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Ma seconde pensée du jour : Invasion de l’Ukraine : guerre militaire, guerre psychologique ou guerre terroriste ? That is the question

La guerre en Ukraine apporte de nombreux enseignements, non seulement en matière martiale, mais aussi en matière de psychologie des combats et de psychologie des peuples.

Nous exclurons expressément de cette analyse les questions plus complexes relatives non seulement à l’intelligence et à la propagande militaires, mais aussi aux capacités cyber-numériques des nations, qui pourront faire l’objet d’une analyse future.

Dans le cadre des bombardements russes en Ukraine qui, à n’en point douter, prennent de plus en plus une nature aveugle, trois cas de figure se prêtent à l’observation :

HYPOTHÈSE 1 : La Russie ne disposerait pas encore, réellement, d’une armée et d’armes suffisamment technologiquement avancées lui permettant d’épargner les civils tout en s’attaquant de manière chirurgicale aux unités et dispositifs militaires de son adversaire. Il suffirait pour cela de voir les bombardements ratés d’aéroports et de systèmes anti-aériens jamais vraiment mis hors-jeu que les Ukrainiens, selon des sources militaires, continuent d’utiliser en toute impunité pour lancer des expéditions et ripostes punitives contre des avancées russes qui s’en retrouvent ainsi inhibées, de peur de perdre plus de jets pourtant réputés être parmi les plus sophistiqués au monde. L’on compterait aujourd’hui entre 184 et 353 tanks, 1091 et 1165 véhicules militaires, et près de 40 avions et 40 hélicoptères russes détruits par les Ukrainiens, sans oublier les 12000 soldats russes que le gouvernement ukrainien dit avoir tués. Les sources officielles américaines, quant à elles, parlent de 20% des forces russes en Ukraine perdues ou rendues inopérantes, ce qui inclurait plus de 6000 soldats russes tués et 15.000 blessés, depuis le début de la guerre. Or, 6000 tués et 15.000 blessés serait l’équivalent de plus de 21.000 soldats perdus ou mis hors d’état de nuire.

Au-delà de ces presqu’incroyables chiffres que l’on pourrait rejeter comme exagérés et propagandistes ou non au vu d’une guerre qui n’a commencé qu’il y a à peine deux semaines, une vérité reste assez inviolable, celle-là même qui voudrait que, dans le cadre de cette première hypothèse, l’on puisse conclure, sans trop de risque de se tromper, que la Russie ne soit encore aujourd’hui capable que de guerres conventionnelles brutales et aveugles, guerres qu’elle ne peut par ailleurs gagner que si elle déploie, sans retenue, toute sa capacité de tout raser et de tout écraser, à l’aveuglette, sans tenir compte des civils, comme elle l’a fait en Syrie où pratiquement toutes les villes bombardées n’existent plus que de nom. D’où la stratégie qui consisterait à causer la migration des Ukrainiens vers d’autres pays : des villes vidées de leurs populations sont plus facilement réduites en cendres que des villes où des cadavres carbonisés ou en décomposition joncheraient les rues, en témoignages macabres des inhumanités des envahisseurs.

Le fait même que la Russie n’ait pu, plus de deux semaines après son invasion, conquérir qu’une seule ville ukrainienne majeure – Kherson – et en soit maintenant à axer une partie de sa stratégie sur le soutien militaire de la Biélorussie ainsi que les 16.000 volontaires que Poutine compte désormais importer du Moyen-Orient, confirmerait, dans le cadre de cette hypothèse, l’incapacité qui, en date du 11 mars, semble avoir été la sienne de dominer totalement le ciel ukrainien. Or, sans domination totale du ciel, la Russie restera incapable de détruire rapidement, depuis les airs, les plus fortes positions défensives de l’Ukraine. C’est cette même incapacité de dominer totalement le ciel ukrainien qui a empêché et continuera d’empêcher ses débarquements aéroportés. La seule solution sera alors de bombarder et pilonner sans merci, sans relâche et à l’aveuglette, depuis les chars, l’artillerie et les batteries de missiles et de lance-roquettes, dans l’espoir de voir sortir des cendres et des décombres des villes ainsi pilonnées des soldats ukrainiens totalement dépassés, et mentalement vaincus.

