Pluies, inondations, dégâts et constructions anarchiques

Dans la soirée de lundi 4 juin 2012 et jusque tard dans la nuit, les Librevillois ont assisté à une pluie diluvienne qui a déclenché des inondations dans plusieurs quartiers de la ville. Cela est venu mettre en exergue le problème récurrent des constructions anarchiques, de la viabilisation des parcelles et des bassins versant, ainsi que le rôle de la mairie dans les opérations de salubrité.

Si certaines personnes se sont réveillées dans la nuit, surprises par la montée des eaux qui ont parfois atteint 1,5 m de hauteurs et noyé leur matelas, d’autres par contre n’ont remarqué qu’au réveil qu’il y a eu ce qu’un vieillard du quartier Petit-Paris, dans le troisième arrondissement, a qualifié de «déluge».

Dans ce quartier populaire, en effet, le canal qui oriente et draine les eaux usées, ainsi qu’une rivière née d’un marécage dans le coin, est bouché par des débris de toutes sortes en provenance des habitations environnantes, mais surtout du grand marché Mont-Bouët. Obstrué depuis des années, il n’offre aucune opportunité aux eaux de pluie de circuler correctement. Ainsi, ce matin, une descente sur le terrain a permis de constater le désastre.

Des matelas, des téléviseurs désormais en panne, des congélateurs et réfrigérateurs sortis des maisons, les habits et tous les mobiliers des maisons de ce quartier sous-intégré de Libreville prenaient un brin de soleil. Les propriétaires eux, s’activaient encore à éponger le reste des eaux qu’ils ont commencé à vider dans la nuit.

«Depuis 30 ans que je vis à Petit Paris, c’est la première fois que je vois une pluie d’une telle envergure. J’ai perdu tout dans ma maison, regardez vous-même», a présenté Dia Abdoulaye, aux reporters de Gabonreview. Lui qui avait la quasi-totalité de ses biens posée sur des meubles bas n’a eu que ses yeux pour pleurer.

Si lui, l’un des notables et la plupart des habitants indexent le canal qui n’arrive pas à être aménagé par les autorités, il n’en demeure pas moins que le constat sur le terrain laisse penser que les constructions anarchiques y sont également pour beaucoup.

«J’ai perdu mon congélateur, ma télévision, mon nouveau fauteuil que je venais d’acheter. Mon mari et moi, nous sommes retraités. Qui va nous rembourser tout cela? On a même envoyé nos petits enfants chez leur tante à Nzeng-Ayong. Lorsque c’est l’élection, tout le monde vient ici nous promettre qu’on va arranger le canal. Mais après l’élection on nous oublie. C’est pour ça que j’appelle le président Ali Bongo qu’il vienne lui-même voir les conditions dans lesquelles vivent les Gabonais. Qu’il vient lui-même voir et trouve des solutions à ce problème», déclare Denise Diengou, une femme d’un âge mur, à la retraite avec son époux.

Derrière la maison de dame Ditengou, une grand-mère dont les petits enfants sont à sa charge, avait encore les pieds dans l’eau, tandis que tous ces bambins, âgés de 8 mois à 12 ans, trônaient sur une petite table dans le coin. La force manquait désormais pour continuer la vidange des eaux.

La maison de cette grand-mère a reçu toutes les eaux venant de l’amont et en particulier de ceux qui ont construit un peu plus haut, empêchant l’écoulement naturel et concentrant les torrents d’eau dans les espaces laissés libres. D’où la question des constructions anarchiques.

Dans ces quartiers qui ont été gravement touchés par ces inondations (Plein –Ciel, Petit Paris, Baie des cochons, Sorbone, Nkembo…), l’autre dénominateur commun reste l’occupation anarchique de l’espace urbain et l’absence d’une bonne politique d’urbanisation.

Des câbles d’électricité traînent à même le sol, tout comme des conduites d’eau potable. Une maison est en même temps la limite et le début d’une autre bâtisse voisine. Ici, aucune route praticable, juste des pistes serpentant, promiscuité absolue, sans aucune notion d’hygiène véritable, les eaux usées et autres étant directement déversées dans la nature.

«Il faut que le chef de l’État pense à ce quartier. Il faut qu’il arrange ce canal. J’ai le titre foncier de mon terrain et c’est ce qui m’empêche de quitter. Je suis vieux et à la retraite. Si je quitte je vais vivre où ? Il faut que le président de la République puisse voir ce problème», lance un notable local, Jean Pierre Mandaka.

La forte pluie qui s’est abattue sur Libreville a causé des dégâts dans presque tous les quartiers, même si c’est à des degrés divers. En cela, c’est toute la politique d’urbanisation de la capitale qui est mise en cause. Les autorités, comme le souhaitent tous les habitants et victimes des inondations rencontrés, doivent tout mettre en œuvre pour que l’émergence, tant vantée et promise, du pays passe par là.

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