Jusqu’à la caricature, la pagaille dans le transport aérien en Afrique renvoie à l’incapacité de certains dirigeants africains à organiser le secteur de l’aviation civile, tel un miroir montrant l’image des aéronefs qui volent au Gabon, aujourd’hui très critiqués par l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI).
La décision de la Commission européenne de »déclasser » les trois aéroports du Gabon (Franceville, Port-Gentil et Libreville) – pour non-conformité – apparaît comme un coup d’épée dans l’eau ou un véritable désespoir, note-t-on dans des milieux politiques et économiques gabonais.
En arrière-plan, cette menace traduit aussi la bataille idéologique dont le Gabon fait l’objet. Et au ministre des transports et de l’aviation, Dieudonné Mouiri Boussougou, de faire des »déclarations fracassantes télévisées » afin de dissiper certains malentendus.
Longtemps entre les mains des Européens, la création au Gabon des compagnies aériennes suscite désormais la convoitise de plusieurs opérateurs nationaux »pour le plus grand bénéfice du pays », lesquels espèrent ainsi décrocher la place de premier opérateur national dans le transport.
Mais depuis peu, la fringale persistante d’une catégorie d’opérateurs pour le transport et la hausse toute aussi constante des cours mondiaux du baril ont brutalement dopé l’intérêt du marché au détriment de la sécurité et de la sûreté des aéroports.
Déséquilibré par la mort – préméditée ? – de la compagnie nationale Air Gabon, le transport aérien dans ce pays d’Afrique centrale a viré au cauchemar, même si d’ambitieuses petites compagnies commencent à combler le vide laissé par ce géant national.
Sans immatriculations, une poignée de ces petites compagnies a pris le relais et occupe aujourd’hui ce terrain laissé en friche. Certaines d’entre elles, telle que Air service, occupent avec succès depuis quelque temps plusieurs créneaux dont Libreville-Douala. Et la jeune Skay Gabon S.A, qui fait du fret, ne s’est guère fait priée pour pallier les absences de Gabon Airlines Cargo, qui s’est vu retirer son agrément le 13 juin dernier.
»Le trafic aérien au Gabon n’a jamais été parfait mais, depuis un an, il est devenu catastrophique », remarque un observateur économique à Libreville.
»Nous devons nous mettre en conformité avec les normes de l’OACI, or certains n’arrivent toujours pas à respecter certaines mesures », rouspète Jean Yembi-Yembi, directeur général adjoint de Sky Gabon, compagnie créée en 2006.
Le diagnostic est connu depuis quelques années déjà, le transport aérien gabonais va mal. Et la semonce du patron des transports apparaît aujourd’hui comme une prise de conscience de la gravité de sa situation. Jamais un ministre des transports n’a mis le feu sur cette pagaille aérienne. Une situation dont, bien sûr, les premières victimes sont l’économie du pays et les touristes.
Mieux encore, l’engagement du ministre des transports de pointer les exploitants des compagnies aériennes fait office d’une réalité de rapport de force et de l’ultime éclairage sur l’analyse faite par des commentateurs politiques et économiques avertis sur la sécurité et la sûreté des aéroports du pays.