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Après la réhabilitation de l’Union nationale : Le temps de la politique

Janvier 2011 : La marche de l’UN vers le siège du PNUD, après la formation (problématique) du gouvernement parallèle de Mba Obame. © D.R.
Janvier 2011 : La marche de l’UN vers le siège du PNUD, après la formation (problématique) du gouvernement parallèle de Mba Obame. © D.R.
Zacharie Myboto et les siens ont-ils gagné ? Pas encore. La nouvelle ligne directrice reste à construire. Pour cela, ils doivent resserrer leurs rangs, rassembler l’opposition, conjurer la connivence entre les institutions et le PDG et parachever un maillage territorial pour mobiliser davantage.

L’Union nationale était vouée à la disparition, condamnée à mourir de sa belle mort. Ses militants avaient le choix entre deux options improbables à leurs yeux : se soumettre ou se démettre. Dans l’adversité, il faut bien l’admettre, ils ont dévoilé des ressources insoupçonnées : fidèles à leurs engagements et à leur parti politique, ils ont plié, jamais ils n’ont rompu. Leur parti rétabli dans ses droits, l’opinion s’attend désormais à une accélération de l’histoire, un emballement du débat politique national. Pour cela, il leur faut procéder à une introspection, tirer les leçons des quatre dernières années pour franchir ce cap décisif. Il leur faut consolider l’unité de l’opposition voire de l’ensemble des forces vives, astreindre l’administration, les institutions et la communauté internationale à la neutralité et, enfin, mobiliser davantage pour établir un véritable maillage du territoire national.

On peut leur reconnaître du courage et de la détermination. On est libre de les créditer d’une foi inébranlable et d’un certain désintéressement. On a toute latitude de leur accorder une certaine solidarité et un esprit d’équipe. Mais, avec l’annulation de l’arrêté n° 001/MISPID/SG du 27 janvier 2011 portant dissolution de l’Union nationale, une ère nouvelle s’ouvre, de nouveaux défis se présentent à eux. S’ils ont remporté une bataille à l’usure, au prix d’une constante campagne de plaidoyer et lobbying, ces éléments ne suffisent plus. Trop fougueux et tacticiens par moments, ils doivent devenir plus politiques et stratégiques. En cette période de bouillonnement des idées, de multiplication des initiatives, ils doivent aller au-delà d’eux-mêmes. Face à ce nécessaire aggiornamento, à cette inévitable remise en cause, leurs querelles intestines peuvent devenir du pain béni pour leurs adversaires.

Cohésion, unité et solidarité

Naturellement, la cohésion interne est le premier des défis auxquels ils seront désormais confrontés. Né de la fusion de trois formations politiques (Rassemblement national des républicains, Mouvement africain pour le développement et Union gabonaise pour la démocratie et le développement), leur parti s’est paradoxalement raffermi et soudé dans l’adversité et la semi-clandestinité. «La solidarité naît des douleurs partagées», dit un adage bien connu. Curieusement, la naissance des «Souverainistes» est une autre traduction en acte de cette assertion. Essentiellement composé de militants réputés proches de Jean Eyéghé Ndong et André Mba Obame, ce think thank, qui se définit tantôt comme un «courant» tantôt comme un «mouvement transversal», fédère des énergies d’origines diverses, des individualités aux parcours variés. Preuve, s’il en fallait, que face à l’adversité et à la contradiction principale, on peut toujours s’accorder sur les désaccords. Reste maintenant à consolider l’unité et garantir la solidarité. «Mobilisons-nous, battons-nous pour élargir le spectre de nos convergences, toujours plus importantes et utiles que nos inévitables divergences», a lancé Zacharie Myboto lors du cinquième anniversaire de son parti. Destinée à ses pairs du Front de l’opposition pour l’alternance, cette supplique pourrait aussi s’appliquer à ses militants.

Les «Souverainistes» peuvent-ils encore revenir dans le rang ? La refondation de l’Union nationale est-elle en marche ? Au-delà, va-t-elle bénéficier au Front de l’opposition pour l’alternance ou constituer un frein à son développement ? Si rien n’est définitivement acquis, le rassemblement des forces semble être une préoccupation majeure pour Zacharie Myboto. Faut-il adapter ou modifier l’exécutif de l’Union nationale ? En coulisses, certains le réclament. Dans le passé, la plupart des situations similaires se sont soldées soit par des recours devant les tribunaux soit par un partage des responsabilités. Peut-il en être de même pour ce coup-ci ? Il est permis d’en douter. Suite aux «journées de réflexion» de mars 2014, l’Union nationale a complété, le 20 juillet dernier, ses organes dirigeants : les modifier aujourd’hui reviendrait à accorder une prime à la dissidence, s’en remettre à la justice équivaudrait à faire le lit de la majorité. Or, Zacharie Myboto a dit vouloir éloigner la suspicion pour fonder les relations au sein de son parti et dans l’opposition sur la «confiance». Il ne peut brusquement virer sa cuti, au risque d’écorner son leadership. Ne pouvant réunir de congrès en absence du secrétaire exécutif, il peut, en revanche, poursuivre la mise en place des organes à titre provisoire, notamment par la désignation concertée des membres du conseil national.

Maillage territorial

Davantage perçu comme un atout qu’une faiblesse pour l’opposition, l’Union nationale doit apporter la preuve de sa solidité et de la robustesse de ses structures. Avec retard, son entreprise de maillage territorial peut maintenant s’enclencher. Pour cela, il faut naturellement s’appuyer sur les structures locales. Bien entendu, les élus, actuels ou anciens, peuvent avoir un rôle à jouer. Le climat de surchauffe politique voire de défiance vis-à-vis de la classe dirigeante peut aider à pénétrer la société civile. L’Union nationale aurait ainsi beau jeu de se positionner comme un recours, une force politique porteuse d’une alternative tout en se présentant comme une composante à part entière de l’opposition, une «force du changement». Ayant présenté 43 listes labellisées «Gabon pour tous» sur les 122 possibles lors des dernières Locales, le parti de Zacharie Myboto est présent à bien des endroits du pays. «Malgré tous les handicaps que l’on connaît, ce parti est parvenu à totaliser plus de 230 élus et plus de 32.000 suffrages lors des élections locales du 14 décembre 2013», note un ancien journaliste au quotidien L’Union, poursuivant : «L’Union nationale dispose indubitablement d’une bonne base pour le maillage, pour construire un mécanisme national de surveillance et de contrôle de la régularité d’une éventuelle élection nationale». Et de trancher : «Il appartient désormais au Front de savoir exploiter cette réalité».

N’empêche, il existe une méfiance réciproque entre l’Union nationale et les institutions de la République. Sans cesse clamée par Zacharie Myboto et les siens, la volonté de tout remettre à plat inquiète les responsables d’institutions. L’heure est peut-être venue de les rassurer. Non pas pour leur garantir une impunité ou le maintien de leurs privilèges indus, mais pour leur faire partager cette évidence : ne pouvant durer éternellement, les liaisons incestueuses avec l’exécutif et le PDG sont condamnées à la remise en cause, d’une manière ou d’une autre. A l’évidence, si l’annulation de l’arrêté n° 001/MISPID/SG du 27 janvier 2011 portant dissolution de l’Union nationale a un goût de victoire, la suite s’annonce plus délicate à négocier. Plus que jamais, Zacharie Myboto et les siens doivent faire preuve de doigté et de sens politique.

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