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Discours du Président de la République face aux syndicats

ali-bongo-santeAllocution du Président de la République
Libreville, le 17 novembre 2014.

« Monsieur le Premier ministre,
Mesdames et Messieurs les membres du Gouvernement ;
Mesdames et Messieurs les responsables du Patronat ;
Mesdames et Messieurs les responsables des Syndicats des
Travailleurs du Public et du Privé ;
Mesdames et Messieurs, distingués invités ;
Mes chers Compatriotes,
Je vous remercie d’avoir répondu à mon invitation de ce jour.
La Nation gabonaise a pour caractéristique essentielle le dialogue
spontané et permanent.
Cette exigence de dialogue a traversé l’ensemble de nos cultures, de
notre espace et de notre histoire pour faire désormais partie de nos
traditions.
Nous y adhérons tous, et sommes enthousiastes d’y recourir,
notamment en ces circonstances marquées par des demandes
sociales, et la ferme volonté de l’Etat, d’y répondre avec une efficacité
que seul permet le dialogue, dans un esprit républicain, patriotique
et responsable.2
S’ajoutent à cette valeur ancestrale de référence, les dispositions
pertinentes de notre Constitution dont je suis le garant. Je veux ici
particulièrement souligner la liberté de conscience, la liberté de
pensée, la liberté d’opinion et d’expression.
De même, les dispositions de l’article 1er de notre Constitution
consacrent le droit de former des associations, des partis ou
formations politiques, des syndicats, des sociétés, des établissements
d’intérêt social ainsi que des communautés religieuses, uniquement
dans les conditions fixées par la Loi.
La rencontre que j’ai voulue aujourd’hui s’inscrit de fait dans le
prolongement et le respect à la fois de nos valeurs traditionnelles et
constitutionnelles mais aussi des leçons tirées de vos échanges
récents avec les membres du gouvernement et par la suite avec le
Premier Ministre, Chef du gouvernement, à qui j’ai demandé d’initier
le dialogue avec vous.
Un dialogue que je veux franc, constructif et sincère, dépourvu
d’arrière-pensées entre partenaires ayant en partage le sens élevé
de la Nation.3
Il ne s’agit donc pas, comme pourraient l’imaginer certains esprits
mal intentionnés, d’un exercice imposé par je ne sais quelles
circonstances politiciennes ou conjoncturelles, mais bien de mon
engagement à échanger, en temps voulus, avec les forces vives de
la Nation, dont vous êtes ici une partie de la représentation.
Mes chers compatriotes
Dès le début de mon mandat, et conscient des difficultés auxquelles
mes compatriotes étaient confrontés, j’ai pris un certain nombre de
mesures visant à améliorer leur pouvoir d’achat et leurs conditions
de vie.
Il s’agit notamment,
– de l’instauration du revenu minimum mensuel dans la Fonction
publique, portant le plus bas des revenus à 150.000 francs par mois ;
– du relèvement du montant des allocations de rentrée scolaire,
de 25.000 à 62.500 francs par enfant ;4
– de la revalorisation des indemnités de logement et de transport,
respectivement passées de 75.000 à 150.000 francs, et de 17.000 à
35.000 francs par mois ;
– du maintien des subventions aux produits de première
nécessité ;
– de l’extension de l’assurance maladie à toutes les couches
sociales, et particulièrement celles les plus vulnérables ;
– le paiement, entre 2010 et 2013, de plus de 170 milliards de
francs cfa au titre des rappels de solde, pour un effectif global de
moins de 70.000 agents de l’Etat.
Ces décisions, je les ai librement prises, sans la moindre pression,
dans le seul but, je le répète, d’améliorer les conditions de vie de nos
compatriotes.
Il en est de même des décisions que j’ai préconisées et entérinées
lors des dernières assises sociales.5
Il s’agit à titre de rappel et d’illustration, de l’allocation d’une
enveloppe globale de 250 milliards de francs CFA prélevée au budget
de l’Etat, pour le financement des filets de protection économique et
sociale.
Il n’est point besoin de rappeler, ici, que sur mes instructions, la
CNAMGS prend désormais en charge un certain nombre de
pathologies lourdes et particulièrement couteuses, telles que les
cancers et l’insuffisance rénale, qui obéraient et compromettaient
gravement le pouvoir d’achat des familles.
Cet effort avéré de partage ne peut cependant se poursuivre,
s’améliorer, ni s’intensifier, si l’on ne produit davantage de richesses
; et, vous l’aurez compris, si on ne travaille pas davantage et avec
plus de performance.
C’est tout le sens des réformes que j’ai engagées afin de modifier en
profondeur la structure même de notre économie et la rendre plus
compétitive.6
Mesdames et Messieurs, mes chers Compatriotes,
J’entends cependant les attentes et les revendications des uns et des
autres.
