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Dirigeants d’entreprises publiques : quid du devoir d’exemplarité ?

Si les entreprises publiques sont un formidable instrument pouvant permettre à l’État d’orienter sa politique économique et sociale, au Gabon elles se font surtout remarquer par une gestion opaque et une efficacité loin de répondre aux attentes. Leurs dirigeants sont pour la plupart des «roitelets», pour paraphraser Omar Bongo au sujet des ministres qui se croyaient tout permis. Petit tour d’horizon.

En comptant les agences nationales, il y a trente entreprises publiques au Gabon. Une dizaine d’entre elles défraient régulièrement la chronique. Notamment la CNSS, le Conseil gabonais des chargeurs (CGC), la Société gabonaise de transport (Sogatra), le Centre de développement des entreprises (CDE) et la Poste S.A, mais aussi l’Office des ports et rades du Gabon (OPRAG), la Caisse de stabilisation et de péréquation (CAISTAB), la Caisse nationale d’assurance-maladie et de garantie sociale (CNAMGS), l’Agence de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep), la Caisse des dépôts et consignations (CDC) et la Société nationale immobilière (SNI).

A l’exception d’Alfred Mabika Mouyama, le PDG de La Poste, tous les PCA et directeurs généraux de ces entreprises ont la particularité d’avoir été nommés par Ali Bongo. Or, dans tous ses discours, le chef de l’État prône l’exemplarité et l’efficacité, deux idées fortes que l’on ne retrouve pas chez la plupart des directeurs généraux actuels. Ce qui est un défaut intellectuel typiquement gabonais : les responsables des entreprises publiques n’annoncent jamais d’objectif clair pour leur entreprise, ne lancent pas de réforme ambitieuse et se contentent de gérer l’existant.

L’arrivée à la tête du CGC de Liliane Ngari avait provoqué un beau chahut à cause de sa gestion précédente à la représentation du Conseil des chargeurs à Paris, et à cause des collaborateurs qu’elle s’était elle-même choisis sur des critères autres que la compétence. Côté exemplarité, cette fille plutôt sympathique ne semble donc pas être un modèle. Du coup, cette «belle mécanique» qu’est le CGC tourne un peu à vide. A la CNSS, le Dr Marie-Thérèse Vané, médecin bien formé, mais plutôt arrogante, a des points noirs dans sa gestion, dont le moins important n’est pas celui de la disparition de médicaments, des surfacturations et des avantages indus. A la Sogatra, Aloïse Békalé Ndoutoume, juriste formé au Cuspod, voit sa gestion décriée pour une raison simple : un manque de savoir-faire managérial. Résultat des courses : trois ans après son arrivée, Aloïse Békalé est incapable de faire de Sogatra une entreprise de transport public moderne.

Quant au CDE, il a «disparu de la circulation» après l’inauguration surmédiatisée de son siège à Agondjé dans le nord de Libreville. Combien d’entreprises créées vivent au-delà de trois mois ? Le CDE sait-il les accompagner pendant leur éclosion ? Le discours d’Alfred Nguia Banda, dont les conceptions économiques relèvent d’un folklore ultralibéral, n’est pas recevable chez certains créateurs d’entreprises. De plus, il y a un conflit de compétences entre l’Agence de promotion des investissements et des exportations (APIEX) soutenue par le ministre de la Promotion des investissements et le CDE soutenu, semble-t-il, par le ministre de l’Économie. Ce conflit, ainsi que les rumeurs de détournement de fonds par des responsables de l’entreprise, sont certainement à l’origine du manque de lisibilité de l’action du CDE.

Mais au-delà de tous ces maux, il y a le manque d’exemplarité de ces directeurs généraux d’entreprises publiques. Aujourd’hui, il est vrai, la probité et l’honnêteté n’ont plus le moindre ancrage chez certains hauts fonctionnaires de l’État. Mais, à force de laisser faire, de ne jamais sanctionner, d’autres entreprises publiques, après Air Gabon, Sonatram, Sogadel, le Centre gabonais du commerce extérieur, et comme d’autres fleurons de l’économie gabonaise avant elles sont vouées à la disparition.

En dehors du directeur général de la Caistab, Léon-Paul Ngoulakia, du directeur général de la CNAMGS, Michel Mboutsou, et du directeur général de la SNI, Juste-Valère Okologo (malgré son narcissisme, son côté mégalo (il vient de baptiser en son nom la salle de sports de l’entreprise), qui gèrent avec parcimonie les ressources de leur entreprise, et se sont fixé des objectifs pour la pérennité de leur entreprise, bien d’autres ne regardent jamais à la dépense. Missions illimitées à l’extérieur, fêtes dispendieuses, salaires au-delà de ceux fixés par le gouvernement, surfacturations (nouveau mode détournements), recrutements massifs de parents, d’enfants, de frères et sœurs, souvent sans qualification, jouissance du patrimoine immobilier (loyers) de l’entreprise, tout y est «no limit». Méprisant leur conseil d’administration et, parfois, leur ministre de tutelle, ils s’arrogent tous les avantages au détriment même de leurs collaborateurs. Plus c’est gros, mieux ça vaut. Ils ne rendent compte à personne, et, parfois, ne paient pas d’impôts. L’impôt, qui est censé accompagner «l’amélioration de la société (gabonaise) tout entière». Les entreprises publiques sont aujourd’hui le haut lieu de l’enrichissement illicite. Visiblement, seuls les pouvoirs publics ne s’en sont pas encore rendu compte. Ils attendent qu’un crash se produise…

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