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Présidentielle au Mali : le dépouillement a commencé, incidents dans le centre et le nord

Quelque 8 millions de Maliens étaient appelés à voter dimanche pour le premier tour de la présidentielle. Si le scrutin s’est bien déroulé dans le sud du pays, des incidents ont éclaté dans le centre et le nord.

« C’était une journée fatigante. Il y a eu de l’affluence toute la journée », confie Aminata Keïta, présidente d’un bureau de vote de Badalabougou, à Bamako. « Sur 482 inscrits, nous avons enregistré 215 votants », ajoute-t-elle. Une demi-heure avant la fermeture, des files d’attente étaient encore formées devant les bureaux de vote.

À Hamdalaye en revanche, toujours dans la capitale malienne, Seydou Diarra déplorait un niveau de participation très bas en début d’après-midi. « Sur 485 inscrits, nous n’avons encore reçu que 150 personnes », regrette le président de bureau, assisté de ses assesseurs sous le regard des délégués de la majorité et de l’opposition.

Le dépouillement a pu commencer dans la soirée comme prévu. Les premiers résultats officiels et le taux de participation devrait être disponible à partir de ce lundi. Habituellement, ce dernier ne dépasse pas les 50 % au Mali.

Dans l’ensemble le vote s’est déroulé dans le calme dans la capitale Bamako, et aucun incident majeur n’a été signalé par les observateurs. Au cours d’une conférence de presse, Bokary Treta, directeur de campagne de IBK, candidat à sa propre succession, s’est félicité du déroulement du scrutin « dans le calme et la sérénité sur toute l’étendue du territoire ».

Il a qualifié de « mineurs » les incidents qui ont éclaté dans le centre au cours de la journée. « Il y a quelques violences, mais elles ne remettent pas en cause le scrutin. Cette année, l’élection se déroule dans des communes où nous n’avions pas pu tenir de scrutin en 2016 », a-t-il estimé, tout en exhortant tous les acteurs à « accepter le verdict des urnes ».

« Rester vigilant »

À quelques centaines de mètres de là, au siège du QG de campagne de Soumaïla Cissé, chef de file de l’opposition, l’ambiance est tout autre. « Nous sommes en train de faire remonter toutes les informations concernant les incidents que nos délégués sur place ont pu observer. Nous avons aussi des huissiers sur le terrain. Il est très important de rester vigilants », explique Samba Moustapha Ba, membre de l’équipe de campagne.

Les observateurs de l’UE ont pour leur part demandé au gouvernement, une demi-heure avant la fermeture des bureaux de vote, la liste des bureaux où l’élection n’a pas pu se dérouler, et ce avant le début de la compilation des résultats. Ils rejoignent ainsi l’opposition qui avait fait de cette question une des principales préoccupations au cours des discussions de samedi avec le Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga.

AU TOTAL, CE SONT DONC 105 BUREAUX DE VOTE SUR 21 863 QUI N’ONT PAS PU OUVRIR

Finalement, le ministère malien de la Sécurité intérieure a annoncé, par la voix de Amadou Sangho son porte-parole, que plus de cent bureaux de vote n’ont pas pu être opérationnels, la majorité d’entre eux se situant dans les zones d’insécurité. Mais de son côté, le ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation annonçait via un communiqué que 644 bureaux au total (sur 21 863) n’avaient pas pu ouvrir suite à « des attaques à main armée et autres violences » (voir ci-dessous).

Le scrutin avait démarré dimanche à 8h, heure locale (10h, heure de Paris). Quelque 8 millions de Maliens étaient appelés aux urnes, dans les 23 041 bureaux de vote du pays (sans compter ceux de l’étranger), pour départager les 24 candidats en lice. Devant les bureaux de vote, à Bamako, des files d’électeurs impatients se sont formées dès les premières heures de la matinée, a constaté Jeune Afrique.

Ibrahim Boubacar Keïta, président sortant et candidat à un second mandat, a voté en début de matinée, vers 9h, à l’école AB du quartier de Sebenikoro. Il était accompagné d’une importante délégation, dont le Premier ministre.

Soumaïla Cissé, présenté comme le principal challenger d’IBK parmi les 23 candidats en lice face au président sortant, a pour sa part voté à Niafounké, dans la région de Tombouctou.