J’y perçois les aspirations du patronat, les insatisfactions des
travailleurs des secteurs public et privé.
Pour l’essentiel, et conformément au compte-rendu que m’en a fait
le Premier Ministre, outre les revendications salariales, il s’agit de la
modernisation de notre cadre législatif et réglementaire en matière
d’organisation du travail, de l’emploi et de la sécurité sociale.
Pour ce qui est du secteur public, je voudrais rappeler que je suis loin
de ceux qui pensent que les agents de l’Etat sont un fardeau pour la
Nation, et encore plus loin de ceux qui voudraient les jeter en pâture,
les désignant comme un frein au développement économique et
social de notre pays.7
Bien au contraire, je reste persuadé que l’administration publique est
un véritable atout pour notre développement, car il n’y a pas d’Etat
fort et prospère sans une administration publique forte et impliquée,
sans agents du service public bien formés, performants et conscients
de la responsabilité de la tâche qui leur est confiée.
Cela appelle donc de la part de l’Agent du service public plus
d’humilité, plus de disponibilité, plus de serviabilité et plus d’ardeur
au travail ; toutes choses qui conditionnent l’établissement d’une
administration véritablement républicaine et performante, au service
de nos concitoyens.
En effet, je voudrais rappeler que l’Administration se doit d’observer
une neutralité absolue dans son fonctionnement. Et pour le dire plus
simplement, l’Administration n’a ni père, ni mère, ni frère, ni sœur,
ni ethnie, ni religion, ni parti politique.
Mais, l’administration a un Chef, et elle est au seul service de
la Nation.
C’est ici le lieu de rappeler également qu’il ne saurait y avoir, au
Gabon, un secteur d’activité plus important que d’autres. 8
Tous les secteurs sont importants, car tous se valent dans leur
contribution au bien-être de nos compatriotes et à la richesse
nationale.
Il n’y a pas non plus une administration plus importante que toutes
les autres. Chacune a un rôle à jouer.
Chacune, complémentaire des autres, est un maillon de la chaîne
administrative au service des usagers.
C’est cette Administration publique républicaine que nous voulons qui
nous permettra de lutter efficacement contre la pauvreté, l’exclusion
et les inégalités.
Or, il nous revient avec insistance, que nos populations perçoivent
de plus en plus le Service Public comme un frein à la performance, à
l’efficience et à l’efficacité de l’action.
Ce Service public se caractérise aux yeux de l’opinion comme
l’apanage de l’absentéisme, des horaires incertains, du service inégal
ou approximatif, du non-respect de la hiérarchie, de l’incivisme voire
de l’arrogance, de la corruption, de l’incompétence, et j’en passe.9
Cette litanie de maux a pour conséquence directe de dévaloriser
autant l’Agent que le travail qui y est réalisé.
Il nous faut donc impérativement changer cette image.
Et que personne ne s’y trompe, ce n’est qu’ensemble que nous y
parviendrons. Améliorer les conditions de travail est de la
responsabilité du Gouvernement, tandis que rendre un service public
de qualité est de la responsabilité de l’Agent.
A cet effet, la satisfaction des besoins des usagers doit demeurer
votre objectif premier, votre raison d’être, mais aussi le véritable
thermomètre de vos revendications.
En effet, comment comprendre la légitimité d’une revendication,
lorsque, dans le même temps, l’usager n’est pas satisfait du service
public ?
La mauvaise qualité du service public contraint nos concitoyens à
recourir en permanence à d’autres solutions.10
La valeur de ces services, souvent payés au secteur privé, du fait des
insuffisances du service public, obère considérablement les revenus
des ménages et accroit leur précarité.
Je vais vous dire franchement les choses : Je n’accepte pas que l’on
ferme des hôpitaux, qu’on laisse mourir nos compatriotes au motif
que l’on n’a pas touché sa prime ou que celle-ci n’a pas été
augmentée !
Je n’accepte pas non plus que, pour les mêmes motifs, l’on ferme
une école par des grèves intempestives et illégales.
Le premier devoir de l’Administration est d’appliquer les lois et
règlements de notre pays. Elle ne saurait donc les fouler et agir dans
l’illégalité.
Mesdames et Messieurs, nos malades, nos enfants, ne sauraient
continuer à être ainsi pris en otage.
Je rappelle que le contrat qui lie l’agent public à l’Etat réside dans la
satisfaction pleine et entière des usagers.11
C’est pourquoi, les évolutions de ce contrat, voulues ou
revendiquées, doivent être négociées dans un esprit serein et
constructif, entre l’Etat et des partenaires sociaux représentatifs.
