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Gabon: Bongo et ses adversaires à couteaux tirés à deux mois de la présidentielle

Ali Bongo Ondimba accusé d’inéligibilité, un opposant poursuivi en justice, une presse déchaînée… A moins de deux mois de la présidentielle au Gabon, pouvoir et opposition multiplient les escarmouches, de nombreux Gabonais craignant une campagne tendue.

Le président sortant Ali Bongo, 57 ans, a fait une démonstration de force samedi, mobilisant plusieurs milliers de sympathisants à Libreville, après avoir déposé son dossier de candidature devant la Commission électorale pour le scrutin à un tour du 27 août dans ce pays pétrolier d’1,8 million d’habitants.

Quelque 150 à 200 opposants ont tenté un contre-rassemblement à environ 100 mètres en contrebas du podium présidentiel installé sur le rond-point de la Démocratie. Tensions sans lendemain ou début d’escalade d’ici le 27 août? Certains ont lancé des pierres vers la police, qui a répondu par des tirs en l’air. Au moins un policier a été légèrement blessé, a constaté l’AFP.

La presse réputée proche de l’opposition tente depuis des semaines de chauffer l’opinion à blanc avec des « Une » hostiles au président sortant, élu après la mort de son père Omar Bongo en 2009.

« Ali Bongo déclare la guerre aux Gabonais! » a titré l’hebdomadaire privé La Loupe, après un discours du président devant le Parlement fin juin où il défendait son septennat.

« L’ambiance de la campagne va être assez pourrie », résume une source diplomatique. « On a des fortes personnalités face à Ali Bongo, et qui étaient (autrefois) des alliés de son père », au pouvoir durant 41 ans.

Parmi eux, Jean Ping, ancien président de la Commission de l’Union africaine et ex-beau-frère d’Ali Bongo, plusieurs fois ministre avant de tourner casaque en 2014.

Le gouvernement l’accuse d' »atteinte à l’ordre public », après la diffusion d’une vidéo où il disait vouloir « se débarrasser des cafards » – un montage selon le principal intéressé.

M. Ping est visé par une seconde plainte pour « diffamation » déposée par le président Bongo pour un message publié en mai sur son compte Facebook, dans lequel il qualifie le chef de l’État de « pyromane » et de « génocidaire ».

L’opposant, qui a déposé sa candidature vendredi, a refusé de répondre aux convocations judiciaires, dénonçant des « manoeuvres politiques » de la part du pouvoir.

– Vers une candidature unique? –

Angle d’attaque des opposants: ils estiment qu’Ali Bongo est un enfant nigérian adopté par Omar Bongo à la fin des années 1960. Selon cette thèse, il ne peut pas être président en vertu de la Constitution.

« Ali Bongo est incapable de nous prouver sa nationalité. Vous avez déjà vu quelqu’un avec quatre actes de naissance? », a déclaré à l’AFPTV l’un des sympathisants d’opposition regroupés près du meeting présidentiel, Jean-Steve Okimbi.

« Ali Bongo est un accident de l’histoire qui ne saurait et ne doit plus être répété », répètent en choeur les principaux candidats: Jean Ping, 73 ans (lui-même de père chinois), l’ancien président de l’Assemblée nationale Guy Nzouba Ndama, bientôt 70 ans, et l’ancien gouverneur de la Banque des Etats d’Afrique centrale, Casimir Oye Mba, 74 ans.

L’opposition s’apprête à contester la candidature du président sortant devant la Commission électorale après le 12 juillet, date-butoir du dépôt des candidatures.

A la tribune, Ali Bongo s’est amusé de cette polémique: « Est-ce que je suis étranger? Je viens d’où? », a-t-il lancé à ses partisans, dont la réponse à l’unisson ne s’est pas faite attendre: « Du Gabon! ».

« Quel autre argument pourraient avancer ces +néo-opposants+? », raille sous couvert d’anonymat une source proche de la présidence.

« Ils ne peuvent pas critiquer le bilan d’Ali Bongo sur le fond: il a fait dix fois plus en sept ans que ces gens-là durant toutes les décennies où ils ont gouverné », ajoute-t-on.

Le pouvoir se félicite d’un début de diversification de l’économie dépendante du pétrole, des investissements « sans précédent » dans les infrastructures, tout en reconnaissant un point noir sur la construction de logements.

Ce bilan ne convainc pas une jeune femme revenue au pays après des études au Ghana, pourtant présente au meeting d’Ali Bongo: « En sept ans il n’a rien fait. Nous, le peuple, on souffre. J’ai une licence en communication et marketing. Cela fait trois ans que je suis rentrée, je n’ai pas d’emploi ».

Outre le débat sur l’éligibilité du chef de l’Etat, les principaux opposants font face à un dilemme stratégique posé par l’élection à un tour: rester en ordre dispersé ou dégager une candidature unique pour battre Ali Bongo?

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