Trois jours à peine après sa prise de service au sein de l’Union du peuple gabonais (UPG), le nouveau secrétaire politique de ce parti d’opposition, Bruno Ben Moubamba, a décidé d’entamer une grève de la faim à durée indéterminée, le 18 avril 2013 à Ndendé, bastion politique de Pierre Mamboundou où il séjourne depuis le 15 avril dernier.
Ben Moubamba durant sa première grève de la faim en 2009. © moubamba.com.
Joint au téléphone par Gabonreview, le nouveau membre «actif» de l’UPG, rentré définitivement au Gabon pour poursuivre le combat politique qu’il a entamé depuis la dernière élection présidentielle anticipée de 2009, a livré, dans une courte interview, les mobiles de sa nouvelle grève de la faim qu’il interdit de voir comme un besoin de faire le buzz, de créer un évènement médiatique.
Gabonreview : Pourquoi avoir choisi d’entrer en grève de la faim illimitée à Ndendé, si loin du dispositif médiatique de Libreville ?
Bruno Ben Moubamba : Le but de ma grève de la faim n’est pas de faire le buzz, encore moins de créer un évènement médiatique. Le but est d’abord de poser un acte correspondant à des convictions profondes qui sont simplement que le Gabon est dans une situation dans laquelle tous ses enfants devront faire quelque chose pour qu’il y ait un changement fondamental. Nul besoin d’être dans le spectaculaire.
Quelles causes voulez-vous défendre à travers cette deuxième grève de la faim de votre parcours politique ?
Les causes que je défends à travers ma grève de la faim qui, je le précise, est illimitée, sont au nombre de trois. D’abord favoriser le «renouveau» de l’UPG au cœur de l’opposition gabonaise. Pour nous membres de l’Union du peuple gabonais, ça commence d’abord par le rassemblement sincère et dans l’unité des militants qui ont été perturbés par la mort de l’opposant historique, le président Pierre Mamboundou.
Bruno Ben Moubamba à Ndendé, en juillet 2012. © moubamba.com
Ensuite, demander que la Cour des comptes et la commission des finances de l’Assemblée nationale se prononcent sur l’achat de consciences à Ndendé avec l’argent de l’État gabonais. Il est nécessaire de le faire ici parce que c’est un symbole. Il faut dénoncer, près du terrain, le symbole même de l’utilisation de l’argent de l’Etat au service de fonctionnaires ou d’intérêts privés qui ont des ambitions politiques et qui s’en servent pour acheter les consciences et retarder l’évolution des populations, les maintenir dans la mendicité. Il est temps que cela cesse.
Et enfin, dénoncer les crimes rituels, la stagnation de l’État et appeler au sursaut national pour le bien-être des Gabonais. Il y a là, une nécessité de le faire ici même à Ndendé parce que le Gabon ce n’est pas que Libreville, c’est neuf provinces, d’où tout l’intérêt de cet acte de la grève de la faim pour dénoncer tous les crimes rituels. J’ai quitté la France pour m’installer définitivement au Gabon et je compte bien utiliser mes valeurs et mes convictions pour faire progresser le Gabon à partir de l’UPG qui sera à nouveau et désormais au cœur de l’opposition. Et Ndendé est un lieu symbolique pour les Upégistes et pour le pays.
On pourrait aussi penser qu’une grève de la faim est quelque chose de très personnel, une expérience, voir une plongée en soi-même. Quel impact escomptez-vous donc de ce geste dans lequel vous vous faites encore violence ?
Ne négligez jamais l’esprit de sacrifice personnel, le Gabon n’a pas besoin des gens qui ne pensent qu’à s’enrichir et à servir leurs propres intérêts. Le Gabon a besoin maintenant d’une génération d’acteurs capables de se sacrifier pour le bien-être du peuple. Voilà pourquoi je suis ici à Ndendé, au plus près des populations. Il faut penser au pays profond, il ne faut pas réduire la population gabonaise tout simplement à Libreville. Le Gabon, je le répète, c’est neuf provinces indivisibles. Moi je pense à ces personnes qui n’ont pas fait l’école, à ces mamans et grands-parents qui triment dans les champs. Ils ont été oubliés, méprisés, il est temps qu’on pense à eux sans leur apporter des cuisses de poulets ou des dons absolument ridicules. Il est temps de donner de la dignité au peuple gabonais.
Depuis 2009 je suis dans un combat de long terme, ce n’est pas du spectacle, je suis dans une trajectoire qui est toujours logique avec elle-même pour faire évoluer le pays pour l’honneur et pour l’histoire. Ces thèmes peuvent être abstraits mais, pour moi, ils voudraient dire qu’un nouvel espoir est possible au Gabon.



