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“Complément d’enquête” livre les secrets du clan Bongo

Pour son dernier numéro de la saison, diffusé ce jeudi 6 juillet à 22h45, le magazine d’investigation de France 2 revisite cinquante ans de liens incestueux reliant la France et le Gabon. Une enquête solide sur un feuilleton en marge de la république, aussi surréaliste que désespérant.

Pour son ultime numéro de la saison (et le dernier présenté par Nicolas Poincaré !), Complément d’enquête s’attaque au genre de la saga familiale, à travers l’histoire du clan Bongo. Un feuilleton tumultueux et désespérant, qui nous replonge dans les coulisses de la Françafrique. Beaucoup de choses ont déjà été révélées sur cette dynastie qui règne sans partage depuis cinquante ans sur le Gabon. Mais, après des mois de tractations, les journalistes Donatien Lemaître et Laurent Dy, ont décroché une interview de l’actuel président : Ali Bongo. Lui qui a succédé à son père, Omar, en 2009, profite du coup de projecteur pour tenter de redorer son blason. Il se laisse complaisement filmer en chemisette au milieu du peuple à Libreville. Se balade, casque sur la tête sur des chantiers, qui ne seront jamais terminés, pour peaufiner sa stature de bâtisseur… Et se prête au jeu du question-réponse dans son palais luxueux, servant à ses interlocuteurs un numéro de langue de bois attendu, mais néammoins surréaliste…

Sans prétendre apporter d’éclairage inédit, l’enquête, solide et étayée par quelques pièces exclusives, s’appuie sur la charpente de cette (non) rencontre pour détricoter le mirage d’un président proche du peuple, et revisiter les liens du pays avec l’Hexagone. « La France sans le Gabon est une voiture sans carburant. Le Gabon sans la France est une voiture sans chauffeur » avait coutume de répéter Omar Bongo aux médias. En faisant intervenir des acteurs du dossier et des journalistes (Pierre Péan, Fabrice Arfi), le film retrace cinquante ans d’intérêts mutuels et de services rendus, depuis la mise en place d’Omar Bongo au pouvoir, en 1967, par le Général de Gaulle pour « sécuriser les ressources en pétrole » jusqu’à aujourd’hui. Il revient sur le “deal” avantageux qui, pendant des décennies, aurait permis à la famille Bongo de s’enrichir grassement, entre commissions hallucinantes versées par Elf Aquitaine, et pourcentages sur les actions du groupe pétrolier. En échange, Omar Bongo, aurait financé les campagnes des hommes politiques français, de gauche comme de droite. « Omar Bongo a été généreux avec tous les horizons de la vie politique française » raconte l’avocat Robert Bourgi, ex-émissaire de la Françafrique, aujourd’hui en disgrâce auprès du fils Bongo. « Quand Omar Bongo était à l’hôtel Crillon, toute la classe politique française défilait » confirme Jean-Paul Benoît, ancien directeur de cabinet au ministère de la Coopération, évoquant la circulation de « mallettes de cash »…

Un système entretenu pour durer

Le film brosse aussi un portrait peu flatteur : celui d’un fils « mal aimé », élevé en France, pas franchement intéressé par les études. Un « élève médiocre », qui aurait obtenu son baccalauréat grâce à l’intervention de l’Elysée, comme l’affirme Jean-Paul Benoît. « C’étaient les pratiques de l’époque (…) Une cogestion familiale des affaires franco-africaines. » Les observateurs décrivent Ali Bongo comme un jeune indolent passionné de musique, à qui l’argent de papa a permis de sortir un album, de se payer les musiciens de James Brown… Puis un dirigeant se roulant dans l’opulence, alors que son peuple lutte contre la misère et que la dette du pays a été multipliée par trois depuis son accession au pouvoir. De manière plutôt savoureuse, le film joue le décalage entre l’interview verrouillée de l’actuel président, et des séquences de témoignages et d‘enquête qui démentent cette aberrante opération de communication. Tout en prétendant vouloir mettre fin aux pratiques de son père, redistribuer les ressources, Ali Bongo entretient un système totalement inégalitaire. Surtout, cet ancien défenseur du multipartisme a largement dépassé Omar Bongo dans la brutalité. Après les émeutes sans précédent causées par sa réélection à la présidence, en 2016, Ali Bongo a laissé tirer à balles réelles sur les manifestants. Bilan ? « Quatre pillards » abattus selon la présidence gabonaise. Un trentaine de morts selon l’opposition….

Ce qui semble changer ? Le Gabon actuel commence à délaisser la France, au profit de partenaires asiatiques. Après le pétrole, Ali Bongo mise sur l’huile de palme, et s’adjoint les service d’une entreprise de Singapour. Autres temps, autres mœurs. Par ailleurs, le souverain commence à vaciller sur son trône, dans un pays où la contestation gronde. Et le clan Bongo revient dans l’actualité, à travers de nouveaux rebondissements dans l’affaire des « biens mal acquis ». Peut-être le début de la fin de l’impunité…

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