spot_imgspot_img

LE GABON A L’HONNEUR AU 23e FESPACO

Libreville, le 21 Février 2013 – Le Gabon est l’invité d’honneur du 23eFESPACO, le Festival panafricain du cinéma de Ouagadougou, qui se tiendra du 23 février au 2 mars prochain dans la capitale du Burkina Faso. À quelques heures de la cérémonie d’ouverture, coup de projecteur sur les atouts gabonais de cette biennale mondialement réputée : une délégation d’une trentaine de réalisateurs, cinéastes et techniciens, de nombreux films à l’affiche, des invités prestigieux…

Parmi les cent une œuvres cinématographiques sélectionnées pour la compétition officielle de cette année, le Gabon en compte cinq: la fiction vidéo numérique ‘Terre et Fils’ de Fernand Lepoko, le court métrage ‘Dialémi’ (Elle s’amuse) de Nadine Otsobogo, le film documentaire ‘Le Maréchalat du Roi-Dieu’ d’Yveline Nathalie Pontalier, la série télévisuelle ‘l’Œil de la Cité’ de Samantha Biffot et ‘Le Collier du Makoko’d’Henri Joseph Koumba Bididi qui concourt dans la catégorie la plus prestigieuse, ‘Fiction Long Métrage’, en course pour l’Étalon de Yennenga, la « palme d’or » ouagalaise.
Une journée du festival sera dédiée à l’invité d’honneur, le Gabon, avec une rétrospective des grands classiques des 50 ans du cinéma gabonais. A cette occasion huit films seront projetés : ‘La Cage’ (1962) de Robert Darene avec Philippe Mory, ‘Les tam-tams se sont tus’ (1971) de Philippe Mory, ‘Obali’ (1976) et ‘Ayouma’ (1977) et de Pierre Marie Dong et Charles Mensah, ‘Ilombè’ (1978) de Charles Mensah, ‘Demain, un Jour nouveau’ (1978) de Pierre Marie Dong, ‘Dôlè’ (1999) d’Imunga Ivanga et ‘Les Couilles de l’éléphant’ (2000) d’Henri Joseph Koumba Bididi.

Porter la lumière en toute liberté
Le cinéaste Imunga Ivanga (Dôlè – Tanit d’Or Carthage, L’Ombre de Liberty), ancien élève de la Fémis – promotion 1996 ‘scénario’ -, directeur général de l’Institut Gabonais de l’Image et du Son (IGIS, sous tutelle du ministère de l’Economie numérique, de la Communication et de la Poste), nous livre ses impressions en lever de rideau du festival : « Je dirai que c’est un choix historique. Le choix du Gabon comme pays invité d’honneur par le FESPACO est une marque de reconnaissance pour notre cinéma. En effet, le cinéma gabonais, bien qu’étant l’un des pionniers et des plus structurés d’Afrique subsaharienne, n’a pas toujours bénéficié d’un regard objectif. C’est donc une opportunité extraordinaire de réhabilitation. Nous sommes par conséquent sensibles à ce double hommage rendu, à travers la célébration des cinquante ans de notre cinématographie et à l’action de Charles Mensah, qui était à la tête de la Fédération panafricaine des cinéastes (FEPACI) de 2006 à 2011. La rétrospective des 50 ans du cinéma permettra aux cinéphiles de découvrir ou redécouvrir l’imaginaire gabonais à travers une sélection de films cultes tels La Cage, Les tam-tams se sont tus, Demain un jour nouveau, Ilombè, Dôlè pour ne citer que ceux-là. Il faut relever également le panafricanisme cinématographique du Gabon qui s’est engagé dans plusieurs productions continentales telles que Le grand blanc de Lambaréné, Le Damier, Le Silence de la forêt. Le FESPACO privilégie le panafricanisme et il est bon que l’engagement du Gabon soit reconnu à ce niveau. Enfin, grâce à Philippe Mory, le Gabon est le premier pays d’Afrique subsaharienne à avoir présenté un long métrage en compétition officielle au Festival international du film de Cannes, La Cage, en 1963. Tous ces éléments fondent le choix de notre pays qui est l’un des rares en Afrique à exprimer une volonté réelle de soutien à son cinéma dans le cadre de politiques publiques.

Le festival a retenu plusieurs films gabonais, dans plusieurs sélections : ces œuvres ne témoignent-elles pas d’un « renouveau » des images gabonaises ?

