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La pitoyable idéologie gabonaise

Ces Fausses bonnes idées (FBI) qui fondent l’orgueil mal placé des Gabonais. © D.R.
Ces Fausses bonnes idées (FBI) qui fondent l’orgueil mal placé des Gabonais. © D.R.
Cette fois avec une main de fer dans un gant de velours, Ika Rosira, la muse pamphlétaire de Gabonreview, revisite les croyances, les faux principes, les idées établies, les présupposés et fausses certitudes qui fondent le rapport au monde du peuple gabonais et qui le rendent si myope ; une sorte d’ébauche ou de caricature de l’idéologie gabonaise.

Il y a dans l’histoire confuse du Gabon, celle qu’on n’apprend pas dans les livres d’écoles, celle qu’on peut voir de nos yeux ou entendre de la bouche des anciens qui se souviennent de l’époque avec une certaine nostalgie ou, pour certains, une lancinante mélancolie, des non-dits, des rumeurs, des vérités, des mensonges et des silences qui pèsent sur les consciences collective et individuelles.

On naît dans un pays qui nous apprend qu’on vaut mieux que les autres, qu’on vit mieux que les autres, qu’on a plus à offrir que les autres pays d’Afrique et du monde. Le Gabonais est doté d’un orgueil démesuré en ce qui concerne son propre pays. Il va même jusqu’à considérer que ceux qui viennent du Bénin, du Togo, de la Guinée Équatoriale, du Sénégal, du Nigéria, du Mali, du Burkina, du Cameroun, du Ghana, des Congo, d’Angola pour ne citer que ceux-là, sont des animaux. Il est même courant de l’entendre dire : «Ah, c’est des animaux. Ces individus ne sont pas des gens !»

On naît dans un pays qui prône une paix dont il est le seul à détenir les critères, une paix qui serait enviable par rapport aux pays qui vivent et survivent à des conflits tribaux, territoriaux ; à des rebellions économiques et sanguinaires. Mais pourquoi comparer un pays en paix à un pays en guerre ? Pourquoi ne pas le comparer tout simplement à un pays en paix ?

Au Bénin et au Sénégal, les Constitutions protègent la Démocratie en exigeant qu’un président élu ne brigue pas de troisième mandat. Ce qui signifie que Yayi Boni ne se représentera pas, que Macky Sall ne pourra se représenter qu’une seule fois. Des pays qui ont une maturité dont le Gabon n’a toujours pas fait preuve, parce que les Gabonais ont accepté que la Constitution soit instrumentalisée par notre très cher défunt président Omar Bongo Ondimba et ses héritiers ; que la Constitution soit confiée aux grands soins de Marie Madeleine Mborantsuo, une des nombreuses maîtresses d’Omar, celle qui a su sceller entre ses cuisses l’avenir de tout un peuple, de tout un pays malgré tous les conflits d’intérêts que nous pourrions évoquer auprès de la Cour pénale et de l’opinion Internationale.

Quand le Gabonais voyage et visite d’autres pays comme le Sénégal, le Bénin et même la Côte d’Ivoire qui a traversé plus d’une décennie de guérillas, il ne réalise pas la supercherie, il ne voit pas comment les milliards de milliards de francs CFA sont détournés, pour ne servir que les intérêts de ceux qui soutiennent le régime en place. Quand il voit les voies, les ponts, les tunnels, les moyens dont disposent les autres pour relier une ville à une autre, la qualité des routes, le niveau d’urbanisation de pays qui ont des populations presque 10 fois plus nombreuses que celle du Gabon, des pays qui ne disposent pas d’autant de ressources minières, pétrolières, forestières et d’un climat propice à toutes sortes de cultures agraires et ouvrières. Quand le gabonais voit tout ça, il porte fièrement ses œillères et ses caches-oreilles, il bombe le torse et se persuade que l’Avenir en Confiance d’Ali et les Actes pour le Gabon qui ont précédé ce slogan, viendront parfaire sa vision du Gabon d’Abord.

On naît dans un pays corrompu jusqu’à la moelle, un pays qui se présente comme le poumon d’une Afrique qui subsiste et sert autant les intérêts des anciens et des néo-colonisateurs que ceux des gens qui se disent bien nés, nés pour régner, nés pour briller, nés pour assumer de grandes responsabilités et surtout nés pour prendre des décisions, qu’elles soient justes et équitables importe peu, du moment que c’est eux qui sont aux commandes de tout un peuple et qui gèrent le Trésor Public comme on gère un compte inscrit dans la communauté des biens d’un couple mal assorti.

Quelle pitoyable supercherie ! Quand on regarde l’Histoire du Gabon, celle pour qui tant de personnes ont laissé la vie – Ndouna Depenaud, Germain Mba, Joseph Rendjambe, Martine Oulabou et bien d’autres mais personne n’ose s’en souvenir-, rares sont ceux qui veulent honorer leurs mémoires, et les jeunes nés récemment ignorent totalement quels ont été leurs combats, quels sont les raisons de leurs assassinats, qui sont les véritables héros du Gabon. Bref. Bref, de peur d’être accusée à nouveau d’attiser la haine, en m’efforçant de restituer un brin de vérité au sein de toutes ces confusions transmises par la culture de la médiocrité.

