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Mariages: vers une année record au Gabon (REPORTAGE)

L’année 2011 se présente au Gabon comme celle de tous les records au niveau des mariages tant coutumiers que civils à la lumière du nombre croissant des célébrations observées depuis mai dernier à travers le territoire national.

Jeudi, 13 aout, la matinée s’annonce ensoleillée. Dans les jardins de l’Hôtel de ville de Libreville, des hôtesses moulées dans des jupes uniformisées accueillent les invités et peaufinent le scénario de l’arrivée des futurs mariés.

Dans le parking, des dizaines de véhicules de toutes marques et des bus, décorés de ruban blanc, rose ou bleu, prennent position.

A l’intérieur de la salle des fêtes, plusieurs femmes se distinguent par leur coiffure des grands jours, relevés par des chapeaux. A leur côté, les époux, eux-aussi endimanchés, échangent de chaudes poignées de main.

La cérémonie commence devant les témoins des conjoints et une assistance qui applaudit inlassablement après le  »oui » prononcé par les jeunes mariés.

La veille, tradition oblige, le couple avait reçu l’onction des deux familles lors d’un mariage coutumier, de plus en plus célébré, à travers le pays.

GENS DE TOUS LES MILIEUX

Des gens de tous âges, de toutes conditions, de tous les milieux et de plusieurs nationalités adoptent ce rituel.

Mais, cette année, selon les témoignages, il est susceptible que l’on s’achemine vers une cuvée exceptionnelle. Les deux formes d’union, légale ou traditionnelle, suscitent un réel engouement.

Devant un tableau où s’affichent les bans, Marcellin B, employé municipal, avoue que la liste est loin d’être exhaustive.

 »De nombreuses personnes en particulier des jeunes ont déjà manifesté leur désir de s’unir légalement ici. Nous célébrons parfois une dizaine de mariage, par jour’’, avec des pics, le vendredi, informe-t-il.

Phénomène visible dans les rues embouteillées de Libreville où circulent des cortèges nuptiaux très bruyants, sous escorte de la police.

 » Le mariage reprend ses droits dans nos familles qui devenaient dangereusement monoparentales », se réjouit Angèle, enseignante retraitée, bien instruite sur  »ce mouvement » dont elle dit qu’il est  » une chance pour la société ».

MARIAGE, FONDEMENT DE LA FAMILLE

 » Aujourd’hui, ne laissons pas les jeunes filles et garçons dans les bas-fonds et les marécages alors qu’il faudrait oser leur proposer les sommets. Éduquer, c’est tirer vers le haut. Et non vers le bas. C’est pour vous dire que nous parents, nous devons expliquer à nos enfants le sens du mariage et notamment son caractère sacré, fondement de la famille », a-t- elle poursuivi.

Marguerite, veuve, mère de 5 enfants, secrètement déchirée par la séparation récente d’un être bien-aimé, parle, elle, en femme plus avertie:  » je ne suis pas gênée à l’idée de me remarier, c’est une quête permanente. J’y ai trouvé le bonheur ».

Au terme de 30 ans de vie commune, Norbert et Jeanne, choisissent de donner une forme légale à leur relation en présence de leurs enfants et petits-enfants, en admiration devant leur mamy et papy.

Le brave homme qui parle longuement et avec beaucoup d’affection se présente chez le Maire pour la  » consécration juridique d’un rêve très ancien » de sa relation conjugale demeurée depuis des lustres au stade du concubinage.

« Je me suis décidé après moult menaces de ma belle famille qui ne supportait plus de nous voir ainsi. C’était maintenant ou jamais », reconnait –il.

 » Ah la saison sèche ! Elle nous fait vivre des moments agréables. Cette période est propice aux mariages coutumiers, occasion des retrouvailles, d’agapes et de culture », se délecte Joseph M, fonctionnaire, en vacances à Ntoum, à une cinquantaine de kilomètres de la capitale gabonaise.

Lui qui s’émerveille devant le  »retour en force » de ses compatriotes aux valeurs traditionnelles, estime que ce regain d’intérêt découle de l’importance donnée par les plus hautes autorités au mariage coutumier qui devrait être légalisé et mieux encadré.

La revalorisation attendue de cette forme d’union ravit, Marie-Édith S., un peu plus de la vingtaine. Resplendissante de beauté, parée de pagne et foulard, elle s’apprête à recevoir, à Okala, quartier du 1er arrondissement de Libreville, la  »bénédiction » de son oncle avant de pouvoir, selon les us et coutumes, prendre place aux cotés de son partenaire.

Auparavant, des orateurs, maniant la rhétorique, se livraient à des débats entrecoupés de conciliabules, de paiement de pénalités pour retard, absence d’un symbole fort …

L’un des grands moments demeure, sans conteste, la remise de la dot, sorte de présent, au montant varié, sous le regard des familles des conjoints, amis et connaissances.

Des objets tels que la lime doivent figurer sur la liste déclinée les parents de la future mariée.

 » Chez les Fangs du nord du Gabon, nous faisons la différence entre les limes. A un mariage coutumier, il est impératif de présenter une lime dont la durée de vie est de 10 ans. Elle doit être de couleur grise, plus résistante pour les travaux champêtres. C’est une manière d’honorer sa belle-famille », éclaire Gervais, gérant d’un libre-service où se sont écoulés des produits (tissu, boisson, machette…) incontournables dans un mariage à la coutume.

RETOMBEES ECONOMIQUES

Dans cet exercice, chacun y trouve son compte. Les retombées économiques sont réelles.

Des tailleurs reçoivent, par vagues, des commandes au point d’en être débordés. Des traiteurs livrent des repas dans la limite des commandes. Les structures spécialisées dans la sonorisation font également recette. Les plus sollicitées sont celles qui louent chaises et tentes (VIP ou standards).

A noter que les meilleurs artistes et autres humoristes s’arrachent à prix d’or afin d’agrémenter la fête.

Toutefois, derrière ces images se cache une autre réalité.

 »Nombre de mariages sont conclus sans représentants de famille’’, révèle Lydie.

« Une amie s’est récemment mariée, à Libreville, à l’insu de sa famille. Il y avait tout juste 4 personnes devant l’officier d’État-Civil. Et, cette pratique est courante », soutient-elle.

RENCONTRE SUR FACE-BOOK

Mademoiselle Lydie rapporte que sa copine a épousé un européen après des échanges réguliers sur Face-Book. Un an plus tard, ce dernier débarque au Gabon pour les formalités de mariage… et hop, les deux tourtereaux mettent le cap sur l’Europe.

Sacrilège ! S’écrit, Harouna M, commerçant nigérien qui condamne, avec véhémence, le geste de celle ayant convolé en noces, à huis-clos, sans les siens.

 » Même si Internet nous apprend à vivre avec notre temps » et  »avoir des idées larges’’, il y a des  »lignes à ne pas franchir », s’irrite son compatriote Moussa T.

Comment éviter autant de souffrance et de torture morale, devenues des réalités ordinaires aux parents?

Un chercheur suggère que  »si, dans la vie quotidienne, les adultes sont pleins de bon sens et pleins de légitime attention, les pouvoirs publics devraient favoriser leur accès à la radio et télévision notamment pour des interventions et conseils.

Il part d’un constat:  » Les questions et les éclairages des parents sont rares dans les médias. Ils abandonnent souvent leur légitime esprit critique et leur capacité de discernement à des gens qui pensent pour eux et sont plus savant qu’eux ».

Une adresse également en direction des mouvements associatifs aussi bien laïcs que chrétiens ou musulmans aux fins de sensibiliser sur le mariage au moment où cette institution reprend du poil de la bête.

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