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Gabon : Les chutes de Kongou enterrées par le projet Belinga

Les chutes de Kongou, principal atout du parc national de l’Ivindo candidat au patrimoine mondial de l’humanité, sont aujourd’hui condamnées à disparaître à cause des aménagements relatifs au projet Belinga pour l’exploitation d’une des plus grandes réserves de fer inexploitée du monde. Pour alimenter la mine et les infrastructures d’extraction et d’acheminement du minerai, les exploitants chinois ont prévu la construction d’un barrage hydroélectrique sur le site, perspective qui alimente la polémique entre les autorités gabonaises et les ONG environnementales qui demandent une nouvelle révision du projet.
Le bruit s’entend à des kilomètres dans la forêt équatoriale avant de pouvoir apercevoir une majestueuse série de cascades, les chutes de Kongou, un joyau naturel dont les jours sont comptés en raison du projet minier de Belinga.

La détérioration de ce site, principal atout du parc de l’Ivindo par ailleurs candidat pour une inscription au patrimoine mondial de l’humanité, est au centre de la vive polémique entre les pouvoirs publics gabonais et les ONG environnementales, qui en sus de la révision du contrat qui lie l’Etat gabonais et les exploitants chinois, réclament toujours l’abandon du site de Kongou pour la construction du barrage hydroélectrique.

Avec une cinquantaine de mètres de haut et 3,5 kilomètres de large sur le site principal, sans compter la chute annexe de Bouya-na-nognode, dans le cadre du projet Belinga, les chutes de Kongou pourrait présenter des capacités de 51 000 m3 de retenue d’eau, un débit de 810m3/seconde, une hauteur de 65m pour une production espérée de 250 mégawatts d’électricité.

Le projet pharaonique de Belinga relatif à l’exploitation d’un des derniers grands gisements de fer non exploités au monde, situé au nord-est du Gabon, comprend la mine mais également un complexe industriel, un chemin de fer de 250 km et un port en eau profonde à Santa-Clara, au nord de Libreville pour un investissement total estimé à près de 2 000 milliards de francs CFA, soit environ 3 milliards d’euros. La mine et le complexe doivent être alimentés par le barrage hydroélectrique que les Chinois veulent construire sur le site de Kongou.

« Je ne comprends pas vraiment pourquoi ils ont choisi ce site qui est le principal atout du Parc National de l’Ivindo, candidat au patrimoine mondial de l’humanité. D’autres sites avaient été envisagés et on décide de faire le barrage dans un Parc National protégé ; ça servait à quoi alors de le classer? » questionne le conseiller de l’ONG Wildlife Conservation Society (WCS) et spécialiste du site, Tomo Nishihara.

Une vive polémique est alimentée autour des termes du contrat liant l’Etat gabonais et le consortium chinois chargé de l’exploitation du minerai, qui a été renégocié en juin dernier mais est tenu secret.

« On espère que le barrage ne se fera pas » affirme un piroguier, fils d’un pêcheur sur le fleuve de l’Ivindo, Félicien Mebiame, ajoutant que « les chutes, c’est notre vie. Le barrage changerait tout ».

« Ce barrage va faire disparaître un site naturel exceptionnel. Il va supprimer une possibilité importante de faire de l’écotourisme. Il va détruire un écosystème dont dépendent de nombreux villages vivant du fleuve. Il va sans doute provoquer un exode rural » a déploré un spécialiste.

« Pourquoi? Tout a été fait à la va-vite, sans étude d’impact avec la volonté de gagner rapidement de l’argent et sans doute des pots-de-vin… On a bradé l’avenir des Gabonais. (…) Les Chinois ont déjà investi beaucoup d’argent et ils ne vont pas revenir en arrière sans dédommagements financiers et ça, ici personne ne va le leur donner » a poursuivi l’analyste du dossier.

Le consortium chinois a déjà construit une piste de 40 km reliant le village de Minkouala au site, jadis accessible uniquement par bateau. La route est désormais utilisée par les braconniers qui jouissent déjà de cette facilité de transport. Les Chinois ont en outre réalisé un campement et d’immenses percées dans la jungle pour leur étude de faisabilité qui défigurent déjà le site.

Les chinois « ont fini la première partie de leur travail. Ils attendent maintenant le feu vert des autorités gabonaises. Ils doivent aussi boucler leur financement avec les banques chinoises », affirme le gouvernement gabonais, en précisant que « ce n’est qu’une question de temps que les travaux recommencent ».

Les ONG environnementalistes gabonaises avaient vivement critiqué cet accord, accusant les autorités chargées du dossier d’avoir «bradé le patrimoine national en cédant tous les privilèges à la Chine». A la suite de ces protestations, le gouvernement gabonais avait décidé de rouvrir les pourparlers avec ses partenaires chinois afin de négocier de nouveaux accords sur l’exploitation de la mine de fer de Belinga. Pour les ONG, ce nouvel accord accorde toujours trop des privilèges à la partie chinoise.

Outre la renégociations des termes économiques, financiers et fiscaux du contrat, l’ONG «Publiez ce que vous payez» (PCQVP) et la plateforme Environnement Gabon avaient également vivement réclamé la réalisation préalable des études d’impacts environnementaux par projet avant le début des travaux et l’abandon des chutes Kongou pour la construction du barrage hydroélectrique.

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