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Nous allons payer notre dette pour booster notre économie (Régis Immongault)

Pour tout savoir sur le Plan de relance économique (PRE), la dette du Gabon et son règlement, le dernier prêt du FMI et son utilisation, la mise sous tutelle ou pas du Gabon par le FMI, la rédaction de Gabonactu.com a tendu son micro à Régis Immongault, ministre de l’Économie et de la prospective. Il a tout dit à cœur ouvert.

Gabonactu.com : Monsieur le ministre de façon pédagogique, comme un enseignant devant ses élèves, qu’est-ce que vous avez prévu dans ce Plan de relance économique ?

Régis Immogault : Le Plan de relance économique (PRE) permet au Gabon de pouvoir relancer l’activité économique. Je tiens à préciser que vous avez constaté qu’entre 2010 et 2014, la croissance était très forte au niveau du Gabon. Mais avec la chute brutale des cours du pétrole, nous avons assisté à une baisse de la croissance. En 2015 par exemple elle était de 3,9% et en 2016 de 2,1%.

Il fallait absolument que nous puissions voir à travers une stratégie, quel secteur pourrait être porteur de croissance et comment le faire à travers un renforcement de la viabilité budgétaire ?

Il est clair qu’à cause de la crise, nous avons eu plusieurs déséquilibres macroéconomiques. La balance de paiement est déficitaire. Le budget aussi est déficitaire. Donc il faut stabiliser le cadre macroéconomique. Avoir des finances publiques saines. Il faut viabiliser les finances publiques à travers une réduction des dépenses et une mobilisation des recettes. Pour le faire il faudrait avoir une politique qui consiste à rendre soutenable la dette publique. Il faudrait donc entamer certaines actions : accélérer les réformes structurelles qui consistent à donner plus d’oxygène à l’économie.

En quelques mots, ce plan de relance économique vise à donner encore plus de dimension à nos stratégies de diversification de notre économie. L’objectif est de ne plus être dépendant du secteur pétrolier.

Le prêt consenti par le FMI et celui prévu par la banque mondiale d’ici octobre prochain suffiront-ils pour financer ce plan de relance économique ?

L’initiative a été prise par le chef de l’Etat. Le premier ministre a donné des instructions aux différents membres du gouvernement et nous avons élaborés des stratégies sectorielles. Sur la base de cela, un document a été finalisé, je puis dire avant même que le chef de l’Etat puisse se retrouver le 23 décembre à Yaoundé pour discuter des politiques économiques et financières qui devraient permettre à la CEMAC de sortir de la période de turbulence.

Le Gabon pour mettre en œuvre ce plan de relance économique a demandé le soutien du Fonds monétaire international (FMI) à travers un mécanisme de recherche de crédit. Vous retenez l’aspect financement mis il n’y a pas que l’aspect financement, il y a l’aspect des reformes structurelles dans les différents secteurs pour oxygéner l’économie. De ce financement en effet, le fonds monétaire prévoit de décaisser une somme de 642 millions de dollars sur une période 3 ans.

En dehors du fonds monétaire international, il y a d’autres partenaires multilatéraux qui vont accompagner, bien sûr, le Gabon dans ce cadre de relance économique. Je précise que ces actions sont en relation avec les décisions prises par les chefs d’Etats le 23 décembre à Yaoundé qui consistaient à tout faire pour stopper l’érosion des réserves monétaire. Et pour le faire, il faudrait avoir absolument une économique qui fonctionne davantage. Pour cela, il faudrait absolument relancer le processus interne.

Voilà pourquoi dans le cadre de cette stratégie, le règlement de la dette intérieure est un élément considérable par ce qu’il faut relancer l’économie, il faudrait plus de création de valeur ajoutée au sein de l’économie, il faudrait encourager les secteurs porteurs de la croissance, il faudrait créer les marges de manœuvre budgétaire, il faudrait renforcer l’attractivité de l’économie gabonaise afin que là où l’Etat réduit son action, le secteur privé prend le relais.

C’est dans ce sens qu’on a eu récemment le haut conseil d’investissement. Donc ce programme du fonds monétaire c’est le soutien du programme de réformes économiques et financières du Gabon. Le FMI appui le PRE à travers l’expertise technique, à travers l’accompagnement financier. Ça c’est le FMI. La Banque mondiale (BM), la Banque africaine de développement BAD (Banque africaine de développement) et l’AFD (Agence française de développement, ndlr) participent au financement de ce programme.

D’une manière concrète, à quoi va effectivement servir cet argent ? C’est la question fondamentale que le peuple se pose.

Vous savez, dans le cadre du programme, on a bien définit de toutes les façons les équilibres macroéconomiques, les équilibres budgétaires. Vous avez des recettes, vous avez des financements qui arrivent, en face vous avez des dépenses et vous avez aussi les éléments des financements, des arriérés que nous avons. Donc cet argent va servir à la fois, pour relancer l’investissement au niveau du Gabon, payer ce que nous devons, donc apurer les arriérés à la fois des dettes intérieures et extérieures, permettre que l’économie gabonaise puisse redémarrer. Cet argent ce n’est pas pour soutenir le train de vie de l’Etat. Pas du tout. Ce n’est pour augmenter les salaires des fonctionnaires ou bien pour augmenter les salaires de certaines catégories. Pas du tout. Nous allons payer notre dette pour booster notre économie. Cela impulsera une meilleure fluidité des règlements en ce qui concerne les entreprises bien sûr. Ca nous permettra d’être crédibles dans nos engagements extérieurs. Donc c’est l’ensemble de cela qui permet de pouvoir soutenir absolument le programme que nous avons arrêté dans le cadre du PRE appuyé par le fonds monétaire international.

