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Côte d’Ivoire : pourquoi la France y est allée

Paris a tourné le dos à la doctrine en vigueur depuis l’arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy. Après la Libye, la Côte d’Ivoire : l’armée française n’hésite plus à ouvrir le feu en Afrique.

Intervenir ou pas ? Pendant quelques jours, Nicolas Sarkozy hésite. Normal. Depuis son arrivée au pouvoir, en mai 2007, le président français a une formule magique : « La France n’est plus le gendarme de l’Afrique. » En février 2008, au lendemain de la bataille de N’Djamena, il lance même fièrement : « Je n’ai pas autorisé à ce qu’un seul soldat français tire sur un Africain. » Quelques jours plus tard, lors d’un discours au Cap, il en fait une doctrine.

Mais en Côte d’Ivoire, le président français veut crever l’abcès. En décembre, il a lancé un ultimatum maladroit à Laurent Gbagbo. Et le 17 mars, quand les Forces de défense et de sécurité (FDS) tirent à l’arme lourde sur un marché de la commune d’Abobo, au nord d’Abidjan – plus de trente morts –, il saisit tout de suite le bâton que lui tend Gbagbo pour se faire battre. Le 30, avec le Nigeria, il fait passer une résolution musclée. À l’unanimité, le Conseil de sécurité de l’ONU donne son feu vert à l’Onuci. Elle peut utiliser « tous les moyens nécessaires » pour empêcher l’utilisation d’armes lourdes contre les populations civiles.

Pour Alassane Ouattara, la synchronisation est parfaite. Deux jours plus tôt, ses forces ont lancé leur grande offensive. Très vite, dans le centre d’Abidjan, elles se heurtent à la formidable puissance de feu des FDS. Le dimanche 3 avril, Ouattara appelle Sarkozy. Il lui demande l’aide de Licorne – le dispositif militaire français à Abidjan. « Ce n’est pas à nous de faire le job, c’est à l’Onuci », répond d’abord le président français. Son homologue ivoirien lui rétorque que les deux hélicoptères de combat de l’Onuci sont incapables de détruire toutes les armes lourdes du camp Gbagbo. « Dans ce cas, il faut que l’ONU nous fasse une demande formelle, par écrit », dit Sarkozy. Peu de temps après, Ban Ki-moon, le secrétaire général de l’ONU, appelle Sarkozy et lui promet qu’il recevra une lettre dans la soirée. Ouattara fait bien les choses…

Ligne rouge

Ce 3 avril à 16 h 30, Nicolas Sarkozy hésite encore. Il consulte. Autour de lui, à l’Élysée : le ministre de la Défense, Gérard Longuet, celui de la Coopération, Henri de Raincourt, les deux chefs de l’armée française, l’amiral Guillaud et le général Puga, plus le patron de la cellule diplomatique, Jean-David Levitte, et les directeurs de cabinet de François Fillon et d’Alain Juppé. Pendant deux heures, il écoute. Des désaccords ? « Pas vraiment, confie un homme du sérail. Globalement, à partir du moment où nous avions la couverture de l’ONU, tout le monde était d’accord pour y aller. Mais on a fixé une ligne rouge. »

À la fin de la réunion, Sarkozy rappelle Ouattara. Il lui précise que les forces françaises ne « traiteront » que les armes lourdes de Gbagbo, et que ce dernier doit avoir la vie sauve. « Il faut que tu y veilles personnellement », lui dit-il. Changement de doctrine ? « Non, la Côte d’Ivoire, c’est vraiment une situation exceptionnelle », répond un décideur français. Affaire à suivre…

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