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Sommet de Nice: Nicolas Sarkozy veut tourner la page de la Françafrique (Par Philippe Bernard)

La « photo de famille » ne ressemble pas à celle des précédentes grand-messes franco-africaines; pour clore son premier sommet du genre, devant la presse, mardi 1er juin à Nice, Nicolas Sarkozy a choisi de s’entourer de trois chefs d’Etat dont un seul, le Camerounais Paul Biya, est francophone, rapporte le Monde .fr.

Le message était clair: le président français, en s’affichant aux côtés de Jacob Zuma, président de l’Afrique du Sud, locomotive du continent, de Meles Zenawi, premier ministre d’Ethiopie (10 % de croissance par an) et de Bingu wa Mutharika, chef du petit Malawi mais surtout président de l’Union africaine, a voulu signifier que désormais « la France parle à toute l’Afrique » et pas seulement à ses anciennes colonies.

« Nous sommes tous des amis », a martelé le président, multipliant flatteries et promesses. « Sur l’échec de l’Afrique se construira le désastre de l’Europe et sur le succès de l’Afrique se construira la croissance, la stabilité et le succès de l’Europe », a-t-il lancé. En perte de vitesse sur le continent, la France souhaite reconquérir un rôle de leader diplomatique et pousser ses entreprises, notamment face à la concurrence chinoise.

« TOURNER LA PAGE D’UNE RELATION COMPLEXE ET COMPLEXÉE »

« Les raisons de travailler avec vous ne sont simplement liées à l’histoire, mais aussi à l’avenir », a déclaré M. Sarkozy, soucieux de « tourner la page d’une relation complexe et complexée ». Se disant « très sensible » à la présence du président algérien, Abdelaziz Bouteflika, et désireux de démentir l’existence d’un froid entre les deux pays, le chef de l’Etat a affirmé qu' »il faudrait du temps », et un travail libre des historiens, pour apaiser la relation franco-algérienne.

M. Sarkozy a annoncé qu’il allait « se battre » pour remédier à l’absence de représentant du continent au Conseil de sécurité de l’ONU, absence qu’il a qualifiée d' »anomalie ». Mais son projet de créer une nouvelle catégorie de représentants des Etats désignés pour une période limitée et dépourvus du droit de veto est loin de faire l’unanimité parmi les responsables africains, qui ont néanmoins promis de l’étudier. La promesse d' »assurer une plus large représentation des Etats africains » à l’occasion de la prochaine présidence française du G20 a été faite.

A propos de la lutte contre le changement climatique, Nicolas Sarkozy a réaffirmé que les engagements – incertains – des pays industrialisés à verser 30 milliards de dollars d’ici à 2012 pour aider les pays africains à s’adapter seraient « scrupuleusement tenus ». Le sommet s’est accordé sur « la nécessité de créer un système de financement à long terme » permettant d’atteindre un financement de 100 milliards de dollars par an à partir de 2020, indique la déclaration finale. « Nous voulons que le président Sarkozy soit notre avocat dans ce domaine », a déclaré le premier ministre éthiopien, Meles Zenawi, négociateur en chef du continent sur le climat, tandis que le président sud-africain, Jacob Zuma, qualifiait le sommet de « très utile ».

LE PATRONS CONVIÉS, LA SOCIÉTÉ CIVILE OUBLIÉE

Le dernier volet de l’opération de séduction française concerne les entreprises. Désireuses d’afficher leur différence et leur moralité, les organisations patronales françaises ont adopté une charte visant à affirmer leurs exigences sociales et environnementales et à bannir la corruption. Mais aucun mécanisme de contrôle de ces engagements ne semble prévu. « Les entreprises veulent s’inscrire au cœur d’une nouvelle relation avec l’Afrique », a déclaré Laurence Parisot, présidente du Medef.

Le sommet de Nice a permis à Nicolas Sarkozy de sortir du débat empoisonné sur le soutien de la France à des régimes corrompus ou mal élus, et sur la persistance de filières parallèles d’influence dans les anciennes colonies. Mais les dossiers de la présence africaine dans les enceintes internationales et du climat, s’ils constituent des importants leviers d’influence, n’ont guère de conséquence immédiate sur les populations africaines souvent réduites à la survie. Alors que le patronat africain avait été convié à Nice, la société civile, principal vecteur de lutte pour l’amélioration des conditions de vie et la défense des libertés, elle, y brillait par son absence.

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