Je précise aussi, ça été dit lors de la conférence des chefs d’Etat à Yaoundé, la CEMAC connaissait une érosion des réserves monétaires. Plus nous avons une entrée des devises, plus s’améliore la position et la couverture extérieure de la monnaie. Le Gabon comme tous les autres pays de la CEMAC s’est inscrit dans cette dynamique.

Peut-on relancer l’économie en s’endettant ? Alors que la représentante sortante de la Banque mondiale au Gabon a dit qu’en 2016 la dette du Gabon a augmenté de 64 % si je ne me trompe pas.

Non, non ! Elle n’a pas dit que la dette a augmenté de 64%. Elle a dit que le ratio de la dette par rapport au PIB était de 64 %. C’est diffèrent. A ce propos on a écrit n’importe quoi. Vous avez un ratio de dette extérieure par rapport au PIB de 37% et un ratio de dette intérieure par rapport au PIB de 27%. Dans ces éléments de dette intérieure, nous avons intégrés les éléments qui n’y avaient pas avant : les avances consenties par la banque centrale aux états, remboursements de TVA, les instances du trésor, la dette déclarée par les entreprises… Tout cela a propulsé le ratio de la dette à 64% par rapport au PIB.

Est si on l’a fait c’est pour permettre d’abord d’être transparent, de renforcer la bonne gouvernance et trouver des solutions définitives en qui concerne le problème de la dette. Ça signifie que des efforts sont faits.

C’est vrai qu’on s’endette en partie pour payer ces dettes, mais vous savez qu’il y a des mécanismes. On s’endette pour payer la dette mais ce que nous payons en dette intérieure ça relance l’économie. Ça crée aussi les revenus et ça augmente aussi le PIB nominal parce que le ratio de la dette par rapport au PIB a aussi augmenté à cause de la baisse du PIB nominal. Donc tout cela permet absolument de pouvoir arriver à une situation de stabilité macroéconomique à travers une meilleure soutenabilité de la dette publique.

Je précise que le programme est soutenu par le FMI par ce que le Gabon est transparent. Le staff report sera publié sur le site du FMI et sur le site du ministère de l’économie afin de voir quels sont les tenants et les aboutissements de ce programme ?

J’ai entendu que le Gabon est sous-tutelle du FMI. C’est la rigolade. Absolument c’est la rigolade. Par ce que c’est incroyable. Les mêmes personnes qui disaient il n y a pas longtemps que le fonds monétaire international ne pourra pas soutenir le Gabon, il ne pourra pas approuver le programme par manque de rigueur et de transparence dans la gestion, ainsi de suite… Maintenant que le programme est approuvé c’est un autre discours : on est sous-tutelle. Quand le fonds monétaire approuve le plan de la Côte d’Ivoire, du Sénégal, ainsi de suite, oh voici des pays exemplaires ! Maintenant c’est le Gabon, on dit que le Gabon est sous tutelle. Il faut vraiment savoir ce qu’on veut.

Justement cette grosse critique, ce coup de massue est venu de votre propre camp. C’est votre propre Vice-Premier ministre, Bruno Ben Moubamba qui l’a dit

J’ai suivi. Je pense que vous avez suivi comme moi la réaction du gouvernement. Pour préciser les choses simplement, vous savez comme moi que la perception peut être différente mais sans qu’il y est dans le fond, du moins, une différence d’approche.

Donc le Gabon n’est pas sous tutelle?

Le Gabon n’est pas sous tutelle du FMI. Je vous dis vous allez regarder le programme arrêté avec le FMI et le programme de relance économique présenté par le Premier ministre. Le fonds monétaire s’est assis sur le programme de relance économique. Les reformes qui sont incluses dans le programme arrêté avec le FMI ce sont des reformes du PRE. Donc ça c’est une volonté du gouvernement gabonais dans ce sens.

Je précise qu’on n’a pas de choix. Il faut des reformes, il faut reformer l’économie. Il faudrait que nous puissions renforcer des marges de manœuvres budgétaires. Il faudrait que nous puissions créer une dynamique plus intensifiée au niveau du secteur hors pétrole. C’est cela. Aujourd’hui on n’a pas besoin du fonds monétaire pour se rendre compte que le problème de la masse salariale, est un problème majeur pour les finances publiques. On n’a pas besoin du FMI pour le savoir.

Dans le cadre du PRE ce sont des éléments qu’on a intégré. Et le Premier ministre comme le chef de l’Etat en permanence, ont signifié que nous n’allons baisser les salaires mais nous allons chercher à réduire la masse salariale. Parce qu’il faut la rendre compatible avec nos capacités financières, pour laisser un peu plus d’espace à l’investissement. Parce que le budget ce ne sont pas seulement les charges courantes. Il faudrait revoir la voilure en ce qui concerne le budget, en ce qui concerne les dépenses. Ce sont des éléments fondamentaux. Comme aussi il faut mobiliser les recettes. Voilà pourquoi des reformes que nous entreprenons. Nous avons annoncé la création de l’Office gabonais des recettes avant qu’on parle même avec le FMI. On va consacrer en fait la fusion entre la douane et les impôts. Parce que nous voulons capter davantage les revenus. Nous voulons étendre le tissu fiscal, étendre la base fiscale afin d’éviter vraiment que cette érosion fiscale puisse être permanente. Ce sont ces éléments qui sont au centre même de ce programme. Il faudrait qu’un secteur financier puisse fonctionner. Il faudrait voir comment peut-on financer les petites et moyennes entreprises. C’est l’ensemble de tout cela. Donc le faire signifie être sous tutelle du fonds monétaire international ? De grâce.

Gabonactu.com vous remercie

C’est moi.

Propos recueillis par Yves Laurent GOMA

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