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«On dort debout, car on est entassés» : les révélations d’un ancien prisonnier au Gabon

Ayant passé un an à la prison centrale de Libreville, communément appelée «Sans-Famille», Patrick Oyabi, leader du mouvement de protestation Génération Waz, dénonce à Gabonreview les mauvais traitements que subissent les prisonniers dans la plus grande maison d’arrêt du Gabon arrivée à saturation depuis plusieurs années. Il dénonce aussi un abus qu’il aurait subi en garde à vue au service de contre-ingérence du B2.

Arrêté le 25 juin 2019 pour les délits d’«instigation à l’insurrection et atteinte à la sureté intérieure de l’État», puis libéré en juin 2020, car déclaré non coupable, Patrick Oyabi a tout de même passé plusieurs mois en prison après plus de deux semaines en garde à vue. Une expérience dont il veut témoigner pour dénoncer les conditions de vie des détenus.

«Comment peut-on avoir un bon traitement à la prison de Libreville ? On peut dormir debout, car il n’y a pas de place pour dormir. On est entassé ! Par jour, on mange un morceau de poulet avec un morceau de pain, ce n’est pas la joie…» Une seule solution : «s’adapter au rythme».

La prison de Libreville est notoirement surpeuplée. Construite en 1956 pour 300 à 400 personnes, elle en accueillerait dix fois plus, selon les estimations des défenseurs des droits humains parmi lesquels Georges Mpaga du Réseau des organisations libres pour la bonne gouvernance (ROLBG).

L’ex-détenu relate son parcours à la maison d’arrêt : «En prison, je suis d’abord rentré dans un quartier difficile où j’ai passé trois mois. Puis, grâce au lobbying des proches et activistes à l’extérieur, on m’a amené au quartier spécial, où l’on garde des hommes politiques ou des hommes d’affaires. J’étais moi aussi un « prisonnier politique« . En prison, j’ai notamment connu Pascal Oyougou, Privat Ngomo, Magloire Ngambia, Armel Mbina, ou encore Ballack Obame.»

Toutefois, Patrick Oyabi précise ne pas avoir été torturé physiquement en prison, où les gardiens s’en prennent plutôt aux trafiquants de drogues, selon lui.

Frappé au B2

En garde à vue, par contre, le leader de Génération Waz dit avoir été frappé par un gardien la veille de son rendez-vous au tribunal. «Un agent est entré dans la salle et a commencé à me taper devant son collègue… et ils m’ont filmé. C’était sans le consentement du directeur du B2, je crois. Car ce jour là il y avait passation de services entre l’ancien et le nouveau directeur. Il a commencé à me dire : ‘‘qui t’a permis d’insulter le président ?’’ J’ai répondu que je n’avais pas insulté le président. Il a ajouté : ‘‘qui t’a permis de parler comme tu parles, de faire ce genre de vidéos ?’’ J’ai répondu : ‘‘j’ai le droit de le faire, je suis Gabonais.” Il a continué : ‘‘tu vas voir ça, tu vas aller en prison et ne plus en sortir, parce que tu es un perturbateur’’».

L’activiste précise avoir été détenu deux semaines au B2 «au secret» – sa famille ou son avocat n’ayant pas pu lui rendre visite. Dans les locaux de la contre-ingérence, à part le passage à tabac, il dit avoir été bien nourri, et a même eu accès à un médecin pour ses problèmes d’estomac dus au stress. Il avait passé auparavant deux jours à la Direction générale des recherches (DGR), où il n’a pas été maltraité.

Dans les services de contre-ingérence du B2, plusieurs gardés à vue ont déjà subi des sévices. C’est le cas des quatre militaires de la garde républicaine arrêtés le 7 janvier 2019 pour être les auteurs d’une tentative de soulèvement manquée. Les quatre militaires avaient été tabassés fortement et brûlés à l’eau chaude, lors de leurs premiers jours de détention au B2, avait appris Gabonreview de sources proches de ces prévenus. L’avocat de Kelly Ondo, Me François Meye, avait même dénoncé ces tortures sur son client sur Radio France internationale (RFI).

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