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Crise politique : où en est le Gabon ?

Une semaine après l’annonce des résultats, le camp d’Ali Bongo et celui de Jean Ping poursuivent leur bras de fer – Joel Bouopda/AP/SIPA
Depuis l’annonce de la réélection fortement contestée du président sortant Ali Bongo, le pays est au bord du chaos. Violences, situation politique, ressortissants français, … état des lieux.

Le 31 août dernier, Ali Bongo Ondimba a été déclaré vainqueur de la présidentielle au Gabon avec 49,80 % des suffrages contre 48,23 % pour son opposant Jean Ping. Aussitôt, la réélection du président sortant, fortement contestée, a entraîné une éruption de violence dans ce pays frontalier de la République du Congo et de la Guinée équatoriale.

Une semaine après l’annonce des résultats du scrutin à un tour, le camp d’Ali Bongo et celui de Jean Ping poursuivent leur bras de fer, sur fond d’inquiétude grandissante de la communauté internationale sur l’avenir du pays. Où en est-il aujourd’hui ? Etat des lieux en cinq questions.

Quelle est la situation à Libreville, la capitale ?

Le centre de la capitale a retrouvé son animation habituelle ce mardi. L’activité a repris au ralenti. Les banques et les commerces ont rouvert. Tout comme la seule raffinerie du pays, détenue à 43,8 % par Total et qui se trouve à Port-Gentil, après cinq jours d’arrêt.

Néanmoins, le calme est précaire. La population attend avec angoisse l’issue de la confrontation entre pouvoir et opposition. Lundi soir, Jean Ping a lancé un appel virulent à une « grève générale » pour bloquer l’économie du pays et « faire tomber le tyran ». C’est ainsi qu’il nomme son ennemi politique Ali Bongo, dont il juge la réélection frauduleuse.

Jean Ping, qui s’est autoproclamé président du Gabon vendredi soir , déclare sur son site Internet et sa page Facebook que le combat n’est pas terminé.

Par ailleurs, l’Internet, qui avait été partiellement rétabli lundi après une coupure totale de cinq jours, a été à nouveau coupé, puis rétabli et ainsi de suite, comme en témoigne l’envoyé spécial de Radio France Internationale au Gabon.

Aucune explication officielle n’a été fournie sur les raisons de cette coupure, que ce soit par les opérateurs téléphoniques ou par les autorités.

Le pays est-il dans une impasse politique ?

La mission d’observation de l’Union européenne a analysé les résultats définitifs de l’élection présidentielle au Gabon. Ils révèlent « une évidente anomalie », a indiqué mardi soir à l’AFP l’observatrice en chef de l’UE, Mariya Gabriel. « Une analyse portant sur le nombre de non-votants et des bulletins blancs et nuls révèle une évidente anomalie dans les résultats finaux du Haut-Ogooué », qui a officiellement enregistré un taux de participation de 99,93% et a permis au président sortant Ali Bongo d’être réélu d’une courte tête, a-t-elle souligné.

Plus tôt ce mardi, le Premier ministre Manuel Valls avait suggéré un nouveau décompte des voix. Les résultats officiels provisoires, rejetés par le camp de Jean Ping, donnent son rival gagnant avec 5.594 voix d’avance, dans ce petit pays africain comptant environ 1,8 million d’habitants. Comme l’opposition, l’Union européenne et les Etats-Unis, la France avait déjà demandé la publication des résultats de tous les bureaux de vote du Gabon, qui sont au nombre de 2.500 environ.

Ces tensions grandissantes ont abouti lundi soir à la démission d’un poids lourd du gouvernement gabonais, le ministre de la Justice et deuxième vice-Premier ministre, Séraphin Moundounga.

Demandant lui aussi le « recomptage des voix bureau de vote par bureau de vote et procès-verbal par procès-verbal », il a estimé que « la paix est gravement menacée au Gabon ».

De son côté, le pouvoir, qui nie les accusations de trucage, refuse tout recomptage arguant que la loi électorale ne le prévoit pas. Face à ces multiples demandes, il a invité l’opposition à se tourner vers la Cour constitutionnelle. Chose que le camp Ping refuse, affirmant que cette Cour est totalement inféodée à la présidence. S’il change d’avis, il a jusqu’à jeudi 15 heures (GMT) pour déposer un recours.

Sortant de son habituelle réserve, l’Union africaine (UA) a annoncé son intention d’envoyer une délégation au Gabon, « composée de chefs d’Etat africains, accompagnés de hauts responsables de la Commission de l’UA et des Nations unies », dès que les conditions pour une visite seront réunies. Ce sera vraisemblablement le président tchadien Idriss Déby, qui assure actuellement la présidence de l’UA, qui dirigera les discussions, selon un porte-parole.

Les émeutes post-électorales ont-elles fait des morts ?

Les violences qui ont suivi l’annonce des résultats du scrutin mercredi dernier ont fait au trois morts et 105 blessés, dont 67 parmi les forces de sécurité, a indiqué lundi le ministre de l’Intérieur gabonais Pacôme Moubelet-Boubeya. Sur place, l’AFP dit avoir recensé sept morts.

Par ailleurs, un millier de personnes ont été arrêtées. Un collaborateur du ministère de l’Intérieur gabonais a déclaré dimanche à l’agence de presse Reuters que plusieurs dizaines de personnes avaient été libérées. Malgré tout, plusieurs habitants de Libreville disent être toujours sans nouvelles de certains de leurs proches.

Quid des ressortissants français au Gabon ?

Alors que 15.000 Français vivent et travaillent au Gabon, « nous sommes sans nouvelles de plusieurs de nos ressortissants, souvent binationaux, franco-gabonais », s’inquiète le Premier ministre français Manuel Valls , évoquant « une quinzaine » de personnes. Il a demandé aux autorités gabonaises « que tout soit fait pour les retrouver ».

Dans un communiqué, le ministère gabonais des Affaires étrangères a confirmé lundi soir l’interpellation de binationaux par les forces de l’ordre pendant les manifestations post-électorales, soulignant que « selon la législation gabonaise, les citoyens binationaux établis au Gabon ne peuvent se prévaloir d’une autre nationalité au Gabon et par conséquent sont assujettis aux lois et règlements gabonais ».

Quelles sont les conséquences économiques de cette crise ?

Edifices publics incendiés, commerces saccagés, véhicules brûlés… Lors d’une entrevue avec la presse, le ministre de l’Intérieur gabonais Pacôme Moubelet Boubeya a chiffré les pertes à plusieurs centaines de milliards de francs CFA, selon le journal d’information en ligne Gabon éco .

Par ailleurs, les troubles ont provoqué des pénuries et une flambée des prix. Le Gabon importe 80 % de sa nourriture, notamment du Cameroun voisin. Or, le trafic en provenance de ce pays reste interrompu, les transporteurs craignant les pilleurs. Les Gabonais qui le peuvent veulent reconstituer un stock de nourriture avant la prochaine étape du processus électoral, à savoir la proclamation des résultats définitifs du scrutin par la Cour constitutionnelle.

@anaellegrondin

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