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Gabon : Omar BONGO, Président ou Voleur ?

Immeubles particuliers, appartements à la dizaine, voitures de luxe… Une plainte en justice accuse le président gabonais et d’autres chefs d’Etat africains d’avoir accumulé des fortunes en France en détournant l’argent public de leurs pays. Depuis, Omar Bongo ne décolère pas contre Nicolas Sarkozy et Bernard Kouchner Olivier Toscer raconte les coulisses de ce dossier explosif. OMAR BONGO, VOLEUR!

Famas à la hanche et 357 Magnum au poing, six policiers emmenés par un magistrat gabonais s’engouffrent dans une maison du centre de Libreville. Il est 8h30 du matin dans la capitale gabonaise, ce 31 décembre 2008 : Gregory Ngbwa Mintsa, le maître des lieux, est à peine surpris. Il a osé défier Omar Bongo. Voilà l’addition. «Je vous préviens, on n’est pas dans un film, ici !», lui lance le substitut du procureur. La perquisition est menée tambour battant. Et à l’africaine. La chambre et le bureau sont retournés, les ordinateurs confisqués. Mais les pandores, peu rompus aux nouvelles technologies, oublient d’embarquer le disque dur amovible.

Gregory Ngbwa Mintsa se retrouve, menottes aux poignets, dans les locaux de la police judiciaire gabonaise. Cet opposant déclaré au régime de «Papa» Bongo a commis un crime de lèse-majesté : le 2 décembre der nier, il a porté plainte devant la justice française pour «détournement de fonds publics» contre le président gabonais et plusieurs de ses collègues chefs d’Etat africains ! Arrêté en même temps que cinq autres personnes, accusées de «complot contre l’Etat», il va rester sept jours en garde à vue. Et tant pis si le Code de Procédure pénale gabonais n’en autorise que deux. Il passera encore cinq autres jours dans une cellule de la très peu confortable prison centrale de Libreville, avant d’être finalement libéré. Il est aujourd’hui interdit de sortie du territoire et ses communications placées sous la haute surveillance de la police.

PATRIMOINE MAL ACQUIS :

Un dangereux comploteur, ce haut fonctionnaire du ministère de la Culture gabonais, en disponibilité depuis quatre ans ? C’est évidemment la thèse de la police gabonaise. «On me reproche notamment d’être allé à la délégation de l’Union européenne pour toucher un gros chèque destiné à soudoyer le maximum de Gabonais afin qu’ils se joignent massivement à ma plainte en France. Du grand n’importe quoi !», raconte-t-il. Téléguidé par l’«étranger», Ngbwa Mintsa, par ceux qui veulent la peau de Bongo, par les «anciens colonisateurs qui se croient tout permis», par les ennemis de la Françafrique, voire la CIA ou les Américains ? Défense et argumentaire classique à Libreville. Gregory Ngbwa Mintsa est certes opposant au régime. Il travaille effectivement main dans la main avec des ONG françaises. Comment faire autrement ? On voit mal les juges de Libreville se mettre en tête d’aller fouiller les comptes du «président à vie» ! Le dissident s’est donc associé, depuis le Gabon, à une offensive lancée de Paris. Basée sur une idée simple, comme souvent les grandes utopies : obtenir des chefs d’Etat africains ayant trop longtemps confondu le Trésor public de leur pays avec leur cassette personnelle, qu’ils restituent à leur peuple, un patrimoine si mal acquis. Bref, qu’ils rendent l’argent !

«CADEAUTE» PAR LE PATRIARCHE :