Elles doivent de même tenir compte de nos ressources, de nos
engagements et de nos autres contraintes budgétaires.
Monsieur le Premier Ministre,
Les discussions que vous allez donc poursuivre avec les partenaires
sociaux du secteur public doivent aboutir, entre autres, à la mise en
place d’un nouveau système de rémunération.
A ce sujet, j‘observe avec grand étonnement que la Prime d’incitation
à la performance soit aujourd’hui un sujet de discorde. En décidant
de réformer les fonds communs qui ne bénéficiaient qu’à 8% environ
des agents publics, j’ai voulu, que par des mécanismes d’incitation à
une meilleure performance de notre administration, qu’elle permette
d’accroitre les revenus des travailleurs les plus méritants. 12
La question de la prime pose celle du mérite, qui dans ma conception,
doit être reconnue et mieux rémunérée. Cela passe donc
nécessairement par un système d’évaluation clair, objectif et accepté
par tous.
Vous devrez par conséquent inscrire cette question dans votre
agenda de discussion.
Je n’ai aucun tabou. Vous ne devrez par conséquent tout mettre sur
la table, y compris la question d’un nouveau système de
rémunération.
Celui-ci doit permettre, entre autres, d’aboutir autant que faire se
peut à :
– l’amélioration du niveau de salaires des agents publics ;
– l’harmonisation des primes, des gratifications et des avantages
en nature ;
– l’incitation des agents publics à de meilleures performances ;
– l’amélioration des pensions de retraite. 13
Sur ce dernier point, je ne voudrais plus que l’admission à la retraite
soit perçue par nos compatriotes comme une déchéance sociale,
voire malheureusement comme une fin de vie.
En effet, il ne se passe pas un jour sans que je ne reçoive des
demandes de maintien en activité, dans le seul but de continuer à
percevoir un salaire, quand bien même la raison et l’âge militeraient
pour que les intéressés bénéficient d’un repos bien mérité.
Par ailleurs, pourrait se poser également la question de l’âge et des
modalités d’admission à la retraite.
Quoiqu’il en soit, un bon système de pensions repose à la base sur
un bon niveau de rémunérations.
Mesdames et Messieurs,
Je rappelle que le fil conducteur des discussions commande qu’à
chaque droit corresponde un devoir.14
Mes Chers compatriotes,
La question du partage de notre richesse nationale tout comme celle
de l’amélioration de nos conditions de vie sont tributaires de notre
capacité à produire plus de richesses.
Cette volonté d’accroitre nos richesses appelle à l’émergence d’un
secteur privé dynamique, compétitif et innovant, qui doit bénéficier
de l’accompagnement permanent et multiforme des pouvoirs publics.
L’amélioration du cadre des affaires et l’accroissement de l’attractivité
de notre pays participent de cette même volonté.
Il s’agit donc de créer tous ensemble les conditions favorables et
pérennes pour un développement économique et social fort et
durable.
Ces objectifs commandent que le Code du travail et les Conventions
collectives soient revisités.
Les réformes attendues doivent permettre :
– de garantir un dialogue social de qualité avec des organisations
syndicales patronales et des travailleurs représentatives ;15
– de garantir la viabilité et la compétitivité de nos entreprises ;
– de garantir la flexibilité et la mobilité dans les relations
contractuelles tout en s’assurant de ne pas exposer les travailleurs à
la précarité ;
– de sécuriser les parcours professionnels par la formation
continue et la valorisation des compétences acquises ;
– d’améliorer les conditions d’hygiène, de santé et de sécurité au
travail ;
– de garantir l’emploi des nationaux en veillant à ce que les
entreprises ne recourent pas de manière abusive à la main d’œuvre
expatriée.
Par ailleurs, et j’en appelle tout particulièrement à la responsabilité
du Patronat, l’apprentissage en entreprise, les contrats d’insertion
professionnelle doivent permettre d’améliorer l’employabilité dans
notre pays, et tout particulièrement celle des jeunes.16
De même, j’invite le Patronat, comme je l’ai déjà dit, à s’impliquer
aux côtés du Gouvernement pour la définition des politiques
publiques en matière de formation professionnelle.
C’est de cette manière qu’ensemble nous parviendrons à adapter
l’offre de formation à la demande des entreprises.
J’attends également que les entreprises réinvestissent une partie de
leurs bénéfices afin de renforcer leur compétitivité, et partant,
d’assurer la pérennité de leurs activités.
Les entreprises devraient de même s’investir dans les secteurs à forte
demande, telles que la santé, l’éducation, la formation et la culture.
