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Françafrique: splendeurs et misères de Robert Bourgi

« Un cancer absolu qu’il conviendra d’extirper du Gabon ».

Ainsi parlait Robert Bourgi à propos du président gabonais, Ali Bongo, le 7 juillet , dans une interview au vitriol accordée à la télévision panafricaine Voaxafrica. Celui qui déclarait il y a sept ans, un soir de présidentielle gabonaises de 2009, « qu’au Gabon, la France n’a pas de candidat mais le candidat de Robert Bourgi c’est Ali Bongo, or, je suis un ami très écouté de Nicolas Sarkozy », n’a jamais réussi à se faire adouber par ce « petit frère » qu’il encensait alors à longueur d’interviews. Une entrevue en novembre 2015 à la demande du courtisan, venu au Gabon pour se recueilli sur la tombe d’Omar Bongo, n’aura rien changé à la donne.

La magie Bourgi est périmée dans l’ Afrique nouvelle. Ali est resté inflexible face à l’avocat de 71 ans, qui n’aspire pas encore à la retraite.

Le propos amer, le verbe haut et les invectives contre de nombreuses personnalités gabonaises ne laissent pas de doute: nous sommes dans la figure du style du courtisan délaissé qui veut reprendre du service. C’est en effet un secret de polichinelle, l’avocat franco-sénégalais qui revendique l’héritage de Jacques Foccart n’est plus le bienvenu au Palais du Bord de Mer comme dans beaucoup de capitales africaines. « Bourgi, c’est un soldat perdu de la Françafrique. Longtemps, le Gabon a été pour lui comme une sorbetière. Tous les matins, il avait sa glace… », dit de lui l’actuel ambassadeur du Gabon à Paris dans des propos rapportés par Jeune Afrique.

Aux yeux des officiels gabonais, les vieilles recettes ne sont plus de mise à ce qu’il paraît . « La République des mallettes au Gabon c’est terminé et Robert Bourgi devrait être le premier à le comprendre, Ali Bongo Ondimba ne payera pas. (…)Désolé mais monsieur Bourgi ne nous intéresse pas », s’exclamait mercredi 20 avril 2016 à l’auditorium de Gabon Télévision, le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, Alain Claude Billie By Nze.

Attitré par les palais présidentiels, le fils d’immigrés libanais a été l’un des premiers intermédiaires politiques à rendre visite à Patrice Talon, le nouveau président du Bénin. Tout comme à Libreville, l’entrevue qui s’est déroulée le 22 mai au palais de la Marina n’a débouché sur rien, apparend-t-on dans les parages de la présidence gabonaise. Mais Me Bourgi ne désespère pas.

Son cabinet situé dans le 16ème arrondissement parisien continue de recevoir ces opposants et intellectuels africains qui pensent encore que le changement désiré dans leurs pays viendra de la France et donc, forcément, des conseils d’un certain Bourgi.

La réalité de l’influence de l’homme d’affaires est tout autre. Bourgi n’a plus de liens avec l’Elysée, la Coopération française ou encore la cellule africaine. Sa disgrâce date de septembre 2011 quand il affirme au Journal du Dimanche avoir transporté durant les années 90 des « millions de francs » d’Etats africains au profit de Jacques Chirac. L’ancien président menacera un temps de porter l’affaire en justice.
« Je ne l’ai pas dit à la justice mais je me tiens à sa disposition. Deuxièmement, je me suis décidé à parler parce que ma conscience me taraudait et je me disais qu’il était temps de mettre fin à ces pratiques inacceptables et mettre fin aussi au côté obscur de la « Françafrique », déclarait-il le tonitruant avocat à RFI, en 2011.

Le même Bourgi se fendra d’un commentaire à la même radio en juillet 14: « Je n’ai jamais transporté de mallettes (…)». Mais le mal était déjà fait.

En brisant l’omerta sur l’une des facettes de la françafrique, l’avocat s’est coupé des grands ordonnateurs politiques français et africains.
Par contre, l’avocat continue d’entretenir des liens étroits avec les multinationales « amies » de l’Afrique. Sous ses dehors d’un engagement philanthropique contre Ali Bongo et en faveur de la démocratie, l’on décèle une alliance objective entre ce françafricain repenti et ces multinationales qui n’ont pas encore accepté la création de la GOC (Gabon Oil Company), l’interdiction de l’exportation du bois non certifié et l’exigence d’une infime transformation (5%) du manganèse en Afrique.

En dépit de ses déboires, Me Bourgi ferait des pieds et des mains pour renouer avec le pouvoir gabonais, c’est l’impression qu’il donne en tout cas à son désormais ex-client, l’homme d’affaires gabono-malien Saidou Kane.

Interpellé brièvement par la police française en 2015, Saidou Kane a dû changer d’avocat pour obtenir la libération. « Le plus inadmissible c’est que je lui (NDLR: Robert Bourgi) ai versé des indemnités spécialement consacrées à la défense de ce dossier en sus de ses honoraires habituels et il n’a rien foutu, absolument rien. J’ai même eu le vague sentiment qu’il cherchait à exploiter cette circonstance pour se frayer une voie vers monsieur Maixent Accrombessi et peut être même vers le Président de la République, attitude que je trouve déplorable de la part d’un avocat ! », déclare-t-il dans une interview exclusive accordée au journal gabonais « Le Douk-Douk » en décembre 2015. Sacré Bourgi.
Albert Savana

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