L’homme d’affaires Aliou Boubacar Diallo et l’ex-général passé à la politique, Moussa Sinko Coulibaly, ont pour leur part voté dans la matinée dans le même bureau de vote, à Bamako.

Selon West Africa Network for Peacebuilding (WANEP), à la mi-journée, « plusieurs localités sont sans opération de vote, notamment dans la région de Tombouctou ».

Dans les bureaux qui ont pu ouvrir, « très peu d’incidents ont été notés, sauf des cas mineurs et isolés de défaut de contrôle de la présence de l’électeur sur la liste du bureau de vote ; dispute entre président de BV et de mandataire de candidat », continue l’ONG, qui a déployé 300 observateurs sur le terrain.

Si les opérations de vote se déroulaient dans le calme et sous haute surveillance dans la capitale malienne, la situation était plus difficile dans le centre du pays, en particulier dans la région de Mopti où l’insécurité chronique a un impact direct sur le déroulement du scrutin.

Vote sous tension

La perspective d’une forte abstention est d’autant plus forte que la situation sécuritaire dans le centre et le nord du pays est délétère. Outre la menace terroriste, les conflits intercommunautaires dans le centre ont contribué à accentuer l’instabilité.

Samedi, à la veille du jour de vote, l’atmosphère était cependant à l’apaisement à Bamako, après plusieurs jours marqués par une polémique sur les listes électorales.

NOUS NE POUVONS PAS AVOIR D’ÉLECTION PARFAITE, MAIS DES ÉLECTIONS ACCEPTÉES DE TOUS

« Nous ne pouvons pas avoir d’élection parfaite, mais des élections acceptées de tous », a déclaré le Premier ministre, Soumeylou Boubèye Maïga, à l’issue d’une rencontre avec des candidats et des mandataires de candidats et les observateurs internationaux (Cedeao, UA, UE, OIF) également présents à cette rencontre.

Un accord trouvé la veille du vote

Après des échanges très tendus au départ, les différents acteurs sont parvenus à un accord sur plusieurs des craintes avancées par l’opposition.

Sur le premier point de discorde, concernant les doutes émis par l’opposition sur l’existence d’un fichier électoral « parallèle », un communiqué du Premier ministère assure que « le fichier électoral audité en avril 2018 par le comité d’audit comprenant des experts nationaux et internationaux est bien le fichier sur la base duquel tous les documents relatifs à l’élection présidentielle du 29 juillet ont été confectionnés, notamment les extraits de listes électorales et les cartes d’électeurs biométriques. C’est bien ce fichier qui a été mis en ligne à partir du 4 juillet 2018 ».

Vote par procuration

Autre point d’achoppement : les modalités de vote par procuration. En cause, une instruction du ministère de l’Administration territoriale et de la décentralisation qui permettait à un mandataire de voter par procuration, même s’il n’est pas inscrit dans ce même bureau. Une instruction contraire à la loi électorale qui avait déclenché la colère de l’opposition, craignant des tentatives de fraude. La rencontre de samedi a permis le retour aux dispositions de la loi électorale en vigueur.

Les autres points portaient sur « l’accès illimité des observateurs nationaux et internationaux à toutes les phases des opérations de vote et de centralisation des résultats et l’engagement du Gouvernement à prendre toutes les dispositions nécessaires pour le déroulement normal du scrutin sur l’ensemble du territoire national. »

Samedi après-midi, les candidats ou leurs mandataires ont également participé à la présentation de la matrice de saisie des résultats de l’élection, « afin de s’assurer de sa conformité avec la configuration des centres et bureaux de vote ».

« C’est la victoire du consensus et du dialogue. Maintenant nous veillerons à ce que les mesures décidées soient appliquées à la lettre », a confié à Jeune Afrique Nouhoum Sarr, conseiller spécial et porte-parole de Soumaïla Cissé.

Une requête de l’opposition reste cependant en suspens : celle portant sur la liste des bureaux de vote non contrôlés par les forces gouvernementales, dont l’opposition réclamaient une liste.

29 juillet 2018 à 10h28 | Par Aïssatou Diallo et Baba Ahmed – Envoyée spéciale à Bamako
Mis à jour le 30 juillet 2018 à 12h29

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