Ceci ne veut aucunement dire que la Russie ne pourra pas gagner sa guerre en Ukraine. Ce que cette première hypothèse suppose, c’est qu’elle gagnera forcément, mais uniquement au prix d’une guerre brutale, aveugle et indiscriminée. Au vu de l’humiliation militaire que ces deux dernières semaines ont déjà constituées pour un Vladimir Poutine qui avait tout misé sur une guerre éclair de quelques jours qui aurait vu Volodymyr Zelensky et son armée se rendre, il est bien à craindre que l’étape suivante ne soit celle de l’annihilation totale et aveugle qui réduira en cendres de ciment non seulement la capitale ukrainienne, mais toutes les autres villes fortifiées que les Ukrainiens protègent encore actuellement avec leur sang. C’est de cette seule manière aveugle, indiscriminée et meurtrière que Poutine pourrait, en fin de compte, gagner, et gagner vite.

Ce ne sera donc pas de seulement les plus de 700 missiles balistiques et de croisière déjà lancés contre l’Ukraine que la Russie aura besoin pour vaincre. Il lui faudra, au moins, deux à trois fois cette quantité, ce qui veut dire qu’elle devra, a minima, déployer un arsenal de près de 2000 missiles balistiques et de croisière qui ne laisseront derrière que des cendres et des sorties massives de bombardiers qui rappelleront les escadrons allemands et alliés qui ont survolé les ciels des capitales d’Europe lors de la Seconde Guerre Mondiale, pour y semer la mort et la désolation.

HYPOTHÈSE 2 : La Russie disposerait de technologies militaires avancées lui permettant des frappes chirurgicales, mais aurait délibérément choisi de bombarder à l’aveuglette les villes et les civils en Ukraine, dans le seul but de terroriser les populations et concomitamment le gouvernement ukrainien, aux fins de les pousser à la reddition. Par effet de déduction logique, une telle approche supposerait que toute forme de résistance qui prolongerait cette guerre ne laisserait aucune autre option à la Russie que celle qui consisterait à tout raser, tout écraser, pour gagner la guerre, et plus les Ukrainiens résisteront, plus l’Ukraine cessera d’exister, avec le potentiel, au passage, de voir s’exiler près de la moitié de ses 44 millions d’habitants, surtout si le rythme actuel d’un million de réfugiés par semaine en moyenne se maintient. L’on voit même déjà des estimations officielles parlant d’un potentiel de 13 à 15 millions de personnes devant quitter l’Ukraine dans les semaines qui viennent si les bombardements aveugles continuent. Nous aurions donc là, dans le cadre de cette deuxième hypothèse, non plus la recette d’une guerre militaire qui, de nos jours, se voudrait intelligente, mais bel et bien celle d’une guerre terroriste que Poutine aurait sciemment voulue terroriste, aux fins de prouver la puissance destructrice de son armée et, ainsi, terroriser et dissuader, de manière préventive, les pays de l’ancienne sphère soviétique, comme la Géorgie, qui seraient tentés, demain, de le défier en parlant encore d’entrer, eux aussi, dans l’Union européenne et/ou l’OTAN.

HYPOTHÈSE 3 : Une combinaison des deux premières hypothèses.

Dans les trois cas, la conséquence serait la même : l’incapacité technologique et/ou la volonté délibérée de Poutine de terroriser les populations mèneraient et ont déjà mené à des drames humains que personne ne devrait jamais souhaiter à un autre pays, quelles qu’en soient les raisons, mais drames humains tout de même qui sortent immédiatement de la sphère de ce que l’on aurait pu appeler « guerre psychologique », pour retomber, automatiquement, dans le domaine de ce que l’on devra appeler « guerre terroriste ».

