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Raphaël Ntoutoume Nkoghe: «Ce n’est pas le Gabon qui financera la retraite de M. Péan»

Raphaël Ntoutoume Nkoghe, conseiller d’Ali Bongo. © D.R.
Raphaël Ntoutoume Nkoghe, conseiller d’Ali Bongo. © D.R.
Conseiller du Président de la République, Raphaël Ntoutoume Nkoghe a profité de sa réaction au décès de son confrère et frère Placide Moulakou pour répondre aux assertions de l’écrivain Pierre Péan dans son dernier livre « Nouvelles Affaires Africaines ».

Gabonreview : Votre proximité, pour ne pas dire votre complicité, avec Placide Moulakou n’est un secret pour personne dans le monde de la communication. Comment avez-vous vécu sa disparition ?

Raphaël Ntoutoume Nkoghe : Je suis tout simplement affligé, abattu. Ce n’est pas un ami que je viens de perdre, c’est un frère. Il laisse un grand vide autour de moi, sans parler de sa famille. Vous ne pouvez pas savoir comment elle est bouleversée en ce moment. Pour moi, c’est une perte immense.

Quand est-ce que vous êtes vous parlés pour la dernière ?

Je l’ai eu au téléphone le vendredi 24 octobre. J’ai eu du mal à reconnaître sa voix tant la fatigue était présente dans son souffle. Une semaine auparavant, j’avais aussi parlé avec lui. Il m’avait dit qu’il n’allait pas bien. A la question de savoir de quoi il souffrait, sa réponse a été sèche et totale : «J’ai été empoisonné», m’a-t-il affirmé. Du coup, j’ai paniqué et de suite je lui ai demandé de me passer sa femme. Je leur ai alors demandé d’aller immédiatement à l’hôpital. La suite, vous la connaissez comme moi.

Que va-t-il se passer par rapport à cette affaire d’empoisonnement ?

Je crois savoir que la famille a déposé ce matin une plainte contre X pour homicide volontaire. Ce qui nécessitera forcément une autopsie. Et ce n’est qu’après les résultats de celle-ci que l’on aura une visibilité précise sur la suite de cette affaire. Sinon je vous confirme que la Procureur de la République a reçu une plainte ce matin.

En attendant cette suite, on aimerait connaître votre avis sur l’actualité. Notamment sur les assertions de Monsieur Pierre Péan qui affirme dans son dernier livre que Monsieur Ali Bongo est le fils adoptif d’Omar Bongo.

Je n’ai pas encore lu le livre de Monsieur Péan. Mais comme j’ai coutume de le dire, pour moi une affirmation ne saurait constituer une preuve au sens scientifique du terme. Pour moi, en ce qui concerne la science, la preuve est matérielle, c’est-à-dire palpable. Ce qui ne semble cependant pas être le cas aujourd’hui. Je classe donc cette assertion dans la corbeille des ragots.

Il s’agit tout de même de Pierre Péan qui n’est pas n’importe qui…

Tout comme le Président Bush et l’ensemble des très sérieux médias occidentaux qui, pour reprendre votre expression, n’étaient pas n’importe qui. Toutes ces grandes âmes nous ont affirmé, le regard droit dans nos yeux, qu’il y avait des armes de destruction massive en Irak. On sait ce qu’il en est aujourd’hui. C’est dire tout simplement qu’une affirmation sans preuve peut devenir une tragédie comme on le voit aujourd’hui. Et je crois, sans risque de me tromper, que Monsieur Péan est un grand spécialiste des affirmations infondées. Je peux vous en faire la démonstration.

On vous écoute.

Je ne peux pas prétendre connaître Monsieur Péan. Loin de là. Mais la première fois que je l’ai rencontré, c’était en 2008 à la Présidence de la République. Cela à la suite d’une audience qu’il avait volontairement sollicitée auprès d’Omar Bongo Ondimba. C’est l’ambassadeur François Banga Eboumi, son ami personnel, qui l’avait introduit. Monsieur Banga Eboumi est en vie.

Tous ceux qui ont assisté à cette audience sont formels : pour détendre l’atmosphère, Omar Bongo Ondimba lance une boutade sur les affirmations de Monsieur Péan dans son livre «Affaires Africaines». Et Monsieur Péan de répondre que c’est ce qu’on lui avait raconté. Depuis ce jour, pour moi, Monsieur Péan, qui a certes du talent, est un écrivain qui rédige sous la dictée ou sur commande. Et c’était exactement le but de sa visite.

Si vous pouvez être plus clair…

Au lendemain de cette audience, le Président Omar Bongo Ondimba me fait venir pour m’apprendre que Monsieur Péan est venu lui faire la proposition de sortir un livre qui devra prendre la défense des chefs d’Etat impliqués dans la procédure judiciaire des Bien Mal Acquis. Et le Président de me révéler que Monsieur Péan lui a expliqué qu’il veut le faire non seulement parce qu’il a un compte personnel à régler avec l’avocat Bourdon, les ONG Sherpa et Transparency ; mais aussi pour financer sa retraite. Qu’avant le Gabon, il avait déjà trouvé un accord avec des émissaires des autres chefs d’Etat.

Aussi vais-je apprendre que Monsieur Péan a présenté une note de 1,2 milliard de francs CFA à chacun des chefs d’Etat. Soit la somme globale de 3,6 milliards de francs CFA. A partir de là, il était clair que Monsieur Péan était venu faire ses emplettes. Malheureusement pour lui, il est reparti bredouille de Libreville, avec une vague promesse de réaction mais après la sortie du livre.