Ce projet fou est né dans le cerveau dun drôle d’avocat du barreau de Paris, Me William Bourdon. Chevelure en bataille, cravate de travers, fièvre du passionné, à 56 ans, il a déjà ferraillé contre le groupe Total pour obtenir l’indemnisation de «travailleurs forcés» sur un pipe-line de Birmanie et attaqué en justice Pinochet. Il défend des survivants tutsis et accuse des militaires français d’être les «complices» des génocidaires du Rwanda. Au Palais de Justice, il passe parfois pour une espèce de Don Quichotte exalté. Comme si cela ne lui suffisait pas, il a rajouté la Françafrique à son tableau de chasse. Il en rêvait depuis longtemps. C’est en mars 2007 que l’occasion s’est présentée grâce à un rapport du Comité catholique contre la Faim et pour le Développement (CCFD) sur la fortune des dictateurs. Plusieurs dignitaires d’Afrique noire, propriétaires d’immenses fortunes immobilières à Paris, y sont épinglés. Me Bourdon, qui préside aussi Sherpa – une ONG de juristes internationaux -, y trouve la matière pour bâtir une plainte pour «recel» et «détournements de fonds publics». Gonflé, il vise nommément dans sa procédure Omar Bongo (Gabon), Denis Sassou Nguesso (Congo), Blaise Compaoré (Burkina Faso), José Eduardo Dos Santos (Angola) et Teodoro Obiang Nguema (Guinée équatoriale) : des chefs d’Etat aussi indéboulonnables que richissimes. «La France ne peut pas rester ad vitam æternam une terre d’accueil pour l’argent volé aux Africains», s’insurge l’avocat. Car, il en est sûr, ce n’est pas avec leur fortune personnelle, gagnée à la sueur de leur front, que ces potentats ont acheté leurs villas avec piscine ou leurs rutilantes Rolls-Royce.

A cette époque, Gregory Ngbwa Mintsa ne connaît pas encore William Bourdon. Il n’entrera en scène que plus tard. Mais le rapport du CCFD fait désordre et le parquet de Paris ne peut pas faire autrement que de confier une enquête préliminaire aux policiers de l’Office central pour la Répression de la Grande Délinquance financière (OCRGDF). Objectif : identifier le patrimoine des dignitaires africains et de leur famille, puis vérifier la façon dont tout ce beau monde achète ses biens en territoire français. Les investigations vont prendre six mois. L’enquête se révèle particulièrement édifiante pour le clan Bongo. Les flics français ont identifié pas moins de 39 propriétés appartenant à l’un ou l’autre de ses membres, dont dix-sept résidences de luxe sont inscrites au nom du seul Omar Bongo dans les très chics 7e et 16e arrondissements parisiens et sur la Côte d’Azur.

Tous les membres de la famille semblent avoir été «cadeautés» par le patriarche. Investisse ment dans la pierre (hôtels particuliers et appartements pour l’épouse, les enfants, les petits-enfants) ou véhicules haut de gamme, payés cash : en 2006, Ali, le fils, ministre de la Défense en exercice, achète, par exemple, une Mercedes Classe R pour 67 900 euros dont 20 000 versés en grosses coupures. Précision : en France, la loi interdit de régler en espèces des achats supérieurs à 3 000 euros… Plus prudente peut-être, Pascaline, directrice de cabinet de son père Omar Bongo, utilise, elle, une société fiduciaire de Genève, la Stilaume Ltd, pour assouvir sa passion automobile. Conclusion pudique de la police dans une note de synthèse en date du 9 novembre 2007 : «Le financement de certains véhicules apparaît pour le moins atypique» (sic).

«TAXE REVOLUTIONNAIRE»


D’autres chefs d’Etat africains sont dans la ligne de mire de la plainte dite des «biens mal acquis». Teodoro Nguema, par exemple, dit «Teodorin», fils du président de la Guinée équatoriale, au pouvoir depuis près de trente ans. L’héritier roule carrosse – au sens propre comme au sens figuré – entre Paris et la Californie. Officiellement, il reçoit un traitement de 4 000 euros par mois en tant que ministre de l’Agriculture et des Forêts de son pays. Mais, en enquêtant sur son train de vie hors du commun, les policiers français sont tombés sur un parc automobile à faire pâlir les plus fortunés des rois du pétrole ou des oligarques russes : Ferrari, Mase rati et autres Rolls-Royce, toutes achetées en France via des comptes offshore, alimentés par une entreprise publique équato-guinéenne. Il y en a pour plus de 5 millions d’euros. Aux Etats-Unis, «Teodorin» s’est également fait remarquer en acquérant une résidence de luxe à Malibu et un jet privé Gulfstream. Le tout pour la modique somme de 70 millions de dollars (54,3 millions d’euros). Il est depuis sous le coup d’une enquête des Douanes et du ministère de la Justice américain. Selon un rapport d’étape, daté du 4 septembre 2007, que «le Nouvel Observateur» a pu consulter, «Teodoro Nguema a imposé sur le bois une lourde taxe révolutionnaire en insistant pour que les paiements en argent liquide ou en chèques (…) soient faits directement à lui.» Et les enquêteurs de soupçonner «extorsion, vol de fonds publics ou autres pratiques corrompues».

