«C’est en songe, à l’âge de 19 ans en 1981, que j’ai reçu cette aptitude innée», raconte Marie Madeleine Ogoule Otoule, 51 ans, très connue à Port-Gentil sous le pseudonyme de Mado et comme spécialiste des soins du corps et du cheveu. Rencontre furtive avec une masseuse autodidacte qui s’est initiée à son art en rêve et a passé 22 ans dans les salons de coiffure et cabinets privés de Port-gentil, avant de s’installer à son propre compte en 2004.
Comment devient-on Marie-Madeleine Ogoula Otoule, masseuse et spécialiste des soins des cheveux ?
C’est par passion des tresses africaines que j’en suis arrivée là. Toute petite j’aimais jouer avec les poupées en réalisant des tresses. A l’âge de 15 ans, je tressais mes sœurs, cousines, copines et connaissances. Ma première réalisation d’une coiffure occidentale fut une pose de tissage en 1975. Une de mes sœurs qui vivait avec un Européen, voulant renouveler sa coiffure m’avait contactée. Après le nettoyage des mèches, je les ai replacées à l’identique comme elle avait été coiffée en France. Tout a commencé par là. Une des mes meilleurs copines me proposera ensuite d’aller travailler chez une dame Camerounaise qui avait un salon de coiffure «Eva 2000». J’y ai passé trois ans et je m’y suis perfectionnée. Pour des raisons d’incompréhension avec la responsable, j’ai quitté ce salon pour un autre, «Moustafa coiffure» où j’ai passé un an avant de me retrouver chez Miriam Kingbo. Cette dernière avait un salon de coiffure et un cabinet de massage. Là-bas, j’ai pratiqué les deux activités : la coiffure et le massage palpé roulé.
Il se raconte à Port-Gentil que l’art du massage vous est venu soudainement, comme par magie ?
En effet, pour moi, le massage a commencé par un songe que je n’ai jamais dit à personne. Vous en avez l’exclusivité. C’est donc en songe que j’ai reçu cette aptitude innée à l’âge de 19 ans. Dans ce songe, je me suis retrouvée dans un très grand hangar où plusieurs dizaines des malades étaient couchés à même le sol. Un monsieur Chinois pratiquait une technique de masse que je ne connaissais pas. Il m’a invité à l’aider. Je ne voulais. Le Chinois a insisté en me menaçant que j’aurai sur la conscience la mort de ces nombreux malades si je ne faisais rien. Alors fâchée je me suis mise à masser en boudant. Au réveil, je me suis dit que ce n’était qu’un songe.
Les années sont passées et j’avais oublié cette affaire de massage. Je m’intéressais plutôt à la coiffure. En séjour à Libreville 2003, une des mes cousines m’avait proposé de l’accompagner dans un cabinet de massage au quartier Louis où elle se faisait relaxer. En y entrant, je me suis retrouvée nez à nez avec un Chinois et le songe m’est aussitôt revenu. Toutes les images ont défilé devant moi en moins d’une minute. De lui-même, il a reconnu que je pratiquais le massage. Il m’a proposé de m’occuper d’un client. Je tremblais de tout mon corps. Il était rassurant et j’ai commencé à appliquer la technique que je connaissais. J’étais retenue pour la journée et j’ai finalement passé deux mois d’apprentissage des techniques de manipulation thérapeutique et relaxante, par frottement, pincement, pétrissage avec les mains. Il m’a appris l’anatomie pour éviter de provoquer des accidents chez les clients. Selon lui, et c’est vérifié, toutes les parties du corps humain ne se massent pas. De retour à Port-Gentil, encouragée par mes proches, j’ai abandonné la coiffure pour le massage. Je n’ai pas été dans une école pour l’obtention de diplôme de traitement kinésithérapie. C’est ça mon histoire avec le massage.
N’ayant pas la culture du massage chez nous, qui sont donc vos clients ?
Je reçois au quotidien des Occidentaux, en majorité, et des deux sexes. Les Africains et Gabonais en particulier viennent au compte goute. Je pratique le massage du bas de dos, la relaxation des nerfs, l’anticellulite, l’amincissant, le soin de visage, etc. Notre corps est comparable à une machine qui travaille et se déplace. Il faut, de temps à temps, faire des révisions pour relaxer les nerfs avec toutes les influences extérieures que nous subissons. Nombreuses sont les personnes qui pensent aller à l’hôpital que lorsqu’elles sont malades. J’ai reçu plusieurs cas qui n’ont pas trouvé de solution à l’hôpital, par exemple l’immobilisation du cou et des membres, les douleurs articulaires, etc.
Pensez-vous à transmettre ces connaissances et donc à former des jeunes ?
Certains jeunes ne développent pas de passion pour ce genre de métiers. La plupart, ici à Port-Gentil, s’intéressent aux secteurs pétrolier et informatique. Le manque de curiosité est aussi un grand défaut chez les jeunes. A notre époque, on était curieux d’apprendre ce que les ainés faisaient. Tout se fait par la passion.