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L’observation électorale européenne à l’épreuve de la singularité gabonaise (Cycle 1)

Riche d’une longue expérience de 23 ans, l’observation électorale européenne inaugurée en 1993 en Russie et déployée dans 65 pays, en Afrique, en Amérique, en Asie et en Europe, est éprouvée par le Gabon où elle est victime d’une tentative d’atteinte à sa réputation. Spécialiste du triangle Union européenne – Afrique – Chine, le Dr Séraphin Moundounga offre, à travers une série de tribunes libres, une grille de lecture de cette impasse en 4 cycles : 1 – Observation électorale européenne et conformité au droit international ; 2 – Domaines, règles et efficacité de l’observation électorale européenne ; 3 – Invitation et engagements des accords d’observation électorale ; 4 – Inapplication d’accords électoraux et atteintes au droit international.

Lorsque le dialogue politique et/ou les consultations ont lieu suite à l’observation électorale, le fondement juridique ou la légitimité internationale de ces procédures, initialement constitué par l’Accord de Cotonou, dont l’acquis est sauvegardé par les accords de partenariat économique (APE) et dans la Stratégie commune Afrique-UE, s’en trouve renforcé par des accords bilatéraux ad hoc, pris en application du Manuel d’observation électorale de l’UE et en conformité avec la Déclaration de principes onusiens pour l’observation internationale d’élections.

Adoptée au siège des Nations Unies à New-York, aux Etats-Unis d’Amérique, le 27 octobre 2005, la Déclaration en 24 points, assortie d’un Code de conduite à l’usage des observateurs internationaux, est le fruit de plusieurs années de concertation et d’échanges entre une vingtaine d’organisations gouvernementales et non gouvernementales, sur une initiative du National Democratic Institute for International Affairs (NDI) et la division de l’assistance électorale de l’ONU, en 2001.1

Pour la Déclaration, la promotion d’élections crédibles est un gage de paix (a) si les observateurs font preuve de rigueur, et que l’Etat hôte honore les garanties qu’elle offre. (b)

a-) La promotion d’élection crédible est un gage de paix.

Dans son préambule, en son premier paragraphe, la Déclaration stipule que des élections organisées de façon honnête et démocratique, sont le gage d’ « une expression de souveraineté qui appartient aux citoyens d’un pays ; l’autorité et la légitimité des pouvoirs publics reposent sur la volonté librement exprimée du peuple ».

En phase avec la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948 et le Pacte international relatif aux Droits civils et politiques de 1966, le droit de voter et le droit d’être élu sont reconnus par le même paragraphe, comme étant des droits fondamentaux ; avant d’ajouter : « Lorsqu’un gouvernement tire sa légitimité de telles élections, les risques d’alternative non démocratique sont réduits ». 2

Rappelant en son point 3 que : « La volonté du peuple est le fondement de l’autorité des pouvoirs publics »,3 la Déclaration ajoute en son point 1, que « Les élections honnêtes et démocratiques, fondamentales pour le maintien de la paix et de la stabilité, constituent le préalable à toute gouvernance démocratique ». 4

Instituée par la Déclaration, l’observation internationale d’élections est chargée d’évaluer la situation avant, pendant et après les élections, en étant un gage de la fiabilité du processus électoral et des résultats électoraux pour prévenir des conflits post-électoraux et renforcer la confiance des citoyens quant à leur pleine et entière prise en compte de leur volonté exprimée à l’occasion d’un scrutin.

Cette Déclaration de principes pour l’observation internationale d’élections, étant ouverte aux organisations internationales, inter-gouvernementales et non-gouvernementales, la Commission européenne et le Parlement européen en sont membres, de même que, sont aussi membres, l’Union africaine et l’Institut électoral d’Afrique australe (EISA).

Les autres membres sont notamment l’Union interparlementaire (UIP), le NDI, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), le Centre Carter, l’institut international pour la démocratie et l’assistance électorale (IDEA), le Réseau asiatique pour élections libres (ANFREL), l’organisation des Etats américains (OAS), le Pacific Islands, Australia and New Zealand Electoral Administrators Association (PIANZEA), le secrétariat du Commonwealth et l’ONU ; les uns et les autres étant tous tenus de mandater des Missions d’observation électorale (MOE) composés d’observateurs rigoureux ; l’Etat hôte étant tenu d’offrir un ensemble de garanties.

b -) Les exigences de rigueur incombant aux observateurs internationaux en contrepartie des garanties obligeant l’Etat hôte.

