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Gabon : Ali Bongo s’empresse de prêter serment

REPORTAGE – Quatre jours après la proclamation officielle des résultats d’une élection très contestée, le président gabonais a été investi mardi.

Envoyé spécial à Libreville

Après une proclamation officielle des résultats de la présidentielle quasi en catimini, au beau milieu de la nuit, le Gabon a organisé mardi 27 septembre une investiture au pas de charge. Quatre jours à peine après sa victoire hautement contestée, alors que le pays se calme à peine, Ali Bongo a prêté serment devant un parterre d’invités un rien étonnés de tant de célérité. La veille encore, l’heure de la cérémonie n’était pas vraiment fixée, et ce sont des hôtes et des dignitaires pressés et étourdis qui, au matin, défilaient sur les marbres du Palais du bord de mer dans une entêtante odeur d’encens. Cet empressement peu courant semble avant tout viser à empêcher une opposition désemparée de se réorganiser, et de rendre irréversible la réélection d’Ali Bongo. «Il s’agit d’aller vite car il y a beaucoup de choses à régler sans attendre. Il y a beaucoup d’urgences», assurait-on dans l’entourage du président.
Aucun ministre français n’a fait le déplacement

«Que la France vienne ou non n’a aucune importance. Elle n’a plus de diplomatie. Ce n’est plus elle qui donne le la. Elle est collée à l’Union européenne»
Alain-Claude Bilie By Nzé, ministre gabonais de la Communication

Cette prestation de serment express permet aussi aux autorités d’expliquer la relative faiblesse des délégations étrangères. Seuls quatre présidents – Mali, Niger, Togo et Sao Tomé – ont fait le déplacement. Le Maroc, dont le roi est un proche d’Ali Bongo, a envoyé son premier ministre. Mais les grands voisins, Congo ou Cameroun, se sont contentés de délégations. Une demi-surprise. En dehors d’Afrique, nul ou presque n’a adressé de félicitations à l’élu, la France et les États-Unis se contentant de «prendre acte». Aucun ministre français n’a fait le déplacement, une exception dans l’histoire des deux pays. «Que la France vienne ou non n’a aucune importance. Elle n’a plus de diplomatie. Ce n’est plus elle qui donne le la. Elle est collée à l’Union européenne», assurait Alain-Claude Bilie By Nzé, le ministre gabonais de la Communication. Le communiqué de Jean-Marc Ayrault soulignant «que les doutes ne sont pas levés» sur les conditions de la réélection d’Ali Bongo n’est pas passé. Pas plus que les commentaires secs de Federica Mogherini, haute représentante de l’UE, affirmant que «la confiance du peuple gabonais concernant l’intégrité du processus électoral peut, légitimement, être mis en doute». «Ce n’est pas à nous de dire qui a gagné. Mais ce qui s’est passé au Gabon est très grave et n’est pas dans la tradition du Gabon. C’est au président de trouver une issue et de faire des ouvertures», explique-t-on au Quai d’Orsay.

L’idée d’une médiation étrangère écartée

La tâche sera ardue. Si tous sont d’accord sur l’idée que seul le dialogue sera salvateur pour sortir le pays de la crise, personne ne semble réellement prêt à l’entamer. Dans son costume de cérémonie, le président a bien tenté de tendre la main «à tous les Gabonais». Disant comprendre «le doute de certains», il a invité «toutes les forces de vives de la nation à s’asseoir ensemble». «Chez nous, les problèmes se règlent en famille dans le corps de garde», a-t-il néanmoins dit, écartant ainsi l’idée de toute médiation étrangère, réclamée par l’opposition. Certes, il s’est dit ouvert à évoquer les sujets brûlants comme le nombre des mandats présidentiels, encore illimité au Gabon.

Mais c’est là un point concret bien tardif aux yeux de ses adversaires. «Nous demandons à parler de ces questions depuis des années et ça nous a toujours été refusé. Et maintenant, après les élections, on propose de dialoguer. C’est trop tard», a répondu Jean-Gaspard Ntoutoume Ayi, le porte-parole de l’opposant Jean Ping.

Dans un tel contexte, les chances de pourparlers semblent maigres. D’autant que le temps est compté. Visiblement peu décidé à ralentir le rythme de sa reprise en main du pouvoir, Ali Bongo a annoncé la création d’un nouveau gouvernement «dans les prochains jours».

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