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France-Gabon : 56 ans de relations incestueuses

L’élection présidentielle de ce samedi marque la fin d’une ère dans ce pays qui fut la quintessence de la Françafrique à la papa.

Pour la première fois en cinquante-six ans de relations incestueuses entre la France et le Gabon, Paris retient son souffle. Pour la première fois, le candidat préféré d’une partie de l’establishment français, celui de la continuité, n’est pas tout à fait certain de l’emporter haut la main à l’élection présidentielle du 27 août, de sortir vainqueur du marigot de la Françafrique.

Certes, Ali Bongo, le président sortant, fils et successeur d’Omar Bongo qui a régné sur le pays pendant pas moins de quarante-deux ans et s’était imposé comme le « parrain » de la Françafrique, a toujours les moyens de resigner pour un deuxième mandat.

Le 14 septembre 2012, François Hollande reçoit Ali Bongo à l'Elysée. Au-delà des sourires, plusieurs contentieux assombrissent le ciel franco-gabonais. Le 14 septembre 2012, François Hollande reçoit Ali Bongo à l'Elysée. Au-delà des sourires, plusieurs contentieux assombrissent le ciel franco-gabonais. AFP PHOTO/ERIC FEFERBERG
Le 14 septembre 2012, François Hollande reçoit Ali Bongo à l’Elysée. Au-delà des sourires, plusieurs contentieux assombrissent le ciel franco-gabonais. Le 14 septembre 2012, François Hollande reçoit Ali Bongo à l’Elysée. Au-delà des sourires, plusieurs contentieux assombrissent le ciel franco-gabonais. AFP PHOTO/ERIC FEFERBERG

Pour faire campagne dans ce petit pays (moins de 2 millions d’habitants) couvert par la forêt équatoriale, Ali Bongo dispose des moyens de l’Etat, des leviers administratifs, des principaux médias, de la « prime à la stabilité » et, surtout, du contrôle du ministère de l’Intérieur qui proclame les résultats.

France-Gabon : la gaffe de Valls tourne à l’incident diplomatique

Mais, pour une fois, il a en face de lui un adversaire de taille, Jean Ping, plusieurs fois ministre, ex-président de la Commission de l’Union africaine. Bref, un concurrent de poids. Et qui pèse d’autant plus lourd que les deux autres importants candidats de l’opposition se sont retirés en sa faveur.

Base militaire permanente

Quel que soit le vainqueur de ce scrutin, il marquera un basculement : la politique gabonaise ne sera plus la propriété, « arrangée » avec Paris, de la famille Bongo. Longtemps, le Gabon fut la quintessence de la Françafrique à la papa. De de Gaulle à Sarkozy, en passant par Giscard ou Mitterrand, le voyage à Libreville fut le Canossa de la Françafrique.

Depuis l’indépendance, la France y dispose d’une base militaire permanente. Parfois, ses soldats sont intervenus, officiellement non pas pour réprimer les manifestations de l’opposition mais « pour restaurer l’ordre ». Il ne s’agissait évidemment pas de sauver un régime dictatorial aux abois mais de « protéger les ressortissants et les intérêts français ». Et le régime d’Omar Bongo s’est toujours posé en garant de ces intérêts.

C’est Elf (aujourd’hui Total) qui exploite les juteux gisements pétroliers offshore du golfe de Guinée. Pour garantir sa survie politique, le potentat de Libreville avait une carte maîtresse. En particulier grâce à l’argent du pétrole, le président gabonais finançait, et en liquide, les partis politiques et les campagnes électorales françaises, notamment par l’intermédiaire de Me Robert Bourgi, héritier de Jacques Foccart, le Monsieur Afrique de Charles de Gaulle.

S’il arrosait généreusement les partis de droite, longtemps au pouvoir en France sous la Ve République, le vieux crocodile de Libreville n’oubliait pas, on ne sait jamais, de verser son obole au Parti socialiste.

Généreux avec les politiciens français, avec sa famille, avec ses proches, le régime Bongo est plus chiche avec sa population, dont une bonne partie vit en dessous du seuil de pauvreté. Les détournements massifs ont permis au clan Bongo d’acquérir, notamment en France, des villas, appartements, voitures de luxe, etc.

A Paris, une instruction judiciaire a été ouverte dans l’affaire dite des « biens mal acquis ».

Jean-Baptiste Naudet
Journaliste à l’Obs

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