Il appartiendra, au Gouvernement, de prendre les dispositions
législatives et réglementaires pour inciter au mécénat. 17
Monsieur le Premier Ministre,
Mesdames et Messieurs, les Membres du Gouvernement,
Mesdames et Messieurs les responsables des organisations
syndicales et patronales,
Mesdames et Messieurs, Mes chers compatriotes,
Le droit de former des syndicats est garanti par la constitution.
Cependant, l’exercice de ce droit est encadré par un dispositif
juridique et règlementaire qui indique entre autres, la procédure
conduisant à la grève, tout en prescrivant le respect du principe de
la liberté du travail, notamment pour les non-grévistes, et la mise en
place obligatoire d’un service minimum.
Notre arsenal juridique dans ce domaine prévoit la coupure de la
rémunération pour les jours non travaillés, à l’exception des
prestations familiales et de l’aide au logement. Par ailleurs, et je le
dis avec force, le droit de grève ne doit pas, dans son exercice,
provoquer une interruption totale du service public, ou mettre en
danger la vie, la santé, ou la sécurité de tout ou partie de la
population.18
Aux uns et aux autres, je réaffirme que L’Etat ne saurait négocier
avec le couteau sous la gorge.
A ce titre, la « Rue » ne saurait être le lieu d’expression et de
résolution de nos problèmes sociaux.
De même, il est une vérité d’évidence : ceux qui ne se parlent pas
ne peuvent s’accorder sur les voies et moyens de résoudre,
pacifiquement, intelligemment et surtout durablement les problèmes
auxquels ils sont confrontés.
C’est pourquoi, Monsieur le Premier Ministre, je vous demande de
réunir sous votre autorité, dès demain, mardi 18 novembre 2014,
l’ensemble des parties pour mettre en place un cadre de concertation
en vue de l’ouverture immédiate des négociations collectives
globales, tant dans le secteur public que dans le secteur privé.
Ce cadre doit prévoir les mécanismes pour me rendre régulièrement
compte de l’avancée de vos travaux.19
Monsieur le Premier Ministre,
Je voudrais, au moment de clore mon propos, attirer votre attention
sur trois situations qui me tiennent particulièrement à cœur.
La première concerne la catégorie de nos compatriotes, appelés
abusivement « Main d’œuvre Non Permanente ».
Ce personnel employé par l’Etat, ne doit plus être considéré comme
telle. Et pour cause, la plupart d’entre eux travaille sous cette
appellation toute leur vie. Je demande donc que soit créé un cadre
de gestion adéquat.
Il ne s’agit pas, Monsieur le Premier Ministre, Mesdames et Messieurs
les membres du Gouvernement, d’un simple changement
d’appellation, mais bien de la mise en place d’un véritable cadre de
gestion pour ce personnel, mais aussi, pour les autres agents
auxiliaires de l’Administration.
Je pense ici aux Chefs de quartiers, aux Chefs de cantons, de
regroupements et de villages et aux Secrétaires cantonaux.20
Monsieur le Premier Ministre, c’est de cette manière que nous leur
permettrons d’accéder à un mieux-être social et à la dignité.
Ma deuxième préoccupation est relative la situation des agents de
l’Etat, régulièrement rémunérés par l’Administration, qui restent oisifs
chez eux, faute d’affection ou de poste de travail. Notre
administration a besoin de leur expérience professionnelle et de leur
force de travail.
Je vous demande en conséquence de tout mettre en œuvre pour
mettre fin à cette situation.
Il faut que chacun d’eux bénéficie d’un poste de travail ou d’une
affectation dans les délais les plus courts.
Enfin, je voudrais parler des conséquences néfastes et
dommageables liées aux errements et aux atermoiements de
l’Administration sur nos concitoyens, en un mot de cette
responsabilité qui est la leur dans la satisfaction des usagers du
service public, comme je le rappelais tout à l’heure.21
Je veux évoquer ici la situation née d’une application sélective de la
mesure portant interdiction d’importer des véhicules de plus de trois
ans.
C’est pourquoi, Monsieur le Premier Ministre, pour préserver l’équité,
je vous engage à me proposer très rapidement les mesures les mieux
adaptées.
Pour conclure, je vous invite donc à vous retrouver pour établir ce
dialogue social franc, sincère et constructif pour l’avenir de notre
pays.
Ces négociations que vous allez mener avec l’ensemble des
partenaires sociaux, doivent permettre de créer les conditions
favorables à ce que notre pays, le Gabon, gagne sa place dans un
monde où la compétition est de plus en plus rude. Car comme vous
le savez, seuls les meilleurs pourront faire face aux défis de ce 21ème
siècle, siècle d’ouverture et de concurrence.
Que Dieu bénisse le Gabon,
Je vous remercie. »

DCP

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