Suite à la plainte de William Bourdon, le patrimoine de Sassou Nguesso, l’homme fort du Congo, et de ses proches a aussi été passé au crible par les enquêteurs français. Il révèle les mêmes habitudes bling-bling que ceux de ses homologues gabonais ou équato-guinéen : hôtels particuliers à Paris et dans la banlieue chic, constitution, par Wilfried, un neveu, d’un parc d’Aston Martin – la marque préférée de James Bond – financé via une coquille financière luxembourgeoise.

Et pourtant… Quand, fin 2007, le parquet de Paris prend connaissance du résultat des investigations policières autour des trois chefs d’Etat, le ministère public préfère classer le dossier sans suite ! «Infraction insuffisamment caractérisée», décrète le parquet. La Françafrique peut dormir tranquille ? C’est compter sans Me Bourdon. Pour relancer la machine judiciaire, il lui faut trouver des plaignants. La très sérieuse ONG anticorruption Transparence International est partante. Mais il doit aussi convaincre des victimes en chair et en os d’ester en justice. Des citoyens africains qui paient leurs impôts, qui s’estiment lésés par le pillage de leurs chefs d’Etat. Et surtout qui n’aient pas froid aux yeux.

VIOLENT INCENDIE


Au Gabon, Gregory Ngbwa Mintsa est de ceux- là. Et le clame haut et fort. Le bal des pressions «amicales» peut commencer. «On m’a d’abord proposé de l’argent ou n’importe quel nouveau poste dans l’administration, raconte-t-il. J’ai même eu droit à un entretien avec le président en personne.» En octobre 2008, le ministre de l’Intérieur du Gabon le convie en effet au palais présidentiel. «Voici un de ceux qui vous embêtent», lance-t-il en l’introduisant auprès de Bongo.

Du haut de ces quarante ans de règne (un record mondial), Bongo est exaspéré par ces plaintes à répétition. Et encore plus par ce qu’il prend pour de l’apathie de la part des autorités françaises «amies». Sous Chirac, il avait déjà eu droit à l’affaire Elf. Il avait vite fait comprendre qu’il ne fallait pas trop le chatouiller. Dans ses éditos fleuris du journal «l’Union», il vitupérait contre la «gonzesse norvégienne, Eva Joly, qui sent la morue»… Il y a un an, il avait aussi réussi, grâce à son entregent, à obtenir la peau de Jean- Marie Bockel, le secrétaire d’Etat à la Coopération trop hostile à la Françafrique. Ces derniers mois, le ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, n’a cessé de lui assurer qu’il n’était pour rien dans les dernières tracasseries judiciaires. Ce qui l’a agacé un peu plus. Son entourage ne se serait pas fait prier pour faire circuler, depuis des semaines, des documents gênants sur les activités de consultant de «Bernard K». Un coup de semonce adressé à la France ? Malgré tout, aujourd’hui la plainte contre lui prospère. En tout cas, elle n’est pas définitivement enterrée. Aurait-il perdu de son influence ?

