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Philippe Douste-Blazy, le 6 juillet à Libreville.

Douste-Blazy1Président de l’organisation internationale Unitaid, médecin, homme politique, conseiller spécial chargé des financements innovants auprès du Cabinet du secrétaire général des Nations unies, Philippe Douste-Blazy est revenu sur la crise économique et financière qui secoue le monde et notamment sur son projet de faire adhérer le Gabon à la nouvelle stratégie de financement et d’aide au pays défavorisés dont il est l’ambassadeur.

Gabonreview : Au-delà de la célébration d’Albert Schweitzer, y a-t-il une autre raison à votre présence à Libreville ?

Philippe Douste-Blazy : Je suis d’abord ici pour le centenaire d’un homme que nous, médecins, vénérons tous. Parce que c’est pour ma génération l’exemple de celui qui a compris qu’un être humain est égal à un autre être humain. C’est-à-dire que nous sommes tous les mêmes. Nous devons tous vivre avec la même dignité et les mêmes droits essentiels. Et parmi ces droits, il y a celui à la vie, donc celui à la santé ; il y a aussi celui de se nourrir, de boire de l’eau potable, de s’éduquer. Je pense donc qu’Albert Schweitzer est un humaniste et des gens comme moi ont essayé, à notre modeste niveau, de suivre cette très grande lignée de médecins qui se sont dévoués pour les gens les plus démunis qui n’avaient pas la chance d’habiter dans des pays où il y avait l’assurance maladie, où il y avait d’autres systèmes d’assurance : les gens les plus pauvres, en somme.

La deuxième raison, c’est que j’ai été invité par un ami, Richard Attias, et par le président de la République, parce que je suis un médecin qui a eu, à un moment donné, une idée avec les anciens présidents Lula du Brésil et Jaques Chirac de France : celle de dire qu’on ne peut pas continuer à avoir 1 milliard et demi d’individus dans le monde qui gagnent moins de 1,25 dollars par jour, qui n’ont pas droit à l’eau, qui n’ont pas droit aux soins de santé, ni à l’éducation ni à l’assainissement ; en plus de la moitié d’entre eux qui n’ont pas droit à se nourrir (850 millions), mais qu’au même moment, les pays qui donnent de l’aide sont tous en faillite. Comment demander à un député Grec, Espagnol, Portugais et même Français ou Américain, d’augmenter l’aide publique ? Comment fait-on si on a une explosion des besoins et une diminution des recettes ? Moi, j’au eu une idée : c’est de prélever une toute petite somme d’argent sur des activités mondiales, par exemple, 1 euro par billet d’avion.

Dans l’avion qui vient de Paris, celui que j’ai pris tout à l’heure, il y avait 400 personnes. Les 400 personnes ont payé chacune 1 euro, soit 400 euros. Avec cette somme vous soignez, mieux, vous sauvez 1200 enfants du paludisme. Chaque personne qui est venue tout à l’heure de Paris à Libreville, a soigné sans le savoir 3 enfants du paludisme. Il s’agit donc de financements nouveaux. Nous allons faire pareil sur les transactions financières, les conteneurs maritimes et même l’Internet. C’est ça la grande idée d’Unitaid que nous avons créé, que je préside et qui a récolté plus de 2,6 milliards de dollars. Et j’ai dit au président de la République : j’aimerais que le Gabon puisse faire partie de ces pays-là. Son père m’avait dit qu’il allait le faire, le fils le fera.

Vous évoquiez à l’instant «Schweitzer l’humaniste», le 20è siècle a inventé l’humanitaire, le 21è siècle invente-t-il, quant à lui, quelque chose de plus collaboratif que l’humanitaire ?

L’humanitaire est une chose, mais en réalité ce qu’il faut inventer c’est la mondialisation de la solidarité. La mondialisation de l’économie et celle de la communication ont été inventées par les businessmen, mais la mondialisation de la solidarité n’a pas été inventée parce que les hommes politiques ne sont pas suffisamment globaux. Quand vous êtes président d’un pays, vous vous occupez du pays, vous ne vous occupez pas des autres. Et donc mondialiser la solidarité c’est la clé, et Unitaid est la première ébauche d’une mondialisation de la solidarité. Pour illustration : quelqu’un qui prend l’avion entre Paris et Libreville, même s’il est Chinois, Russe, Allemand ou Français, il donne à un enfant dont on ne sait pas la nationale, qu’il soit Gabonais ou Cambodgien. Cette sorte de solidarité mondiale doit être la grande avancée du 21è siècle, sinon ce sera la guerre. Donc c’est ou la protection sociale mondiale ou la guerre mondiale.

Avec Internet aujourd’hui, des femmes qui perdent leurs enfants de paludisme ou de Sida, s’aperçoivent que ce sont les seules femmes au monde à perdre leurs enfants. A New York, à Oslo, à Paris on ne perd pas ses enfants. Mais si on s’aperçoit, notamment grâce Internet, que dans un endroit du monde on perd ses enfants, tout va changer. Le jour où l’ensemble du continent africain et l’ensemble du continent asiatique aura un véritable mobile Internet sur son Smartphone, là, il peut y avoir des heurts profonds parce qu’une injustice mondiale serait révélée aux plus pauvres du monde, et moi je travaille à la rectification de cela : ce n’est pas de l’humanitaire, c’est de la politique ! De la politique équitable, une politique mondiale plus juste : ça c’est, je pense, l’étape du 21è siècle.

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