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Gabon: à Port-Gentil, les émeutes sont finies, la peur reste

PORT-GENTIL — Lorsqu’on les interroge sur les violences ayant secoué leur ville la semaine dernière, beaucoup d’habitants de Port-Gentil (ouest), la capitale économique du Gabon, évoquent la peur, la « peur d’en parler » mais aussi la « peur que ça recommence ».

Pendant les émeutes et pillages, entre les 3 et 6 septembre, « on était cloîtrés chez nous, personne n’osait sortir », affirme anonymement un jeune de Matanda (est de la ville), mise de rappeur, écouteurs aux oreilles.

« C’était dur de vivre ça. Les coups de fusil ont retenti. Il y a même un gars du coin qui a perdu la vie. Que Dieu ait son âme. Nous ne souhaitons pas que ça revienne », ajoute-t-il.

Le bilan des violences – déclenchées à l’annonce de l’élection à la présidence d’Ali Bongo, fils du défunt président Omar Bongo Ondimba – est au centre d’une controverse: trois morts selon les autorités, au moins quinze selon l’opposition.

A l’hôpital de N’Tchengué (sud), où un opposant affirme que plusieurs dépouilles ont été transportées, c’est motus et bouche cousue. « Peur de parler » et d’être en porte-à-faux avec « la hiérarchie. Ici, c’est un hôpital public. »

De Quartier Sud (sud) à Littoral (nord) en passant par Grand-Village et Le Château (centre), ils sont nombreux dans cette ville mi-balnéaire mi-industrielle, entourée de lagunes, à refuser de s’exprimer sur le sujet.

« Tout le monde a peur, en fait. On a eu peur pendant les événements. C’est fini mais on marche encore avec », avance Mbacké du quartier Roger Buttin où un centre social du groupe français Total a été incendié par des émeutiers.

Les forces de l’ordre dépêchées de Libreville en renfort « sont là, mais les bandits aussi sont toujours dehors », ajoute ce jeune homme élancé, en référence aux détenus évadés de la prison quand celle-ci a été incendiée lors des troubles.

« On se dit que ça peut recommencer », poursuit-il.

Selon les résultats officiels, l’opposant Pierre Mamboundou, classé 3e à l’issue du vote du 30 août et qui s’affirme vainqueur, a obtenu plus de 64% des voix dans la région de l’Ogooué maritime, qui abrite Port-Gentil, son fief. Il devance Ali Bongo et l’ex-ministre de l’Intérieur André Mba Obame, classé 2e du scrutin national et qui clame également victoire.

Le couvre-feu, toujours imposé du soir à l’aube, a ramené le calme dans la ville « mais on a vraiment l’impression que ça peut rebasculer », dit un passager de taxi.

Les autorités nationales, provinciales et municipales le répètent pourtant depuis plusieurs jours: Port-Gentil a renoué avec le calme, les populations peuvent vaquer sans crainte à leurs occupations.

« Si on reste là, c’est pour dire aux populations: +Rassurez-vous+. On est dans une phase de stabilisation maintenant », assure un responsable militaire.

Du côté de la mairie, l’heure est au nettoyage.

Une société privée de collecte des ordures aidée par l’armée s’attelle à la tâche depuis lundi.

Barricades, véhicules calcinés, boutiques et magasins saccagés, poubelles non ramassées: la ville ressemblait un « champ de bataille », selon Jean-Jacques Ogoula, chargé de l’Hygiène et de l’Assainissement à la mairie.

Une soixantaine de personnes sont mobilisées pour cette mission. « On aura fait le maximum d’ici à samedi », assure M. Ogoula, alors qu’une pelleteuse s’attaque à une montagne d’ordures au marché de La Balise, dans le centre.

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