Il appartient à ceux qui dénient à cette personnalité son statut, soit de Gabonais ou d’étranger, d’apporter les éléments nécessaires devant les juridictions compétentes.

Quel est l’article de la Constitution qui fait foi dans ce cas ?

Concernant l’élection d’un président de la République, il s’agit des dispositions de l’article 10 de la Constitution. Cet article comprend cinq alinéas. Mais il s’agit également des dispositions de la loi organique sur l’élection du président de la République et les dispositions de la loi spéciale sur l’élection du président de la République gabonaise.

Et au regard de l’article 10, quelles sont les conditions nécessaires pour être candidat à la présidentielle ?

Il faut être Gabonais et si vous avez une autre nationalité, il ne faudrait pas avoir exercé des fonctions publiques ou privées au titre de cette autre nationalité. Et si vous avez acquis, je dis bien acquis, la nationalité gabonaise vous ne pouvez pas être candidat jusqu’à la quatrième génération.

En juillet 2009, le candidat Ali Bongo a produit un acte de naissance établit par la mairie du 3ème arrondissement de Libreville puis en janvier 2015, deux mois après la sortie du dernier livre de l’essayiste français Pierre Péan, le président Ali Bongo a reconnu sur Radio France internationale qu’il s’agissait d’un faux. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

Là vraiment, je n’ai pas suivi cette déclaration du président Ali Bongo Ondimba sur cette radio, je ne peux donc pas donner un quelconque avis dessus.

Alors cet acte de naissance établit par la mairie du 3ème arrondissement de Libreville, je crois que vous l’avez examiné vous-même, madame la présidente, à l’issue d’un recours formé dès 2009 par le candidat malheureux Luc Bengone Nsi ?

Non, malheureusement ce qui est affirmé ici et là est inexact. Monsieur Bengone Nsi n’a jamais produit devant la Cour constitutionnelle en 2009 un quelconque acte de naissance. Je voudrais vous rappeler qu’en 2009, tous les dossiers de candidature à l’élection présidentielle de 2009 avaient été déposés devant la Commission électorale nationale autonome et permanente et qu’aucune requête en contestation de candidature n’avait été soumise à l’examen de la Cour constitutionnelle de la République gabonaise. Par conséquent, la Cour constitutionnelle de la République gabonaise n’a jamais était en possession d’un quelconque acte de naissance de monsieur Ali Bongo Ondimba. Monsieur Bengone Nsi a saisi la Cour constitutionnelle après que les résultats de l’élection aient été annoncés par le ministre en charge de l’Intérieur sur invitation de la Commission électorale. Et à ce niveau-là, il s’agissait d’un contentieux sur les résultats de l’élection et non un contentieux sur les candidatures.

Et quand il a fait ce recours après l’élection, vous avez eu donc sur votre bureau, le fameux acte de naissance du candidat Ali Bongo, c’est ça ?

Non pas du tout. Monsieur Bengone Nsi n’a produit au soutien de sa requête, qu’une copie d’une page d’un livre écrit par un monsieur, par quelqu’un, c’est tout.

Oui, c’est ça, il avait produit une page du livre Affaires africaine de Pierre Péan paru en 1983, c’est ça ?

Comme vous le rappelez si bien, la photocopie d’une page d’un livre ne constitue pas un acte de naissance.

Donc si je comprends bien, si demain vous est soumise une requête en contestation de candidature, là vous pourrez examiner cette requête ?

Si nous sommes saisis, la Cour tranchera au regard des dispositions de la loi relativement à son domaine de compétence et aux conditions de recevabilité des requêtes.

C’est-à-dire que vous réunirez entre tous les juges de la Cour pour savoir si vous êtes compétents ou si vous ne l’êtes pas, c’est ça ?

Tout à fait. Pour toute requête, l’ensemble des membres de la Cour, nous sommes neuf, se réunit et examine si la requête rentre bien dans le domaine de compétence dévolue à la Cour constitutionnelle ou non.

Mais en 2009, vous disiez tout à l’heure, que si le candidat Bengone Nsi vous avez soumis une requête en contestation de candidature, vous l’auriez examiné ?

Non, je n’ai pas dit. Je n’ai pas dit que si Bengone Nsi nous avait saisis en contestation de candidature, on allait se déclarer compétents. J’ai dit qu’en 2009, la Cour n’avait jamais été saisie d’un recours en contestation de candidature.

En 2009, le candidat Ali Bongo a produit un acte de naissance établi quelques semaines plus tôt par une mairie de Libreville. En 2014, la présidence gabonaise a fait paraître dans la presse un autre acte de naissance, en l’occurrence un extrait du registre de l’état civil de la mairie de Brazzaville de 1959, il y a donc au moins deux actes de naissance pour monsieur Ali Bongo. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

Vous savez cette question est une question de droit, elle doit être tranchée par les juridictions compétentes. Madame le juge constitutionnel que je suis, ne peut donc pas donner un quelconque avis sur une question qui relève des instances juridictionnelles compétentes.

Mais tout simplement, le fait qu’un individu produise deux actes de naissance différents, est-ce que ça ne jette pas la suspicion sur ses origines ?

Les discussions dans la rue, les discussions dans les médias, les écrits dans les livres, tout ceci ne peut pas constituer une décision juridictionnelle qui va s’imposer à tous. Cette question doit être tranchée par les juridictions compétentes en la matière.

Mais ce que se demandent beaucoup de Gabonais, c’est une question toute simple, si Ali Bongo est vraiment né à Brazzaville en février 59 pourquoi n’a-t-il pas produit l’extrait du registre de l’état civil de la mairie de Brazzaville dès sa première candidature en juillet 2009 ?

C’est une question que se posent certains citoyens. Alors à cela je dis, tout simplement, que ceux-là puissent se saisir les juridictions compétentes. Le Gabon est un Etat de droit et s’il y a des questions, des suspicions et autres, il appartient à tout citoyen concerné ou intéressé de saisir les juridictions compétentes pour vider cette question-là.

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