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Gabon – Pétrole : la « gabonisation » en marche

Au terme d’une grève lancée par le syndicat majoritaire, l’État s’est engagé à mieux contrôler le recours aux travailleurs étrangers. Et menace d’expulser les employés en situation irrégulière.

Avis de gros temps pour les salariés étrangers du secteur pétrolier gabonais. Certains pourraient être rapatriés dans les semaines à venir, au frais du pays d’Ali Bongo Ondimba. C’est la menace que fait planer l’accord conclu entre le gouvernement et l’Organisation nationale des employés du pétrole (Onep), mettant fin à une grève de quatre jours. Le mouvement, qui a déclenché des pénuries de carburant dans la capitale, Libreville, a fait perdre, selon l’Onep, 60 milliards de F CFA (plus de 91 millions d’euros) à l’État et aux compagnies pétrolières. Le syndicat majoritaire du secteur – avec 4 000 adhérents sur un total d’environ 8 000 employés – réclamait l’application d’une disposition votée en octobre : la « gabonisation » des effectifs.

Dans le procès-verbal de conciliation, signé dans la soirée du 4 avril et dont Jeune Afrique a eu copie, l’État s’engage à prendre des mesures pour mieux contrôler l’emploi d’expatriés. Étrangers surpayés par rapport à des Gabonais au profil comparable, absence de transfert de compétences, recours à des sociétés de services dirigées par des « amis » sont autant de griefs. Le gouvernement a donc demandé aux trente-six sociétés pétrolières opérant dans le pays de recenser avant le 8 avril tous leurs employés étrangers. La liste sera étudiée par le cabinet d’Angélique Ngoma, ministre du Travail, pour débusquer d’éventuelles infractions. Parmi les 3 000 employés non gabonais du secteur, quelque 1 300 ne respecteraient pas le règlement, qu’il s’agisse de la limite d’âge (60 ans), ou plus simplement du renouvellement des visas.

« Cela apparaît un peu comme une chasse à l’étranger, mais nous voulons simplement mettre de l’ordre », explique Séverin Poaty, responsable juridique de l’Onep. À travers ces revendications, le syndicat attaque un gouvernement accusé depuis longtemps de privilégier l’intérêt des entreprises au détriment de l’emploi local. « L’État est déterminé à mettre fin à ces situations, assure une source gouvernementale. Les contrevenants sont identifiés depuis longtemps. »

Durcissement des règles. Du côté des entreprises, on avance à pas feutrés. Il s’agit surtout de ne pas vexer un syndicat puissant et connu pour sa susceptibilité. Si toutes assurent respecter la loi et ne pas se sentir menacées dans l’immédiat, elles s’attendent cependant à un durcissement des règles de recrutement et d’obtention de visas. « Les sociétés de services risquent d’être fortement impactées car elles ont besoin de beaucoup de compétences », pense Jean-François Hénin, PDG du groupe français Maurel & Prom. Ce point n’est pas oublié par l’accord conclu entre l’État et l’Onep, qui entérine notamment la refonte de l’Office national de l’emploi (ONE).

Tombé en désuétude faute de moyens, cet organisme a pour mission première de dénicher des Gabonais dont le profil correspond aux besoins du marché. S’il n’y parvient pas, il est chargé de fournir les « autorisations de carence », sésames pour qui veut employer un étranger. Un procédé qui était devenu « anarchique », assure l’Onep. La volonté de serrer la vis est manifeste. Pour autant, l’État mettra-t-il à exécution sa menace d’expulsion ? « Si les sociétés ne jouent pas le jeu », la police pourrait intervenir dans les semaines qui viennent, « dans le respect de la dignité humaine », assurent les autorités.

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