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Le Gabon sous tension après la victoire confirmée d’Ali Bongo

L’opposant Jean Ping a déclaré samedi que la validation de l’élection du président sortant Ali Bongo était une «décision inique» alors que les Gabonais craignent un retour de la violence. Pour Jean-Marc Ayrault, l’examen des recours n’a cependant pas levé «tous les doutes»

De notre envoyé spécial à Libreville

Samedi, au cœur de la nuit, Libreville la capitale gabonaise est quadrillée de militaires. Le boulevard du bord de mer est coupé de barrages où des militaires tendus fouillent consciencieusement les très rares voitures. Les soldats semblent redouter des violences.

Quelques heures auparavant, la Cour constitutionnelle avait rendu son verdict. Les magistrats ont sans surprise confirmé la victoire du président sortant, Ali Bongo, à l’élection présidentielle de la fin août. Son rival, Jean Ping, pointe une victoire étriquée, avec moins de 6000 voix d’avance, et des chiffres pour le moins étonnants dans le fief du président, la province du Haut Ogooué qui affiche 99,9% de participation. La Cour a repoussé ses requêtes. Tout en modifiant tout de même un rien le résultat final. Mais pas dans le sens voulu par l’opposition.

Si les résultats de plusieurs bureaux de vote ont été annulés, cela élargit la victoire d’Ali Bongo, qui dispose maintenant officiellement de plus de 10.000 voix d’avance et passe la barre des 50%. «Rien d’étonnant là-dedans. On s’y attendait. Ce pouvoir a montré son vrai visage, celui d’une dictature», a très vite réagi Jean Gaspard Ntoutoume, le porte-parole de Jean Ping.

Ping dénonce un «déni de droit»

En fin d’après-midi, celui qui se présente comme «le président élu» a dénoncé «une décision inique», un «déni de droit». Rappelant qu’en saisissant la Cour, il a choisi «d’être légaliste», il a longuement appelé la communauté internationale «à prendre la mesure de la situation au Gabon». Mais il s’est gardé d’encourager ses partisans à prendre la rue.

De son côté, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault a regretté samedi que l’examen des recours n’ait pas levé «tous les doutes» sur la réélection du président gabonais Ali Bongo Ondimba, tout en appelant l’opposition à «récuser l’action violente».

Comme les soldats, comme Ali Bongo, Jean Ping semble craindre les violences et les heurts. Comme le peuple aussi, qui garde les images des rixes, de la répression et des arrestations qui avaient émaillé l’annonce des résultats provisoires fin août.

Au matin, la ville est plongée dans une torpeur maladive. Elle n’est pas fiévreuse, elle est atone. Les premières heures sont aussi calmes et vides que la nuit. Dans les quartiers populaires, comme à Akébé, l’abattement règne. «On est volé, mais on ne peut rien faire. Il a des fusils au carrefour», s’emporte Rosalie Essono. La corpulente femme ne doute en rien de la victoire de Ping, mais plus que tout elle s’énerve contre «Ali». «On en veut plus des Bongo, c’est tout», glisse-t-elle, heureuse tout de même que «la guerre n’est pas éclatée».

Dans un petit café, Placide vocifère aussi contre «des gens» qui «croient que le Gabon est leur royaume». Les mots des quelques partisans du président sortants sont vite emportés dans un flot de colère où se mêle le ras-le-bol de la pauvreté, les rancœurs contre les puissants, les petits soucis du moment et les interrogations sur le silence d’une France que tous ne voient comme un dernier recours. Comment le pays va-t-il se remettre de cette crise? Personne ne le sait, ne le dit. «On sait juste que cela ne restera pas comme ça», glisse Placide. Une certitude inquiétante qui, pour une fois, unie tout le monde, du pouvoir à la rue.

Par Tanguy Berthemet

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