Vous voulez dire que son livre «L’Argent Noir» est le fruit de ce marchandage ?

Je ne veux pas le dire, je l’affirme. Vous croyez que c’est par hasard qu’aussitôt après la sortie de son livre en 2010, Monsieur Péan a sauté dans le premier avion à destination de Libreville pour soi-disant venir en faire la promotion ? Si ce n’était que pour cette fameuse promotion, pourquoi avoir alors sollicité une audience auprès du Président Ali Bongo Ondimba ? Pourquoi ne révèle-t-il pas que le Président Ali Bongo Ondimba l’a reçu en 2010 et qu’il a été introduit, comme en 2008, par son ami François Banga Eboumi ?

Cela ne veut rien dire, recevoir quelqu’un

Vous avez raison. Sauf qu’après son retour en France, on apprenait que Monsieur Péan était en train d’écrire un livre contre le Président Ali Bongo Ondimba. De suite, je me suis rapproché de l’ambassadeur Banga Eboumi pour savoir ce qu’il en était. Ce dernier, que vous pouvez aller voir, m’a clairement laissé entendre que Monsieur Péan est en colère parce qu’il n’a pas reçu l’argent alors qu’il a fait le livre. Pour qui connaît la profondeur et la solidité des relations entre l’ambassadeur Banga Eboumi et Monsieur Péan, cela ne peut être que la vérité.

Surtout que lorsque la rumeur sur la sortie de ce livre a commencé à courir, Monsieur Péan s’était fendu d’un démenti. La réalité est que certains petits escrocs parisiens lui avaient fait la promesse d’une négociation avec Libreville suivie d’une issue heureuse. D’où la mise au frigidaire de son manuscrit pendant un moment. Mais comme il ne voyait rien venir et après six rencontres avec Jean Ping, Monsieur Péan a finalement craqué et ainsi publié son livre.

Mais tout cela relève du chantage. Un chantage tellement minable qu’il n’aboutira à rien du tout. Monsieur Péan peut raconter tout ce qu’il veut, jamais le Gabon ne financera sa retraite. Nous avons des routes, des hôpitaux, des écoles en chantier, on n’a donc pas d’argent à gaspiller pour soulager les rhumatismes d’un septuagénaire hanté par une retraite dans la précarité.

Cela dit, l’auteur cite tout de même Jacques Foccart et Maurice Delaunay comme artisans de cette adoption.

Il s’agit tout simplement d’une grossière falsification de l’histoire. D’abord, de tous les acteurs politiques Gabonais présents au Gabon, aucun ne peut nier qu’Omar Bongo Ondimba avait déjà pour fils Alain Bernard Bongo lorsqu’il n’était que directeur de cabinet du Président Léon Mba. Particulièrement durant la rude période de 1964 où l’on a vu la famille Bongo au grand complet.

Que l’on m’explique alors comment Omar Bongo a-t-il pu adopter le même enfant cinq ans plus tard puisque la guerre du Biafra a débuté en 1967 pour finir en 1970. Et ce n’est que deux ans après le début de ce conflit que l’on a commencé a évacué les enfants du Biafra. Ce sont-là des éléments vérifiés et vérifiables.

Quant à la supposée implication de Foccart et Delaunay, elle me rappelle un peu Tintin au Congo. Dans quel intérêt ces deux personnalités Françaises devaient-elles inciter le directeur de cabinet de Léon Mba à n’adopter qu’un Biafrais plutôt qu’un Punu, un Fang, un Nzébi, un Kota, etc. Pourquoi aller chercher un Nigerian ? Vous voyez que tout cela n’a aucun sens et relève du folklore.

Dans quel intérêt, selon vous, Pierre Péan persisterait-il ?

Je vous l’ai déjà dit : il fait du chantage. Voilà un homme qui parle de stérilité concernant une femme. Et comme unique argument, il nous sert cette histoire que Monsieur Ali Bongo Ondimba aurait été adopté. Mais comme il ne sait absolument rien de cette femme et qu’il écrit sous la dictée, il ne peut évidemment pas savoir que cette femme n’a pas eu pour seul enfant Ali Bongo Ondimba car il y a eu aussi sa sœur : la défunte Albertine Amissa Bongo Ondimba. Il ne reste plus à Monsieur Péan de nous indiquer de qui cette dernière est née.

Pour sa gouverne, il serait quand même bon pour lui de savoir que le couple Omar et Joséphine Bongo a adopté, au vu et au su de tout le monde, plus de quatre enfants. Tous ces enfants sont-là et tous les Gabonais les connaissent. Et ce n’est pas un Pierre Péan qui viendra leur apprendre quoi que ce soit à ce sujet.

On vous sent très remonté. Lirez-vous tout de même ce livre ?

Je vais vous donner deux informations qui confirment que c’est un livre sur commande. Savez-vous à combien d’exemplaires il a été tiré ? 500 exemplaires. C’est-à-dire qu’il est destiné qu’au seul lectorat gabonais. Et à quel prix l’unité ? 0,90 euros, soit 585 francs CFA. Presque le prix d’un exemplaire d’Echos du Nord. Il s’agit donc d’un livre subventionné.

Ce que je trouve de très regrettable, c’est ce silence de la classe politique et des proches du chef de l’Etat même devant un mensonge aussi béant…

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