 

A man walks in front of a destroyed building after a Russian missile attack in the town of Vasylkiv, near Kyiv, on February 27, 2022. – Ukraine’s foreign minister said on February 27, that Kyiv would not buckle at talks with Russia over its invasion, accusing President Vladimir Putin of seeking to increase « pressure » by ordering his nuclear forces on high alert. (Photo by Dimitar DILKOFF / AFP) (Photo by DIMITAR DILKOFF/AFP via Getty Images)

Mais c’est aussi dans cette dernière observation que se trouverait le paradoxe de la supposée puissance militaire russe : en faisant le choix d’une guerre terroriste, la Russie de Poutine se sera exposée, en réalité, à des analyses concluant à son incapacité de conduire, puis de gagner, une guerre intelligente avec les moyens modernes d’une technologie militaire moderne qui donnerait l’image d’une armée moderne et modernisée. La Russie aura ainsi révélé malgré elle que, en réalité, très peu de son armée est modernisée et la plupart de ses capacités conventionnelles parfois citées dans les statistiques sont vétustes et dateraient, en réalité, de l’ère soviétique.

A l’observation, donc, bon nombre d’analystes seront bien obligés – surtout au vu de ce qui s’est jusque-là révélé comme capacités militaires conventionnelles réelles, et donc quelque peu déplorables et moyenâgeuses de la Russie – de conclure que la Russie, une fois qu’on lui a retiré sa capacité nucléaire héritée en majeure partie de l’URSS, reste, en réalité, une puissance militaire moyenne qui ne peut gagner que des guerres conventionnelles brutales et aveugles par lesquelles elle déverserait sur l’adversaire tout son arsenal de bombes aveugles à l’aveuglette, comme ce fut le cas lors de la Seconde Guerre Mondiale, guerre qui fut essentiellement une guerre terroriste par laquelle la victoire se mesura à combien de villes chacun des camps pouvait raser de la carte du monde. On connaît le bilan : 70 à 85 millions de morts. A cause de l’égo d’un homme, Adolf Hitler.

C’est à ce même type de guerres sauvages que, pour soumettre le Japon, l’Amérique se livra lorsqu’elle jeta par deux fois la bombe atomique sur le Japon en 1945, parce qu’elle savait que c’était de cette seule manière qu’elle assurerait la reddition rapide du Japon. Mais, au passage, ces deux seules bombes tuèrent immédiatement, au moins, 80.000 personnes à Hiroshima et 40.000 personnes à Nagasaki, certaines estimations allant même jusqu’à établir ce crime atomique à près de 230.000 morts instantanées ou immédiates, au total. Nous ne parlerons même pas de l’usage extensif du napalm par les Américains dans des guerres comme celles du Vietnam et de Corée, ce qui, dans ces cas-là, montra les limites de la puissance militaire américaine des années 1950-1970.

Mais la guerre est facile à gagner quand on est seul à pouvoir atteindre l’autre, à pouvoir envahir l’autre, sans que l’autre, qui de surcroit est petit et désarmé, ne puisse vous donner la réplique pour mesurer, en retour, votre capacité de recevoir des coups. Il est ainsi surprenant de voir les soutiens africains de Poutine survoler et, donc, occulter les drames humains en Ukraine pour accorder à Vladimir Poutine, par un cruel jeu des équivalences, un blanc-seing l’autorisant à raser tout un pays parce que, bizarrement, d’autres puissances militaires l’ont fait ailleurs, dans le passé.

Alors que les leçons les plus rationnelles à tirer des souffrances des peuples qui, comme nous en Afrique, furent et sont encore victimes de l’impérialisme devraient nous pousser à adopter la position du « plus jamais ça », ceux des Africains qui admirent Poutine aujourd’hui parce qu’il serait un « homme fort » qui serait en train d’« embêter l’Occident » ne se rendent même pas compte du fait que leurs encouragements basés sur les justifications égocentrées de Poutine veulent dire, en contrepartie, qu’ils acceptent les principes génocidaires qui se cachent derrière tout élan impérialiste, surtout quand celui-ci se présente sous des formes militaires invasives, comme on peut le voir actuellement en Ukraine ou dans les territoires occupés par Israël.

