A l’occasion de la visite officielle de Nicolas Sarkozy au Gabon les 24 et 25 février, le chef de l’Etat gabonais, Ali Bongo, et la présidente du Sénat, Rose Rogombé, ont été décorés de la légion d’honneur par le président français. La cérémonie de cette haute distinction s’est pourtant déroulée dans la plus grande discrétion, loin des caméras, et n’a presque pas été relayée par les médias.
Qu’a valu à Ali Bongo et Rose Rogombé de se voir décerner la légion d’honneur française le 24 février dernier ? C’est la question qui taraude les esprits à Libreville depuis la visite officielle en grande pompe de Nicolas Sarkozy, lors de laquelle un puissant staff médiatique a été mobilisé pour suivre chacun de ses déplacements, passant pourtant sous silence la distinction du chef de l’Etat et de la présidente du Sénat par la France.
L’article R128 du code de la légion d’honneur stipule que «les étrangers qui se sont signalés par les services qu’ils ont rendus à la France ou aux causes qu’elle soutient peuvent recevoir une distinction de la Légion d’honneur».
Dans ce cadre, quel est la nature des services rendus à la France par Ali Bongo et Rose Rogombé pour que le premier ait été fait Grand Officier et la seconde Commandeur de la légion d’honneur.
Pas évident de le savoir vu la faiblesse des informations disponibles à ce sujet. Discrètement relayée par Gabon Matin, la nouvelle de la distinction n’a pas été ébruitée par les nombreux journaux locaux et les chaînes nationales qui ont couvert la visite du président français au Gabon.
L’Elysée a confirmé l’information, affirmant qu’ «ils ont tous deux été décorés par le président», et précisant que «Rose Rogombé a été décorée pour son rôle joué dans la transition».
On se rappelle en effet que le président Sarkozy, dans son discours du 25 février à la Cité de la Démocratie, n’avait pas manqué de «dire à Madame Rose Francine Rogombé combien la France veut rendre hommage à la qualité de son intérim».
«Cette maturité démocratique, cette solidité des institutions, sont l’expression du sentiment d’unité nationale que vos prédécesseurs, Monsieur le Président, se sont attachés à forger depuis 50 ans», avait-il ajouté.
Au final, les impressions sont plutôt mitigées et beaucoup aurait préféré que le président français esquive le sujet plutôt qu’il tombe maladroitement dans des déclarations à double tranchant, après la levée de boucliers de l’opposition et de la société civile sur l’ingérence de la France dans l’élection gabonaise du 30 août 2009.
«J’ai une grande confiance dans votre Président, mais je défie quiconque de penser ou de pouvoir démontrer que la France avait un candidat lors de la dernière élection présidentielle». Là encore, Nicolas Sarkozy n’aura pas convaincu tout le monde, surtout qu’il voyageait avec Robert Bourgi, le monsieur Afrique des couloirs de l’Elysée dont les déclarations avaient provoqué l’ire à Libreville lors de la campagne électorale.
Ce dernier affirmait dans un article du journal Le Monde qu’«au Gabon, la France n’a pas de candidat, mais le candidat de Robert Bourgi, c’est Ali Bongo. Or je suis un ami très écouté de Nicolas Sarkozy».
Des propos qui sapent le défi lancé par Sarkozy et qui ont fait dire au vice président de l’Union nationale (UN, opposition), Bruno Ben Moubamba que « les Gabonais ont été humiliés par un vrai-faux discours sur la fin de la Françafrique quand dans le même temps on avait dans ses bagages la fine fleur de la mafia Françafricaine et on décorait de la Légion d’honneur Ali Bongo et Rose Rogombé».