Ce jour d’octobre 2008, en vieux sage, le président gabonais en est donc réduit à écouter les doléances du dissident Gregory. Pour mieux essayer de le retourner. «Il m’a expliqué à quel point son entourage était nuisible et préoccupé seulement par l’argent, raconte l’opposant. Il m’a même juré qu’il avait décidé de prendre des mesures contre tous ces gens qui ne veulent pas travailler.» Pas dupe, Gregory Ngbwa Mintsa maintient sa plainte. «Les menaces ont alors commencé.» A l’entendre, le ministre de la Défense, un ancien camarade de lycée, le prévient qu’une barbouze française lui avait proposé de «régler son cas sans laisser de traces». Plus pittoresque, des fétiches ont été placés devant sa porte. La Fondation Omar Bongo Ondimba pour la paix, l’outil de propagande officiel du régime, a également porté plainte en diffamation contre lui. A Libreville, manifestations et pétitions de militants pro-Bongo multiplient les protestations contre «les incitations insurrectionnelles des ONG françaises et de leurs complices gabonais». Pour Ghislain Etoughet, président de la Codep, une coalition progouvernementale créée pour l’occasion, «en quarante ans de pouvoir, le président peut tout à fait avoir acquis ses biens avec ses propres économies». Pourtant, selon l’avocat parisien d’Omar Bongo, Me Patrick Maisonneuve, le salaire officiel du président gabonais s’élève à «environ 20 000 euros par mois». Un salaire de cadre dirigeant. Pas de milliardaire.

Gregory Ngbwa Mintsa attend aujourd’hui que la justice française se prononce sur la recevabilité de sa constitution de partie civile. Si elle y consent ?- la décision est attendue à la fin du mois -, il sera le seul plaignant personne physique. «Les autres Africains qui s’étaient associés à notre démarche ont dû renoncer face aux pressions», relève la uriste Maud Perdriel- Vaissière de l’ONG Sherpa. «Evoquer des pressions dans ce dossier relève de la diffamation pure et simple», conteste de son côté, Me Maisonneuve, le défenseur de Bongo. Une certitude pourtant : soutenir de trop près la plainte contre les potentats africains peut porter malheur.

Le 21 janvier dernier, au Congo, un violent incendie se déclenche dans la mai son d’un dénommé Bruno Jacquet Ossebi. Avec sa femme et ses deux petites filles, il périt dans les flammes. Le même jour, à Orléans cette fois, un autre incendie ravage la maison de Benjamin Toungamani. Ce ressortissant congolais, vivant en France, s’en sort lui avec une intoxication au monoxyde d’azote. Coïncidence troublante : les deux sinistres ont touché le même jour deux acteurs de la plainte contre les chefs d’Etat africains. Avant de décéder, Ossebi avait en effet sollicité l’ONG Sherpa pour se porter partie civile. Toungamani, lui, s’était associé à la procédure dès le début, avant de se désister suite à une série de menaces sur sa famille. «Depuis le départ, il y a dans ce dossier un climat pesant, très désagréable», dit William Bourdon. Un parfum de mort aussi maintenant.

         source: Kongo Times. info

Exprimez-vous!

  1. Ce « président » Bongo (même pas, bongo) car il ne mérite pas le titre de respect qu’est la majsucule, mérite en revanche la peine de mort. Il commet avec ses actes le pire péché qui puisse exister: profiter de la richesse d’un pays dont le peuple meurt de faim.
    Si la France soutient ce monstre, je serais vraiment déçu de mon pays, dont je suis pourtant si fière. Aucun intérêt économique ne peut justifier de cautionner une telle situation.

    Ms.Gregory Ngbwa Mintsa et William Bourdon, je vous souhaite bon courage et sachez que vous pouvez être fière de votre combat. Si jamais je peux faire quelque chose pour vous aider, n’hésitez pas à me le demander.

    (j’ai appris qu’il était recemment hospitalisé en Espagne, j’éspère de tout mon coeur qu’il va mourrir, mais je doute que cela règle cette injustice insuportable).

  2. En Afrique, en général lorqu’on est à la tête on a la main mise, on est tout permi.
    Bongo pendandant ces quatres décénies à la tête de notre Etat a pillé nos richesses, notre argent pour pouvoir faire la richesse de sa famille. De mon côté, ce qui me fait mal n’est pas le fait qu’il aie détourné les deniers public ce qui me dérange est qu’il a utilisé nos richesses pour investir ailleurs l’investisment en mobilier et en imobiler de bongo a est donc pour sa famille et non pour le Gabon. Alors que ces grosses voitures et ces immeubles, hôtels et villas de luxe puvaient embelir le Gabon et en faire sa fierté. Ce qui m’inquiète encore le plus est qu’après son départ, que deviendront ces biens? car j’ai peur cela reste la propriété des pays où il a investi ce serait donc un gachi si le Gabon ne parvenait pas à récuprer ces biens.

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