Les organisations membres de la Déclaration de principes pour l’observation internationale d’élections sont tenues à des exigences de rigueur intellectuelle et morale, qui doivent être respectées par les membres des Missions d’observation internationale d’élections, pour des nécessités de fiabilité et de crédibilité de leurs conclusions ainsi que pour la totale transparence de leurs actions et obtenir de l’Etat hôte qu’il applique les garanties auxquelles il s’est engagé.

À ce titre, le point 11 de la Déclaration interdit aux organisations qui en sont membres d’envoyer une mission d’observation internationale électorale dans un pays où « il apparaît probable que les conditions de la présence de cette mission serviront à légitimer un processus électoral clairement non démocratique ». 5

Si toutefois, une organisation intergouvernementale ou non- gouvernementale, partie à la Déclaration, décidait d’une mission d’observation électorale dans un pays où il y a une forte probabilité de processus électoral non-démocratique, de façon évidente, cette organisation est tenue, en application du point 11 de la Déclaration, de faire une communication préalable dans laquelle elle doit clairement dire « que sa présence ne légitime nullement le processus électoral ». 6

Le point 12 de la Déclaration en 24 points conditionne l’envoi d’une mission d’observation internationale d’élections, par une organisation partie, à une préalable invitation à adresser à cette organisation par les autorités du pays intéressé et exige de ce pays huit garanties.

La première garantie est « le libre accès de la mission d’observation à tous les stades du processus électoral et à tous les outils techniques du système électoral, y compris les outils électroniques, les systèmes de vérification du scrutin électronique et autres technologies ».7

Il est interdit à « la mission de conclure des accords de confidentialité ou de non-divulgation d’informations relatives à cette technologie ou au processus électoral ». 8

Le pays hôte est par ailleurs tenu de s’engager à ce que la mission d’observation internationale électorale peut certifier « que ces technologies ne sont pas acceptables ». 9

Le dernier paragraphe du point 12 ouvre droit à la signature, entre, d’une part, l’organisation invitée et, d’autre part, les pouvoirs publics du pays hôte et ses autorités électorales, d’accords intégrants ces garanties.

Pour accomplir de telles missions, les organisations parties à la Déclaration doivent, en application du point 20, désigner comme membres d’une mission d’observation internationale électorale, des personnalités ayant « des compétences politiques et professionnelles suffisamment diverses et posséder une réputation et des qualités d’intégrité éprouvées pour pouvoir observer et juger les processus et principes électoraux à la lumière de leurs connaissances en la matière ».10

Leurs connaissances doivent être étendues à leur maîtrise des « instruments internationaux relatifs aux Droits de l’Homme, le droit électoral comparé, les pratiques administratives (y compris l’utilisation de l’ordinateur et autres technologies électorales), les processus politiques comparés et la situation propre à chaque pays ». 11

Alors que le dernier paragraphe du point 21 relatif aux engagements pris par les organisations ayant souscrit à la Déclaration, oblige ces dernières d’exiger à tous les membres qu’elles désignent pour l’observation électorale, de s’imprégner du Code de conduite et de le respecter, l’engagement de chaque missionnaire pour le respect dudit Code de conduite en 12 règles, adopté en même temps que la Déclaration, doit être matérialisé par la signature, intuitu personæ, d’un acte d’engagement en 4 points suivants :

  • déclarer avoir lu et compris le Code de conduite ;
  • s’engager à faire « montre d’une stricte impartialité politique en toutes circonstances » ; 12
  • ne pas entraver le processus électoral et respecter la législation du pays ainsi que les autorités électorales et nationales ;
  • protéger « l’intégrité de la mission d’observation électorale internationale ». 13

    C’est dans ce cadrage général que les organisations intergouvernementales et les ONG parties à la Déclaration de principes pour l’observation internationale d’élections, déploient chacune, des missions d’observation électorale (MOE) dont les modalités spécifiques, d’organisation et de fonctionnement, peuvent être régies par des instruments ou supports juridiques internes, à l’image du Manuel de l’Union européenne pour l’observation électorale ; Manuel qui indique les domaines d’intervention et de règles strictes de déploiement d’observateurs européens électoraux. (Cycle 2 dans deux jours)

Ce lundi 13 Novembre 2018

Dr Séraphin Moundounga

___________________________________________

1 Déclaration de principes pour l’observation internationale d’élections et Code de conduite, cartercenter.org / consulté le 23/10/2017

2 Ibid

3 ibid

4 ibid

5 ibid

6 ibid

7 ibid

8 ibid

9 Ibid

10 Point 12 Déclaration de principes

11 Point 20 Déclaration de principes

12 ibid

13 ibid

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