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Marie-Madeleine Mborantsuo, pièce maitresse du casse-tête gabonais

Tous les yeux sont rivés sur la présidente de la Cour constitutionnelle du Gabon. Marie-Madeleine Mborantsuo, 61 ans, détient les clefs du dénouement de la crise.

Elle préside depuis 18 ans la Cour constitutionnelle du Gabon. Après un cursus universitaire sans faute, Marie-Madeleine Mborantsuo a suivi un stage à la Cour des comptes à Paris. Titulaire d’un diplôme de Finances publiques à la Sorbonne, la Docteur en Droit est nommée présidente de la Chambre des comptes de la Cour suprême à seulement 28 ans. Elle devient Présidente la Cour constitutionnelle en 1998, poste qu’elle occupe encore aujourd’hui.

Brillante juriste, Marie-Madeleine Mborantsuo a aussi été la maitresse d’Omar Bongo -président du Gabon de 1967 à 2009- avec qui elle a eu trois enfants. Ces prochains jours seront parmi les plus mouvementés de sa carrière. Outre l’enjeu considérable de sa mission, elle devra jouer les arbitres entre deux « parents » qui se vouent une haine tenace. Ali Bongo Odimba est le demi-frère de ses trois enfants ; Jean Ping, est l’ancien compagnon de Pascaline, la demi-sœur de ses enfants. A travers la crise politique se joue aussi un feuilleton familial.

Lors des élections de 2009, la plus haute instance juridique du Gabon avait rejeté les onze requêtes en annulation déposées par l’opposition et confirmé l’élection d’Ali Bongo Odimba à la tête du Gabon.

Elle devra arbitrer dans un contexte plus complexe qu’en 2009

L’époque n’était pas la même. L’Union européenne n’avait pas dépêché de mission d’observation, les opposants n’étaient pas issus du « sérail » et le fils d’Omar Bongo avait reçu l’adoubement du président français Nicolas Sarkozy. En 2016, Jean Ping se révèle un adversaire coriace. Accusé de fraude par Ali Bongo Odimba, Ping bénéficie d’un réseau de soutiens importants en Europe et sur le continent africain, notamment en Cote d’Ivoire, où sont domiciliées la plupart de ses sociétés. Invité pour la première fois de l’histoire du Gabon, la mission de l’Union européenne a joué un rôle déterminant. Depuis qu’elle a reçu les copies de 174 PV de la province du Haut-Ogooué, l’équipe de l’eurodéputé bulgare Mariya Gabriel ne cesse de réclamer un décompte transparent. Le Président Hollande appuie avec insistance les demandes de la mission de l’Ue. Marie Madeleine Mborantsuo devra donc arbitrer dans un contexte beaucoup plus complexe qu’en 2009.

Surnommée ironiquement « la Tour de Pise », la Cour constitutionnelle est accusée de pencher toujours du même coté: celui du pouvoir en place. Mais la question se posera bientôt de savoir où se trouve le pouvoir. Si Ali Bongo tient encore la machine gouvernementale, il a perdu un ministre de la Justice, la confiance de la communauté internationale et l’Union africaine exigent un recomptage des voix de son fief.

Dans un communiqué publié aujourd’hui, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault a de nouveau souligné « l’importance que les contestations soient examinées avec transparence et impartialité », évoquant la nécessaire « sincérité du scrutin ».

De son coté, l’Union africaine exigé à son tour « le recomptage bureau de vote par bureau de vote ».

Proposée par le Président de l’Union africaine, le Tchadien Idris Deby, la mission de médiation des chefs d’Etat africains a finalement été suspendue. « Dans leurs contacts préliminaires, ils se sont rendus compte que l’initiative n’allait pas forcément leur faire une bonne publicité, explique Jean-Baptiste Placca chroniqueur à Rfi et spécialiste de l’Afrique. Le souvenir du fiasco de la médiation de Macky Sall au Burkina-Faso est encore frais. Et puisque la Cour constitutionnelle a été saisie par les deux camps, ils ont trouvé une bonne excuse: pendant les deux prochaines semaines en attendant les résultats le calme va revenir, la médiation n’est donc plus aussi nécessaire ».

Avant de procéder au recomptage, la Cour constitutionnelle dispose de huit jours pour accepter les conditions de transparence émise par les partisans de Jean Ping. Ces derniers exigent que le recomptage se fasse en présence de représentants de l’opposition et de la mission de l’Union européenne. Selon le porte-parole de Jean Ping à Paris Lionel Persis Essono, le demande serait tout à fait légale. « L’article 125 de la loi organique sur le Cour constitutionnelle stipule que la Cour peut recourir à l’expertise des observateurs qui ont accompagné le processus électoral. » Dont acte.

Le choix en sera difficile pour Marie-Madeleine Mborantsuo au milieu de l’œil du cyclone. La native de Franceville, capitale de la fameuse province du Haut-Ogooué, devra probablement se replonger dans un de ses écrits intitulés « la contribution des Cours constitutionnelles à l’Etat de Droit en Afrique » (Ed. ECONOMISA).

Par François de Labarre

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