Imunga Ivanga : Il y a une grande vitalité de notre cinéma qui s’exprime sur deux fronts. Il y a parmi les jeunes auteurs, ceux qui sont portés par les classiques et nous offrent déjà des œuvres de grande qualité qui trouvent un écho à l’International. Je pense ici à Nadine Otsobogo(Dialémi), Manouchka Labouba (Le Divorce), Samantha Biffot (L’œil de la Cité), Pauline Mvélé (Accroche-toi, Non coupables), Marc Tchicot (Ryhtm of my life), Philippe Ibinga (Karorlyne). Et ceux qui s’inscrivent dans la filiation d’un cinéma « nolhywoodien » à la verve populaire. Un cinéma underground, affranchi de toutes contraintes et ancré dans le fantastique et les maux de la société. Melchy Obiang (L’Amour du diable, Le cœur des femmes), Patrick Bouémé (Les Keufesses) Dominique Donatien Mpoumba (Le bal des sorciers) en sont les représentants les plus probants. Cela témoigne d’une diversité et d’une énergie que nous avons à cœur de soutenir. D’où le renforcement des politiques publiques afin de mieux organiser le secteur cinématographique et donner à l’ensemble des auteurs les mêmes chances. Ces jeunes, à l’instar de leurs aînés, ne s’interdisent rien. Il y a une grande liberté sur le choix des sujets et leur traitement. Mais il reste encore beaucoup de choses à parfaire. Il faut simplement retenir que cela nous promet des lendemains radieux. Je remarque cependant un engagement féminin plus fort, sans que l’approche genre ne soit ici dictée ou imposée. Les femmes ne se contentent plus seulement de seconds rôles et assument avec talent leur nouveau statut. Pour preuve, sur les cinq productions retenues en compétition officielle, trois sont l’œuvre de réalisatrices. Je suis convaincu que demain notre cinéma se conjuguera au féminin.

Cette mise en lumière du Gabon sur la scène culturelle panafricaine s’accompagne aussi d’un hommage rendu aux « anciens »…

Imunga Ivanga : Disons que la rétrospective sur les 50 ans de notre cinéma permettra de (re)découvrir le travail de nos anciens. Des films forts qui sont nés au lendemain des indépendances et dans lesquels l’engagement des auteurs traduisait des préoccupations politiques et sociales et la volonté de prendre en main notre destin. Il y a eu par la suite un intérêt pour certaines traditions dont les excès étaient dénoncés. Puis, un nouveau souffle avec des films plus politiques. Mais le fantastique est quelque chose qui court le long de notre production, à croire que nous cultivons un imaginaire digestif. Pour paraphraser Jean-Pierre Garcia, critique de cinéma, je dirai que « le renouveau de notre cinéma passe par la reconnaissance de nos anciens ». Ils ont fait plus que poser les bases de la fondation de notre cinéma. Philippe Mory, Pierre-Marie Dong, Simon Augé, Charles Mensah ont allumé la flamme éternelle. À nous de la porter au-delà de nos frontières.

Vous inscrivez-vous en continuité ou en rupture par rapport à Charles Mensah, qui fut votre prédécesseur ?

Imunga Ivanga : Je ne sais pas quoi répondre, l’histoire jugera. Mais Charles Mensah et moi ne sommes pas de la même génération. Il a une sagesse et un flegme que je n’ai pas encore atteint. Amadou Ampaté Bâ disait que « trop sérieux n’est pas très sérieux ! ». Et c’est un conseil de sage que j’entends respecter. Il me faut commettre encore quelques erreurs pour pouvoir les corriger et atteindre la vraie sagesse. Plus sérieusement, je partage avec Charles Mensah, qui est une grande personnalité de notre cinéma, la même passion avec la même intensité. Il y a une filiation que j’assume, mais nous sommes deux personnalités différentes. Toutefois, je fais son rêve qui est aussi celui de Pierre Marie Dong et de Philippe Mory, le rêve d’asseoir définitivement une réelle politique de développement de notre cinéma : cela ne pourra se faire sans l’appui de nos politiques.

Justement, on dit volontiers que le cinéma a une fonction « politique » : qu’en est-il pour le Gabon ?

Imunga Ivanga : J’ai coutume de dire que filmer est un acte politique. Je ne sais pas si cela doit s’entendre dans le sens de votre question mais pour moi, compte tenu de la difficulté des auteurs de pouvoir créer, s’exprimer et distribuer leurs œuvres souvent dans un univers hostile à la création et réussir à trouver l’énergie pour ne pas renoncer, c’est éminemment politique. Car nous contribuons à faire exister une mémoire, nous sommes des fabricants de mémoire. Et l’artiste, du moins dans mon entendement, est un éveilleur de conscience. Peu importe la forme de son expression, il est un peu en avant de la société et doit porter sa lumière en toute liberté, sans entrave aucune.

Exprimez-vous!

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

spot_imgspot_img

Articles apparentés

spot_imgspot_img

Suivez-nous!

1,877FansJ'aime
133SuiveursSuivre
558AbonnésS'abonner

RÉCENTS ARTICLES