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Dialogue Politique : «S’il n’y a pas une volonté politique, rien ne changera», Séraphin Ndaot

Le président de la Commission 1 chargée de mener des réflexions sur la Réforme des institutions et la Consolidation de l’Etat de droit démocratique, Séraphin Ndaot, estime dans cette interview que quelle que soit la profondeur des réformes, s’il n’y a pas une volonté politique, rien ne changera.

Gabonreview: Deux mois après le lancement des travaux, le Dialogue s’achève avec cette remise des Actes au président de la République. Que retenir de ces assises?

Séraphin Ndaot Rembogo: J’ai eu l’honneur de présider une Commission: celle chargée de la Réforme des institutions et la Consolidation de l’Etat de droit démocratique. Je peux vous dire que pour ce qui est de ma commission, celle que j’ai présidé, les travaux se sont bien déroulés, les débats étaient policés. Il y a eu, comme dans tout débat politique, quelques tensions. Mais nous avons quand même réussi à les taire dans le cadre d’un consensus. Je crois qu’il y a une plus-value à ces assises. Vous avez entendu les propositions. Elles tendent à la consolidation de l’Etat de droit démocratique. Je voudrais prendre deux exemples importants s’agissant notamment du mode de scrutin: nous sommes passés de scrutin à un tour à un scrutin uninominal majoritaire à deux tours. C’est très important. Cela voudrait dire que désormais, les élus auront une légitimité qui faisait défaut dans le précédent mode de scrutin. Ce n’est pas rien. Vous avez également pu voir que la Cour constitutionnelle dont on disait que c’était la tour de pise a été pratiquement dépouillée de pas mal d’attributions. Elle ne s’occupera plus des élections locales. Elle n’a plus aussi certaines de ses attributions liées aux décrets. Ce qui est important et ce qui intéresse les populations c’est le fait que la Cour constitutionnelle ne désigne plus du tout le président de la structure qui est chargé d’organiser les élections. Elle a d’ailleurs déjà changé de nom. Ce n’est plus la Cenap (Commission électorale nationale autonome et permanente, ndlr). Par rapport au mode de scrutin et au fait que nous avons créé un autre organe chargé désormais de gérer les élections, je pense que c’est une consolidation de l’Etat de droit.

Revenons sur le cas de la présidence de la République, rien ou presque n’a changé.

Détrompez-vous! Le fait que nous ayons désormais un scrutin majoritaire uninominal à deux tours change tout. C’est ce qui posait problème. Les gens ne comprennent pas que pour assurer l’alternance au pouvoir ce n’est pas tant la durée des mandats, mais c’est le fait que désormais il y a une possibilité pour l’opposition, si bien entendu elle est unie parce que le problème ici c’est que l’opposition est plurielle, d’accéder au pouvoir. C’est important! Par rapport au président de la République, je pense que le mode d’accession au pouvoir est désormais plus facile qu’avant. Le fait que désormais nous avons limité la durée du mandat des membres de la Cour constitutionnelle est une avancée. Nous avons eu beaucoup de choses. Ce que je voudrais surtout dire c’est que ce qui est important dans ce Dialogue d’Agondje, ce n’est pas tant les réformes et décisions prises, c’est la volonté politique des tenants du pouvoir. Il est bien évident que quelle que soit la profondeur des réformes, s’il n’y a pas une volonté politique, rien ne changera. J’ose espérer comme l’a dit le chef de l’Etat lui-même, qu’il s’engagera à normer les actes qui ont été pris. Il faut savoir que là, ce ne sont pas des lois, ce sont les organes chargés de normer. Autrement dit, l’Assemblée nationale et le gouvernement qui vont transformer ces actes en lois et règlements.

On se rend compte que la plupart des présidents des institutions seront encore nommés par le président de la République. N’y a-t-il pas craintes qu’ils soient obligés d’être toujours sous les ordres?

Pas tout à fait parce que s’agissant notamment de la Cour constitutionnelle, il ne nomme pas les membres. Il ne faut pas faire une fixation sur la présidence de la République. Ce que nous faisons aujourd’hui, c’est pour demain. Nous ne faisons pas une fixation sur ce qui se passe aujourd’hui. Les lois ne valent que pour l’avenir. Nous parlons de l’avenir. Même si le président de la République nommait le président de la Cour constitutionnelle sur 9 membres, je ne suis pas sûr que cette désignation va influencer tous les autres membres. Il y a trois qui sont nommés par le parlement, trois par le Conseil supérieur de la magistrature. Il y a à espérer que cette institution sera suffisamment responsable et indépendante.

Une partie de l’opposition à laquelle vous appartenez, incarnée par Jean Ping, n’a pas assisté à ce Dialogue. N’y a-t-il pas de leçons à en tirer par rapport à la crise qui secoue le pays?

Le Dialogue était ouvert à toute l’opposition. Il était ouvert à toute la classe politique. Il y en a qui ont accepté de venir, il y en a qui n’ont pas accepté. Nous sommes en démocratie. Je ne vais pas apprécier la conduite de tel ou tel. Ont-ils eu tort de ne pas venir? Seul l’avenir nous le dira. Ceux qui sont venus ont-ils eu tort? Seul l’avenir nous le dira. J’ai cependant la conviction qu’il fallait quand même venir parce que nous avons fait bouger les lignes même si pour certains, ce n’est pas suffisamment. Vous savez, la démocratie est une longue marche. Notre génération fait ce qu’elle peut, la génération qui vient suivra. Il n’y a pas un seul pays au monde où la démocratie est achevée.

D’après vous, comment les Gabonais accueilleront-ils les conclusions de ce Dialogue?

Cela dépendra de la communication qui sera faite. Mais je crois que si on fait l’énumération de ce qui a été obtenu, si on regarde bien ce qui a été obtenu par rapport à la situation antérieur, on verra bien qu’il y a quand même eu des avancées. Des progrès notables. C’est ce qu’il faut retenir. Nous n’avons pas passé deux mois pour ne rien avoir. On ne peut pas tout avoir. Aujourd’hui la question est la suivant: l’opposition a-t-elle obtenu tout ce qu’elle voulait? La réponse est évidemment non. Parce que nous étions dans un dialogue. Dans un dialogue c’est une affaire de consensus, de rapprochement des positions. De ce fait l’opposition, a quand même obtenu quelque chose.

Etes-vous, vous-même satisfaits du dialogue?

Oui, parce que le Dialogue ne s’est pas uniquement occupé de politique. Les résolutions concernent bien tous les domaines: économique, social, etc. Ces n’est donc pas une affaire de politique. C’est une affaire de toute la population. Le tout est maintenant de voir comment nous allons mettre en musique cette partition. Le souci pour nous c’est l’application de ces Actes. Je crois que c’est un débat qui a été riche et je crois également que s’il y a une volonté politique, j’insiste là-dessus, il n’y a pas de raison que nous ne sortions pas gagnants de ce Dialogue.

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