Non, le Gabon ne se distingue pas des autres pays africains. Non, les Gabonais ne valent pas mieux que les autres africains. Non, les Gabonais ne vivent pas mieux, ne mangent pas mieux, ne sont pas mieux logés, mieux soignés, mieux éduqués et non, ils ne bénéficient pas de meilleures infrastructures que celles des autres pays africains. Les pires ce sont les Gabonais qui cessent d’être Gabonais quand ils arrivent en Occident, ce sont les Gabonais qui se la jouent nombril du monde quand ils arrivent dans d’autres pays d’Afrique et ceux qui considèrent que tous les Gabonais qui vivent à l’étranger, cessent automatiquement d’être Gabonais parce qu’ils ne partagent pas les mêmes réalités au quotidien que ceux qui sont restés ou condamnés à souffrir ou à lutter au pays.

En 50 ans, sans compter les pénuries d’eau, d’électricité, de gaz, de carburant, de coton dans les centres de vaccination ; en 50 ans d’exploitation de pétrole, de manganèse, d’uranium, d’or, de diamant, de bois et de bien d’autres ressources ; en 50 ans de paix ou d’illusion de paix, d’un système conçu pour institutionnaliser le tribalisme (exemple : le Premier ministre, chef du gouvernement n’est certes plus de l’Estuaire mais restera Fang quand même. Ce ne sera jamais un Punu, un Obamba, un Eshira ou un Myene, on ne devient pas Premier ministre au mérite, on le devient surtout et uniquement si nous sommes Fang à Bongoland !) Ce qui entraîne le fait que beaucoup d’ethnies estiment qu’il est préférable de se rallier à Ali Bongo aux prochaines élections de 2016 que de laisser les Fang aux commandes. Ce qui entraîne le fait que beaucoup de gens refusent même d’envisager que le Fang puisse un jour devenir une langue nationale au Gabon quelques soient les arguments qu’on avance, parce que les gens, bien au-delà du fait que les Fang sont réputés être des conquérants, des personnes sanguines et virulentes, les gens préfèrent les assimiler à tous ceux qui ont confisqué le pouvoir au Gabon, à cause de cette histoire de faire du Fang, le chef du gouvernement, une véritable tradition.

Donc pour en revenir à ce que je disais, en 50 ans, nous avons enfiiiiiiiiin atteint 1000 km de routes goudronnées selon les dires couronnés de fierté de celui qui nous sert de Président actuellement : Ali Bongo Ondimba tandis que d’autres pays d’Afrique moins riches, moins développés, moins en cours de développement, et même jugés sous-développés parlent de plusieurs milliers de km de routes goudronnées.

En 50 ans, la plupart des Gabonais bénéficient d’aide sociale (même les personnes handicapés ont droit à 75 000 francs CFA par année), les mères ont dorénavant droit à 5000 francs CFA par enfant et mensuellement (De quoi les encourager à procréer massivement!) ? Comme si 5000 francs CFA pouvaient leur permettre de nourrir un gosse durant tout un mois. En 50 ans, il parait même que nous jouissons d’un système de santé à la fine pointe de la technologie, donc plus de problèmes de perfusion, de seringues, de banques de sang, d’hospitalisation des malades, de lits, de traitements des urgences et consort, il parait que tous les problèmes de notre système de santé et même de notre système éducatif et de promotion de la culture, des arts et du sport au Gabon sont fictifs.

À l’aube d’un nouveau scandale sur nos infrastructures routières, sur l’incapacité du Gabon à honorer ses engagements, je réalise que nous en sommes encore à nous pointer du doigt, à considérer comme ennemi de la paix tous ceux qui osent dénoncer les exactions commises par le régime depuis 50 ans. Je constate même que le mot opposant est une injure, dans un pays dit démocratique, hein ?

Bien au-delà des origines controversés de l’homme qui est à la tête du pays ; bien au-delà de la mafia organisée au sein de nos gouvernements pour que les pauvres soient encore plus pauvres et que les riches le soient davantage ; bien au-delà des gens qui ne supportent pas qu’on leur dise la vérité toute crue et qui trouveront toujours le moyen d’avaliser cette dictature sournoise et silencieuse ; bien au-delà de toutes cette hypocrisie, je suis persuadée qu’ils sont nombreux, les gens qui partagent les mêmes valeurs que moi, les gens qui veulent honorer ceux qui ont donné leur vie pour ce pays merdique, merdique dans le sens qu’on patauge tous dans une merde qui ne dit pas son nom. Bref, ils sont nombreux les gens qui veulent qu’on leur rende leur pays, maintenant.

#BringBackOurCountry

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