Autrement dit, si nous suivons la logique de ce jeu des équivalences, les Israéliens devraient eux aussi pouvoir se sentir à l’aise aujourd’hui pour justifier, comme la Russie en Ukraine, les meurtrissures imposées aux Palestiniens parce que, comme pour les Russes en Ukraine, ces actes relèveraient de leur sécurité, eux qui côtoient chaque jour ce qu’ils appellent les terroristes arabes et leurs attentats-suicides. Et demain, la France pourra faire la même chose au Mali. Nous parlons bien là de justifier ad infinitum un cycle interminable d’inhumanités qui pourrait même faire que, demain, en Afrique même, ceux qu’on appelait Tutsis, pour retrouver confort moral, décidassent eux aussi d’exterminer d’abord à la machette 500 à 800.000 Hutus, avant que de trouver toute forme de réconciliation acceptable. Sur la base de ce jeu des équivalences, ils ne devraient jamais être accusés de génocide puisque les Hutus l’avaient fait avant eux. Ce ne serait en fait là que juste vengeance, selon cette logique. Les esprits logiques trouveront donc ce type d’équivalences non seulement fallacieuses, mais aussi dangereuses.

La Russie gagnera sans doute cette guerre contre l’Ukraine. Mais au passage, aux yeux de ses rivaux occidentaux tout comme de ses autres rivaux potentiels que sont la Chine, l’Inde ou même le Pakistan, elle aura perdu de son aura de superpuissance militaire. Les autres puissances militaires se disent déjà avec jubilation que la Russie ne semble pas encore suffisamment jouir des capacités technologiques et logistiques qui permettront aux vraies superpuissances militaires de demain de gagner les guerres intelligentes de demain. Et l’on voit ici et là des généraux américains, français, britanniques, chinois, indiens et autres se moquer, déjà, de ce qu’ils décrivent comme la surprenante inaptitude logistique, stratégique et technologique de l’armée russe en Ukraine.

La force militaire de la Russie, tout le monde l’a désormais compris, se trouverait limitée, uniquement, à ses capacités de dissuasion nucléaire héritées de la défunte URSS. Son armée, quant à elle, ne semble pas encore capable de véritablement faire le poids dans les guerres intelligentes d’aujourd’hui. La Russie de Poutine ne pourra donc, logiquement, gagner en Ukraine qu’en rasant tout, avec des méthodes similaires à celles de la Seconde Guerre Mondiale, où l’on ne gagnait qu’en bombardant tout, aveuglément et à l’aveuglette, dans l’espoir de terroriser des populations dont les meurtrissures, à terme, pouvaient forcer l’adversaire à la reddition. C’est soit cela, soit accepter une défaite humiliante aux mains d’un petit voisin qui aura révélé au monde la véritable nature – moyenâgeuse – des capacités militaires conventionnelles russes. Poutine choisira donc d’exterminer, pour gagner, et pour sauver la face. Il n’aura aucun autre choix, s’étant lui-même enfoncé jusqu’au cou dans les sables mouvants d’une guerre d’égo qu’il a spectaculairement improvisée.

Il est juste quelque peu dommage que ce soit le peuple ukrainien qui, pour défendre sa souveraineté et son droit le plus absolu à l’autodétermination, en soit aujourd’hui à souffrir des rivalités impérialistes d’un autre âge où, enfermé dans les réflexes de la Guerre Froide et la nostalgie de l’empire perdu, Vladimir Poutine croit encore que, en cette ère de mondialisation où les superpuissances se construisent primordialement sur base de dynamisme économique, les guerres de demain seront des guerres de puissance militaire où il suffira d’envahir un petit voisin désarmé pour prouver, par le moyen d’une guerre terroriste, que l’on est une superpuissance.

Dr. Daniel Mengara, Président du mouvement « Bongo Doit Partir – Modwoam »

Pr Daniel Mengara
Président, Bongo Doit Partir-Modwoam

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