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Le projet de révision de la Constitution fait débat au Gabon

Un projet de révision de la Constitution agite depuis quelques jours la classe politique gabonaise qui sort de l’élection présidentielle mouvementée d’août 2016 et se prépare à des législatives en 2018.
Ce texte prévoit la septième révision de la Constitution gabonaise depuis 1991, année qui a vu la fin du monopartisme sous la présidence d’Omar Bongo (au pouvoir de 1967 à 2009).

Adopté fin septembre en Conseil des ministres, le projet met en application les actes du « dialogue politique » (mars-mai 2017) souhaité par l’exécutif pour tourner la page d’une présidentielle 2016 marquée par des violences post-électorales encore dans toutes les têtes.

Le scrutin a abouti à la réélection d’Ali Bongo Ondimba (fils d’Omar, lui-même au pouvoir depuis 2009), alors que l’opposition rattachée à Jean Ping considère toujours ce dernier comme « président élu ».

Le texte, qui modifie une quarantaine d’articles sur 119, devrait être débattu au Parlement d’ici deux semaines, a précisé à l’AFP le porte-parole du gouvernement Alain-Claude Bilie By Nze.

Le parti au pouvoir dispose au Parlement de la majorité des deux tiers requise pour une révision de la Constitution.

Le projet porte notamment sur « la détermination des rapports entre le président et le gouvernement en cas de cohabitation », « le renforcement des pouvoirs de contrôle du Parlement » ou encore la création d’une Cour de Justice de la République pour juger les hauts responsables de l’Etat, selon le compte-rendu du Conseil des ministres du 28 septembre.

« La révision de la Constitution était une volonté de la classe politique gabonaise dans son ensemble », a déclaré lundi M. Bilie By Nze.

Le projet complet n’a pas encore été officiellement publié, mais plusieurs versions circulent ces derniers jours sur les réseaux sociaux.

« Constitution: la controverse », titrait mardi le quotidien pro-gouvernemental l’Union, tandis qu’un journal d’opposition s’enflammait déjà contre un « coup d’Etat constitutionnel ».

Le parti de l’Union nationale (UN, opposition) a ouvert le ban: « c’est la monarchisation insidieuse du pouvoir de la République », a dénoncé samedi son président Zacharie Myboto, y voyant une « régression démocratique majeure ».

Ce projet aurait pour objectif de « concentrer tous les pouvoirs entre les mains du chef de l’Etat », selon M. Myboto. En changeant le régime semi-présidentiel actuel « en un régime présidentiel total, réduisant le Premier ministre à un rôle de contremaître », la nouvelle Constitution serait « un bouleversement total de l’équilibre des pouvoirs » institué en 1991, dit-il.

Le projet de Constitution est un « recul de la démocratie (…) faisant fi de la séparation des pouvoirs et cherchant à prendre avantage d’une possible cohabitation », a estimé mi-octobre Alexandre Barro Chambrier, président du parti Héritage et Modernité qui rassemble de nombreux anciens caciques du régime d’Omar Bongo.

Ali Bongo « sait qu’il va perdre les prochaines législatives, il veut bunkeriser le pouvoir de la présidence face aux autres institutions et veut à tout prix retirer toutes ses capacités au parlement », a déclaré à l’AFP Jean-Gaspard Ntoutoume Ayi, porte-parole de l’opposant Jean Ping.

« Personne n’a aujourd’hui au Gabon n’a le besoin, l’envie, le désir, de mettre en place une monarchie, fût-elle constitutionnelle », a répondu le porte-parole du gouvernement.

Le texte « est maintenant transmis au Parlement où il va y avoir un débat et des discussions. Et croyez-moi, les parlementaires gabonais ne sont pas des godillots! Ils vont l’examiner (…). Nous ne craignons pas du tout le débat parlementaire », a-t-il assuré.

« Mais (…) je ne vois pas en quoi un régime présidentiel serait antidémocratique, pas plus qu’un régime semi-présidentiel serait démocratique », a encore commenté M. Bilie By Nze.

Ce texte « est une amélioration qui permet de renforcer certaines institutions », décrypte pour l’AFP Télesphore Ondo, spécialiste du droit constitutionnel à l’Université Omar Bongo.

Il cite en particulier « le renforcement des capacités de la Haute Cour de Justice » actuelle, le contrôle accru de la Cour des comptes sur les finances de l’Etat et le contrôle des comptes de campagne par la Cour constitutionnelle.

Mais ce spécialiste regrette entre-autres l’absence de toute limitation des mandats présidentiels, rappelant au passage que les « acteurs politiques ont leur propre calendrier ».

Le débat sur la nouvelle Constitution s’inscrit dans la perspective des prochaines législatives: prévues initialement pour décembre 2016, le scrutin a été reporté deux fois et devrait avoir lieu finalement autour d’avril 2018, selon le gouvernement, qui a expliqué avoir besoin de temps pour appliquer les réformes électorales issues du « dialogue politique » qu’il a lancé.

Une partie de l’opposition a dénoncé ce report, alors que ses membres oscillent entre boycott et participation au scrutin, dans un pays qui n’a jamais connu de cohabitation.

Avec AFP

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